Pour les élections européennes, votez Edith Stein !
Qui est Edith Stein ? Une femme juive allemande convertie au christianisme, entrée au Walhalla de la nation allemande (1), où elle rejoint la centaine de personnalités marquantes de la civilisation allemande en compagnie d’Einstein, Kant… Le pape Jean-Paul II la canonise sous son identité de Carmélite : Sœur Thérèse-Bénédicte de la Croix, il la proclame co-patronne de l’Europe (2). Elle meurt assassinée dans un de ces nombreux convois qui échouent dans les couloirs des chambres à gaz le 9 août 1942…
Je sais ce que vous pensez : pauvre Christiane avec l’âge, le réchauffement climatique, les synapses rouillent, la temporalité passe à la trappe !
Je persiste et signe : s’il y a des ombres qui deviennent des spectres qui terrorisent les vivants, l’ombre d’Edith Stein nous protège et n’en finit pas de féconder la pensée occidentale européenne.
Edith naît le 2 octobre 1891 à Breslau, dernière-née d’une fratrie de onze enfants, au sein d’une famille juive pratiquante. Très vite elle donne l’exemple de grandes facultés intellectuelles et d’une personnalité très affirmée. Elle devient la première femme allemande à obtenir son doctorat de philosophie à Göttingen sous la direction du philosophe Edmund Husserl, connu dans l’Europe entière comme l’auteur d’une phénoménologie qui révolutionne l’approche de la vérité. Elle devient l’assistante de Husserl. Elle mène ses propres recherches concernant la scolastique médiévale, la philosophie de Thomas d’Aquin et sa conciliation avec la phénoménologie. C’est ainsi qu’avant la première guerre mondiale elle se crée une place par sa seule force intellectuelle dans une élite de philosophes masculins comme Max Scheller (3), Martin Heidegger… Parallèlement à ses travaux de philosophie elle se mobilise pour la condition féminine, milite pour l’égalité homme-femme et entreprend des travaux sur l’éducation et la psychologie, convaincue que les femmes peuvent développer des vocations à l’égal des hommes et ne sont pas destinées uniquement à la vie domestique et à s’occuper des enfants.
La guerre de 14-18 survient et le recrutement militaire décime une partie de l’entourage de Husserl. Edith toujours aussi intrépide se porte volontaire comme infirmière pour soigner les soldats blessés au front. Comme le philosophe et théologien prussien Paul Tillich l’expérience de la guerre la traumatise, mais à l’inverse de Tillich cela ne la motivera pas pour l’action politique. Les vérités philosophiques ne lui suffisent plus, elle revient à la religion. Elle s’est éloignée de la pratique rabbinique et de son exigence rituelle dans laquelle elle a baigné toute son enfance. Dans l’entourage de Husserl des philosophes comme Max Scheller, Adolphe Reinach se convertissent au catholicisme et empruntant leur cheminement, elle rencontre le Christ, elle le vit comme une force de justice et d’amour. Elle s’engage dans la foi catholique et le 1er août 1921 elle est baptisée.
Elle devient enseignante dans un institut dominicain pour filles et poursuit ses conférences sur la condition féminine dans toute l’Allemagne. Elle perçoit très tôt le danger mortel du National-Socialisme, vecteur politique d’un état totalitaire, fondé sur l’idolâtrie raciale, un modèle familial rétrograde avec le modèle de la femme aryenne mère et épouse d’aryens, cantonnée au foyer. Elle s’oppose activement à cette idéologie tout en comprenant que les Juifs seront exterminés et se revendique comme judéo-chrétienne.
Elle poursuit son œuvre philosophico-théologique et aspire à entrer au Carmel. Le 14 avril 1934 elle devient carmélite en prenant le nom de Thérèse-Bénédicte de la Croix. Ses supérieurs l’encouragent à poursuivre ses recherches philosophiques : réponse à l’Etre et temps de Martin Heidegger par l’Etre fini et l’Etre éternel, et théologiques : La science de la croix, étude sur l’œuvre de saint Jean de la Croix.
Sous la pression des persécutions juives le Carmel de Cologne l’envoie aux Pays Bas au Carmel d’Echt… Rien n’y fait, elle est arrêtée par la Gestapo en compagnie de sa sœur Rosa le 2 août 1942. C’est une conscience libre, lucide et déterminée qui pénètre dans la chambre à gaz le 9 août 1942, plus préoccupée des enfants et des personnes qui l’accompagnent que d’elle-même.
Sœur Thérèse-Bénédicte de la Croix, incarnation des trois traditions : juive, chrétienne, grecque meurt en offrant sa vie pour son pays, pour l’Europe. Mort où est ta victoire ?
Christiane Giraud-Barra
- Walhalla, équivalent de notre panthéon : mémorial des personnalités marquantes de la civilisation allemande.
- Autres patronnes de l’Europe : les saintes Catherine de Sienne et Brigitte de Suède.
- Philosophe et sociologue allemand de grande renommée (22 août 1874 –19 mai 1928).