Annonciation
La liturgie a choisi cette date, évidemment, pour être cohérente avec la date de Noël. Mais aussi il est bon que cette célébration tombe pendant le carême, nous pouvons y voir une chance de méditer sur le mystère de « Dieu parmi nous », méditation qui occupe notre chemin d’espérance tout au long de ce temps particulier.
Comment croire à la Résurrection, donc au sens que nous donnons à la mort du Christ sur la Croix, intrinsèquement liée à la Résurrection, si nous ne faisons pas l’expérience de la fidélité de Dieu à sa promesse ? C’est cette expérience qui a permis aux Apôtres de dépasser leur sidération et leur désespoir devant la Croix, de retourner complètement leur façon de croire pour reconnaître et proclamer la Résurrection.
Pour réaliser sa Promesse, celle faite à Abraham et constamment renouvelée, Dieu s’est choisi un peuple qu’il a préparé tout au long d’une petite vingtaine de siècles, préparé à recevoir Sa présence. Ce peuple polythéiste et qui l’est resté très longtemps (jusqu’après l’exil semble-t-il) a bénéficié d’une relation spéciale avec un des dieux, Yahvé. Le peuple a été appelé à Le choisir parmi tous ceux auxquels il croyait. Il a alors compris la Promesse en attribuant à Yahvé ses victoires, sa protection contre les ennemis. Moïse, les prophètes voyaient dans cette protection guerrière de Dieu le signe de Sa fidélité à sa Promesse. Puis dans les derniers siècles de cette histoire, alors que les prophètes avaient affiné la relation à Yahvé, le peuple a enfin compris qu’il n’était qu’un seul Dieu, et c’était Yahvé. La relation avec Lui s’est alors décantée, affinée, au point qu’on pouvait espérer que le peuple choisi était prêt à l’accueillir.
L’Annonciation marque alors le point de départ de la réalisation de la Promesse. Dieu présent parmi nous, c’est cela l’Incarnation. C’était une folie totale, comment Dieu pouvait-il ainsi se commettre avec ses créatures, comment pouvait-il se risquer à donner sa Vie, son amour à ces créatures ? Et c’était tellement fou que cela n’a pas manqué : les hommes ne l’ont pas reçu malgré les siècles de préparation, malgré tout l’enseignement des prophètes. Le drame était devenu inévitable.
« Puisqu’en effet le monde, avec sa sagesse, n’a pas reconnu Dieu dans la sagesse de Dieu, il a plu à Dieu de sauver les croyants par la folie du message » (1 Co 1, 18).
« Nous prêchons, nous, un Christ crucifié, scandale pour les Juifs et folie pour les païens » (1 Co 1, 23).
L’Annonciation est l’entrée dans ce drame qui se terminera sur la Croix... et par la Résurrection. Elle est le début de la réalisation de la Promesse. Le « fiat » de Marie est la fine pointe de l’accueil que l’humanité fait au don de Dieu. Marie a pu le prononcer parce qu’elle croyait à la Promesse. Dieu a pris le risque de s’appuyer sur ce « fiat » prononcé par celle qu’il avait choisie pour venir parmi nous, et là encore ce fut folie, mais folie consciente et nécessaire.
Dans le Magnificat, Marie reprend toutes les expressions anciennes des réalisations de la Promesse pour terminer ainsi :
« Il a porté secours à son serviteur Israël, se souvenant de sa miséricorde, ainsi qu’il l’avait promis à nos pères, en faveur d’Abraham et de sa descendance à jamais ! » (Lc 1, 54-55).
La fête de l’Annonciation nous remet en selle pour méditer sur la Promesse de Dieu qui se réalise. Sans la foi en elle nous ne pourrions pas croire à la Résurrection.
Marc Durand