A l'écoute de la Parole de Dieu

Publié le par Garrigues et Sentiers

32e dimanche du temps ordinaire

Sg6, 12-16 ; Ps 62 (63) ; 1Th4, 13-18 ; Mt 25, 1-13

 

« Vivez de la Sagesse et veillez pour ne pas manquer la vie éternelle , car elle vaut le coup » , voilà la bonne nouvelle de ce dimanche.

La 1ère lecture (Sg6, 12-16) est un hymne magnifique à la Sagesse : on dirait un amant qui parle à sa bien-aimée : « Elle est resplendissante…et se laisse trouver par ceux qui la cherchent. Elle devance leurs désirs en se faisant connaître la première… » Les éloges de la Sagesse sont fréquents dans la culture grecque ; mais dans la Bible, l’éloge de la Sagesse dépasse la pure logique, le pur raisonnement. Car elle est la compagne de Dieu, déjà présente lors de la création du monde : « Celui qui la cherche dès l’aurore ne se fatiguera pas. Celui qui veille à cause d’elle, sera délivré de tout souci ; au détour des sentiers, elle leur apparaît avec un visage souriant ... ». Elle se donne, mais on ne la possède pas comme un bien de consommation. On ne peut que la désirer, veiller pour la rencontrer, comme un amant qui ne possède pas sa bien-aimée, mais ne vit que de son désir brûlant.

 

Le psaume 62(63) prolonge ce thème de la veille par celui de la soif si présente au Moyen Orient où la sécheresse peut faire mourir de soif hommes, animaux et plantes :« Mon âme a soif de toi, après toi languit ma chair, terre aride, altérée sans eau ». Ce thème majeur de la soif de Dieu, de l’âme à la recherche de Dieu est d’abord une réalité au cœur de la vie quotidienne, avant d’être repris par tous les grands mystiques. « Dieu, ton amour vaut mieux que la vie… ». Ces textes, dégustons-les, comme on le ferait de goulées d’eau fraîche après une balade harassante en plein désert. Ils décrivent, au sein du manque, la plénitude du croyant avec son Dieu : toute sa vie, il le bénit, dit du bien de lui et reçoit des bienfaits de lui. «Comme par un festin, je serai rassasié… » De l’évocation d’une vie joyeuse, le lecteur passe à l’angoisse de la mort : elle est partout présente par tous ceux qui sont déjà morts et laisse les survivants « abattus ».

 

Paul dans sa 1ère lettre aux Thessaloniciens, son premier écrit , affronte la question. Comment peut-on parler de joie de vivre et de Dieu bon, quand la mort emporte tous les hommes. Son épître comporte deux parties : dans la première, il affirme sa foi : non, la mort n’a pas le dernier mot. La preuve : Jésus est mort et ressuscité  ; il emmènera avec lui tous ceux qui sont morts. Paul développera sa foi en la résurrection plus tard dans la 1ère épître aux Corinthiens où il lui consacrera tout le chapitre 15. Il y affirmera clairement la résurrection du Christ (15, 1-11) puis son application aux chrétiens (15, 12-58).

 

L’évangile est tiré de Matthieu 25, 1-13, de la fin de l’ Évangile de Matthieu. Peu avant, au chapitre 23, Jésus invective les pharisiens dans une sorte de jugement anticipé de la fin des temps. Puis il prononce la lamentation sur Jérusalem (Mt.24) et l’annonce de la destruction du temple, de la grande tribulation avec l’avènement du Fils de l’Homme (24,26ss), l’invitation à veiller (Mt 24,36 ss) et trois paraboles développant le thème du jugement : le serviteur fidèle (Mt 24, 45ss), les dix vierges (25, 1 ss), et les talents (25, 14ss). La « dernière heure » est évoquée par une parabole qui, comme celle du gérant habile (Lc 16), peut choquer. N’est-ce pas l’apologie du « chacun pour soi », contraire à la charité chrétienne, qui incite au partage avec les plus pauvres. Ici au contraire, la coupure est entre les «insensées (morai) et « ceux qui réfléchissent » (phronimoi) : cette parabole bouleverse les codes classiques de l’Évangile: dix jeunes filles, des amies de la mariée, attendent l’époux, lampes allumées. Cinq d’entre elles étaient « étourdies » (morai), les autres «réfléchies » (phronimoi). A première lecture, la rupture radicale entre les deux catégories est choquante, surtout qu’une seule lampe allumée aurait suffi pour éclairer tout le groupe : en mettant en commun leurs huiles, les 10 vierges auraient eu suffisamment d’huile pour tenir allumée une seule lampe toute la nuit. Le maître de la parabole est lui-même aussi impitoyable : « En vérité, je vous le déclare, je ne vous connais pas ». C’est la même dureté que l’on retrouve en Mt 7,23, paroles radicales sans doute remontant à Jésus lui-même.

