L'Assomption... qu'est-ce à dire ?
Fête de l'Assomption, encore une fête dédiée à Marie. Et si celle-ci avait un sens particulier ? Après les articles de Jean-Paul Mensior et de René Guyon qui remettent quelques pendules à l'heure, il ne devenait pas évident d'avaler encore une fête de la Vierge sans y regarder de plus près.
Le dogme de l'Assomption, dû à Pie XII en 1950 affirme : « C’est un dogme divinement révélé que Marie, l’Immaculée Mère de Dieu toujours Vierge, à la fin du cours de sa vie terrestre, a été élevée en âme et en corps à la gloire céleste ». Qu'est-ce à dire ? L'âme séparée du corps, le sens n'est pas clair ! « Élevée à la gloire céleste » ? et les saints, canonisés ou pas, ne le sont-ils pas ? Sont-ils à moitié élevés à la gloire céleste ? Finalement on ne sait pas trop de quoi on parle.
Le texte dit aussi autre chose : il parle de l'Immaculée Mère de Dieu, référence à Éphèse (431) pour rappeler le terme Mère de Dieu, concept christologique, mais surtout au dogme de l'Immaculée Conception de 1854. Dogme peu clair aussi car se référant au péché originel, invention augustinienne qui nous laisse quelque peu perplexes. Ces deux dogmes, 1854 et 1950, semblent bien liés, l'un sur le début de la vie de Marie, l'autre sur la fin. Peut-être nous informent-ils plus sur notre vocation d'hommes, voire de chrétiens, que sur la vie de Marie.
Dieu, s'il a créé l'homme, attend de lui qu'il soit pleinement humain, c'est la moindre des choses. Ce n'est pas notre religion, nos croyances dont nous devrons d'abord rendre compte, mais bien de notre humanité. Notre vie nous a-t-elle permis de nous humaniser ? Vivre pleinement son humanité, avec évidemment sa composante spirituelle. C'est la vocation de tous les hommes, chrétiens ou non. Le péché, dans ce contexte, est ce qui nous coupe de notre humanité, ce qui déshumanise (nous ou les autres). Pour le chrétien, cette humanisation se fait à la suite du Christ, et le péché est alors aussi ce qui nous déshumanise en nous coupant du regard du Christ. Nous ne sommes jamais totalement en concordance avec notre humanité, le mal est là, la vie doit nous décanter, nous faire avancer. Dieu a envoyé son Fils pour nous aider sur ce chemin, l'éclairer, nous tirer en avant. Dans la rencontre avec Jésus nous devenons capables de cette avancée, mais ceux qui ne le (re)connaissent pas n'en sont pas moins appelés à cette décantation qui nous mène à notre statut d'homme accompli. Et nous croyons que ces hommes accomplis « entreront dans la gloire » ; le purgatoire avait été inventé pour concrétiser cela.
Alors Immaculée Conception et Assomption prennent tout leur sens. Ces dogmes disent que Marie, dès sa naissance, n'a jamais participé au mal qui nous détruit (ce qui ne signifie pas qu'il ne l'ait pas atteinte, mais elle n'y a pas participé) et a donc vécu pleinement son humanité. Femme parfaite, totalement accomplie, elle a donc été appelée à "entrer dans la gloire", aucun délai n'était pertinent. Marie devient l'archétype de l'humanité rachetée par le Christ, mais elle, n'a pas eu besoin de ce rachat. Sa rencontre avec Jésus a été telle que, immaculée dès la naissance, elle n'a jamais été solidaire du mal qui sépare l'homme d'avec lui-même et donc d'avec Dieu.
Il ne s'agit pas de célébrer une nouvelle fois la Vierge Marie, mais de célébrer l'appel du Christ qui nous montre ce à quoi nous sommes tous appelés : une vie d'hommes accomplis, capables alors de le rejoindre, comme Marie.
Marc Durand
15 août 2017