Comment je suis redevenu chrétien

Publié le par Garrigues et Sentiers

Jean-Claude Guillebaud
Albin Michel - Mars 2007
 
Un témoignage qui interpelle
 
Depuis quelques années la littérature religieuse nous présente beaucoup de témoignages de conversions, de retours à la foi. Étonnants, émouvants, ils ont presque tous comme point de départ un choc émotif venu bouleverser une vie et la conduire à une rencontre du Christ.
 
L’intérêt du livre de J.C. Guillebaud est de nous guider sur un autre chemin, celui d’un homme de la modernité, éloigné de la foi de son enfance par l’esprit du temps et qui, par une réflexion honnête et soutenue sur l’avenir de notre civilisation, va se trouver ramené sur les chemins de l’Évangile. Ici, c’est l’intelligence qui préside à l’itinéraire, pas une rationalité conceptuelle qui étudierait par exemple les preuves de l’existence de Dieu, mais une raison pratique qui cherche à comprendre son époque et à discerner l’avenir de notre civilisation. Une réflexion qu’il avait tentée dans certains de ses ouvrages antérieurs comme La Refondation du monde. Cette réflexion est ici relue de l’intérieur pour mettre en lumière le fil rouge qui l’a guidée et qui aboutit à retrouver les gestes d’une démarche de foi.
 
L’auteur, analysant la modernité dont il se reconnaît l’héritier, constate à quel point elle est enracinée dans un terreau judéo-chrétien. Héritage vivant et qui reste présent dans des références essentielles de notre société : droits de l’homme, etc. Ceci malgré la dérision sous laquelle certains voudraient ensevelir cet héritage. Un second niveau d’approfondissement le conduit à reconnaître que rien n’aurait été possible sans la permanence, au cœur même des raidissements autoritaires, de la subversion évangélique. C’est ce courant de contestation, de révolte, et finalement de sainteté, au nom de l’Évangile, qui a été le moteur de notre histoire. Conduit ainsi, par une réflexion historique, au cœur même de l’Évangile, l’auteur se trouve face à une dernière étape où la foi se révèle décision. Et là aussi son récit est pour nous riche d’enseignements.
 
Tout est en place pour adhérer à la foi : les raisons de croire sont là, honnêtement discernées dans l’histoire de notre temps, mais la foi ne se déduit pas d’une analyse fut-elle rigoureuse, elle implique une décision, un engagement de la liberté. Engagement qui est loin d’être irrationnel, puisque préparé par une réflexion sérieuse, mais qui implique un choix personnel, celui qu’ont dû faire les disciples après leur première rencontre avec Jésus. Le connaître, l’admirer était une chose, le suivre en était une autre. Il en va de même pour chacun de nous.
 
Il faut être reconnaissant à l’auteur d’avoir relu pour nous avec simplicité et loyauté cet itinéraire. Il nous rappelle à tous que la foi ne se situe pas hors des chemins de la raison, qu’elle ne doit pas craindre de les emprunter. Ils ne nous dispenseront pas de l’ultime acte de foi, mais ils peuvent en assurer la solidité et la fermeté. C’est aussi au terme d’un long chemin de confrontation intellectuelle avec les sagesses de son temps qu’Augustin a pu librement poser le geste qui fera de lui un disciple du Christ. La loyauté de sa recherche a été un des fondements de la fermeté de sa foi.
 
On saura gré aussi à Jean-Claude Guillebaud de nous aider dans l’analyse du monde où nous vivons à nous garder des slogans simplificateurs qui nourrissent une certaine mauvaise conscience chrétienne, comme si notre histoire n’était que celle des échecs et des trahisons de l’esprit évangélique. Puisse la vigueur avec laquelle il montre le contraire être pour nous stimulante.
 
Bref, une lecture agréable et tonifiante qui situe à leur vrai niveau bien des problèmes auxquels nous sommes tous confrontés.
 
Michel Rondet, s.J.
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