A l'écoute de la Parole de Dieu

Publié le par Garrigues et Sentiers

Fête de la Sainte Famille 31/12/2023

Gn 15, 1-6 ; 21, 1-3 ; Ps 104 (105) ; He 11, 8, 11-12 17-19 ; Lc 2, 22-40

Notre méditation inaugure le Nouvel an, nous entrons dans une nouvelle année du XXIe siècle qui s’inscrit dans le troisième millénaire de l’ère chrétienne. Le christianisme a créé une nouvelle temporalité, rompant avec les temporalités juives et romaines mais la temporalité chrétienne de nos jours, se confronte à une temporalité séculière qui la rejette et la mine. Certains (1) parlent d’implosion, d’effondrement de notre Église.

Ne polémiquons pas sur cet effondrement, acceptons-le, si des pans entiers de l’Église incompatibles avec la culture commune disparaissent que nous reste-t-il de trois millénaires de tradition, d’Écritures ? Nous méditerons les textes de saint Paul et l’homélie du pape Paul VI dans ce contexte.

Au premier siècle de notre ère Paul défend un modèle familial issu d’une civilisation patriarcale et pour le parfaire établit entre l’homme et la femme une relation équivalente à la relation entre le Christ et son Église. En ce troisième millénaire ce langage est devenu inaudible : la famille a évolué, elle s’est recomposée avec des individus dont l’espérance de vie prolongée confronte toutes les relations intra-familiales à la durée. Le développement des libertés a permis de s’affranchir du genre, de la procréation naturelle. Dans ce contexte que pouvons-nous entendre de saint Paul : comme au premier siècle les hommes et les femmes ont besoin d’amour. Le respect entre eux est une nécessité pour que des désirs construisent des relations familiales dans la durée. Quelle que soit la personne, sujet de mon désir, elle est reconnue comme sujet et non pas comme objet. Une relation amoureuse de deux personnes libres, volontaires, dans le respect et la reconnaissance de leur singularité fonde une vie affective privilégiée, qui peut se prolonger dans le projet et la réalisation d’une vie familiale élargie aux enfants et à leur éducation.

C’est une richesse pour un adulte de vivre une relation amoureuse partagée, c’est une richesse pour un enfant d’avoir un père et une mère qui le protège, l’éduque et lui permet de devenir adulte. C’est une richesse pour des personnes plus vulnérables que d’autres soit parce qu’elles sont affectées par le handicap, la maladie, la vieillesse d’être entourées, soutenues par des liens affectifs et reconnues dans une intimité.

Pouvons-nous admettre et défendre que ce qui relève de l’intime, de la vie amoureuse, de la vie familiale qui doit beaucoup au Christianisme pour avoir favorisé le développement de la conscience personnelle sur la base de l’intériorité, de la vie spirituelle, indépendamment du degré d’instruction ? Paul VI rappelle dans l’éducation et le développement de cette conscience l’importance du silence, du recueillement, de la prière. Sinon comment transformer nos désirs en besoins spirituels et ce d’autant plus que nous vivons une temporalité sociale dominée par des discours scientifiques et technologiques coupés de la réflexion sur leur finalité et obsédés par l’affranchissement à la nature. Nature comprise non comme un don mais comme une source de matières à extraire, une limite à dépasser, un danger à neutraliser.

Dans notre société l’importance du thème de l’écologie témoigne d’hommes et de femmes préoccupés par les résultats d’une culture économique dominée par les paradigmes d’une techno-science qui provoque l’extinction de vivants et la dégradation continue de nos environnements.

Nous devons au judaïsme et au christianisme de garder nos consciences en vie c’est-à-dire en éveil et dans la vigilance, soucieuses de justice, de fraternité et d’être en capacité d’aimer. Prenons en compte de nos Écritures, de la parole de Dieu posons-nous la question de la finalité de nos actes, reprenons la question fondamentale dans nos relations : « qu’as-tu fait de ton frère » et nous ajouterons « « qu’as-tu fait de ton enfant ? » ce que nous pourrions formuler autrement « t’en es-tu servi comme le prolongement de l’objet de ton désir ? » L’enfant roi de nos sociétés contemporaines risque-t-il de se pervertir et de devenir un asocial, centré uniquement sur la satisfaction de désirs personnels sans prendre en compte la vie d’autrui et dans l’incapacité de surmonter ses frustrations ?

Pour passer le porche de ce Nouvel an dans l’espoir de la paix, sous le signe de la Justice, d’être en capacité d’aimer, pour le dire d’une façon triviale, pour « ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain », débarrassons-nous d’interdits obsolètes (2) sur la vie intime mais restons en chemin dans les traces du Christ en vivant de son enseignement.  

Christiane Giraud-Barra

 

(1) Danièle Hervieu Léger, Jean-Louis Schlegel « Catholicisme vers l’implosion » Golias N°213

(2) Au moment où j’écris ces lignes, nous apprenons par les médias que le Vatican autorise la bénédiction des couples homosexuels et les couples « en situation irrégulière » mais hors liturgie ce qui rend cette mesure inintelligible, elle prête à confusion : le prêtre bénit ou il ne bénit pas ? S’agit-il d’une ouverture mais avec l’intention qu’elle ne soit pas utilisée ?

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article