A l'écoute de la Parole de Dieu
3ème Dimanche de l'Avent année B 17/12/2023
Isaïe 61,1…11 ; Lc 1, 46…54 ; 1 Th 5,16-24 ; Jn 1,6…28.
Au milieu du «Petit Carême» de l’Avent, la liturgie de ce jour nous incite à la joie. Même si une certaine ascèse se justifie pour nous préparer à la venue du Christ, cette attente, qui est une espérance de la libération promise par «celui qui doit venir», ne peut se faire que dans la Joie.
Le texte d’Isaïe, qu’on lisait souvent à l’occasion des ordinations sacerdotales : «L’esprit du Seigneur Dieu est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé annoncer la bonne nouvelle …», dévoile ce qui se vivra en vue du Royaume : annonce de la Bonne Nouvelle aux pauvres, guérison de ceux qui ont le cœur brisé, délivrance des prisonniers … etc. Dans tous les cas, le «salut» promis est d’abord la libération de l’homme d’une situation d’aliénation. Ainsi nous est promis par le prophète, outre un “mieux-vivre” matériel ou moral, cette joie qui « n’est pas de vivre d’éclats de rire en éclats de rire, non, ce n’est pas cela» […] Car la joie chrétienne est la paix, la paix qu’il y a dans les racines, la paix du cœur, la paix que seul Dieu peut nous donner : voilà ce qu’est la joie chrétienne» (Pape François, Méditation en la chapelle de la maison Sainte-Marthe, 28 mai 2018).
Cette joie s’exprime triomphalement dans le Magnificat, le cantique de Marie cité par Luc (Lc 1,46-55). à relire et à prier.
Cette même joie, l’épître aux Thessaloniciens la recommande dans la prière, prière incessante, donc joie incessante. Mais Paul appelle aussi au discernement, capacité de juger ce qui est bien de ce qui est mal. Ce n’est pas facile ni évident. Adam et Ève ont mangé ce fruit «désirable pour acquérir le discernement» (Gn 3,6), mais d’usage dangereux et même interdit., car il est perte d’«innocence». Ils durent sortir du «Jardin» d’Éden. Cependant, en les chassant, suite à leur refus de sa Loi, Dieu leur a laissé ce qu’ils avaient payé si cher. Ils ont gardé la capacité de discernement. Encore aurait-il fallu qu’eux et leurs descendants aient été capables d’en faire bon usage !
Et nous ? Nos comportements, individuels et collectifs, depuis nos refus de nous engager jusqu’à nos votes parfois irréfléchis, ont des conséquences, éventuellement irréversibles sur notre entourage, notre société, le monde entier. Eh oui, encore le climat, mais aussi les guerres, l’égoïsme facteur de misère, l’entretien de haines «ancestrales», tel le racisme…
Tout chrétien participe, volens nolens, à la proclamation de la Bonne Nouvelle ou, au contraire, à en présenter un contre témoignage, par ses paroles et plus encore par ses comportements. Comment les prêtres «abuseurs» n’ont-ils pas eu conscience de cette responsabilité mortifère ? «Malheur à moi si je n'annonce pas l’Évangile !», proclame Paul (1Cor 9,16) ; mais malheur aussi à celui par qui arrive le scandale (Lc 17,1).
Beaucoup de convertis attestent qu’ils ont adhéré au Christ à la suite du témoignage d’un homme, d’une femme ou d’un groupe vivant une foi authentique et chaleureuse. Inversement, beaucoup sont sortis de l’Église — ou refusent d’y entrer — parce que les comportements de chrétiens, individuellement ou collectivement, leur semblent inacceptables et en contradiction totale avec leurs prétentions affichées d’être les prophètes de l’amour divin. Un seul homme, une seule femme (tels l’abbé Pierre, sœur Emmanuelle ou mère Thérèsa, pour prendre des exemples populaires) peuvent faire plus pour attirer au Dieu de Jésus-Christ, Dieu d’amour et de joie, que des «croisades» même victorieuses ou de grandes cérémonies dévotes triomphalistes.
L’humilité est un critère assez sûr d’authenticité pour légitimer les «annonceurs» de Dieu. L’exemple de Jean le Baptiste est symptomatique : «Je ne suis pas le Christ, je ne suis pas le prophète…». Il n’est qu’une voix qui essaie de nous atteindre dans le désert de nos vies. Chacun de nous peut n’être qu’une simple voix répercutant l’Évangile — à condition d’avoir quelque chose à dire d’une expérience de vie avec Dieu — l’entendra qui voudra. Un tel témoignage pourra venir aussi de nos communautés, si elles sont vivantes et ouvertes : «Voyez comme ils s’aiment …». La chaleur de l’accueil est une des clefs du succès des sectes, pourquoi leur laisser ce privilège, en n’offrant que des assemblées froides et parfois ennuyeuses ?
Soyons dans la joie, l’amour de notre Dieu, le sien pour nous et le nôtre en retour, ne devrait pas être chose triste.
Marcel Bernos