Quelle est cette huile dont il faut garnir la lampe ? Dans la parabole, c’est elle qui permet une veille éclairée pour attendre l’époux. C’est peut-être du côté de la prière et de la vie spirituelle qu’il faut chercher : quelqu’un qui ne prend jamais de temps pour s’arrêter, faire le point, risque de passer à côté de l’époux sans le reconnaître., tel celui qui ne pratique jamais une langue étrangère ne pourra plus la parler.

Comment entendre cette dureté qui continue à m’étonner ? Cet étonnement est une invitation à approfondir ces récits. Cela rejoint indirectement la question de l’Enfer. Personne ne sait s’il existe ou non. Personnellement, j’espère que non ; mais sur ce sujet, une certain consensus « béni oui- oui » me choque : car derrière lui, se cache l’ image d’un dieu « bonasse » : « Rassurez-vous, il n’y aura personne en enfer, car Dieu est tellement bon … » : Deux choses me gênent dans cette attitude : d’abord on décide comment Dieu doit être Dieu et comment il doit se comporter. Ensuite la vie éternelle et le salut sont des choses sérieuses. Ce n’est pas par ce qu’ils sont donnés, qu’il faut les brader. Dans la vie quotidienne, quand on cherche un emploi, il faut le désirer, s’y préparer. Le sportif qui pratique un sport prend les moyens: Pour faire l'Ascension du Mont Blanc, il faut s’entraîner, avoir l’équipement, Être étourdi et partir en baskets risque de coûter cher. Certes, la « vie éternelle » n’est pas une question de performance , elle est de l’ordre du don à accueillir, mais «on ne badine pas avec l’amour », ni ne bricole avec la vie. Un chirurgien, à certains moments se doit d’être radical : « il faut enlever cette tumeur »"

A l'écoute de la Parole de Dieu

Quel message peut-on entendre ?

D’abord recevoir l’exigence de l’évangile : Le profil du Dieu de l’Evangile n’est pas celui d’un dieu « bonne pâte » ; «  je ne suis pas venu apporter la paix mais la guerre, si ton œil te scandalise, arrache le… Qui vient à ma suite sans haïr son père ou sa mère » ; je ne veux pas entrer ici dans l’exégèse de ces versets, mais entendre le ton de ces passages violents.

L’Évangile fait l’éloge de la douceur, du partage et de la bonté. Mais il comporte aussi un aspect radical, personnel et collectif ; dans le jugement de la fin des temps (Mt 25, 41) le verdict est clair : « Allez-vous en loin de moi, maudits au feu éternel ». Le maître donne l’ordre de « jeter dans les ténèbres » celui qui n’avait pas la tenue de rigueur (Mt 25, 30) même s’il n’avait pas demandé à participer au repas.

Quelles bonnes nouvelles tirer de ce dimanche ? Vivre et croire sont des affaires sérieuses. Cela vaut le coup de rencontrer la Sagesse qui se laisse trouver par ceux qui la cherchent ; la rencontrer transforme la vie. « je crie de joie à l’ombre de ses ailes ». Ne soyons pas « abattus »comme ceux qui n’ont pas d’espérance. Nous aussi, nous ressusciterons comme Jésus Christ. Ayons de l’huile dans nos lampes pour accueillir le bien aimé quand il viendra nous chercher.» « Veillez car vous ne savez ni le jour ni l’heure », mais sans crainte, car c’est une rencontre d’Amour.

Antoine Duprez

 

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