A l'écoute de la Parole de Dieu
7eme dimanche du temps ordinaire 21/05/2023
Ac 1, 12-14 ; Ps 26 (27) ; 1 P 4, 13-16 ; Jn 17, 1b-11a.
Les lectures de ce jour : la première épître de Pierre et l’évangile de Jean, sont centrées sur le mot «Gloire». Il désigne ici la puissance divine (celle du Pater omnipotens de notre «Gloria» ou de notre «Credo») et ses manifestations. Mais le terme est ambigu dans notre langue actuelle, trop proche d’autres «gloires» comme celle des soldats vainqueurs («Gloire éternelle à nos héros» chantent les chœurs de l’Armée rouge, mais aussi les résistants Ukrainiens). Pire, il peut désigner la vaine «gloriole», généralement éphémère, des stars du showbizz. Ces emplois, en leurs sens contradictoires, risquent de fausser une juste compréhension du mot dans le domaine religieux. On est même en droit de se demander si, contaminée par les «valeurs» de la société civile à un moment de son histoire, l’institution ecclésiale a su toujours bien les discerner.
Quand la liturgie multiplie les ors extérieurs, l’emphase du langage, l’affectation des gestes, elle prétend assurément «rendre gloire (1)» à Dieu. N’est-ce pas là une gloire «mondaine» ? Qu’est-ce qui peut, en effet, dans nos pauvres mots et nos manières maladroites, révéler et, encore moins, accroître la «Gloire» de Dieu ? Nuée lumineuse, qui a guidé les Israélites à leur sortie d’Égypte (Ex 13,21-22), lumière resplendissante nimbant le visage de Jésus à la Transfiguration (Mt 17,2), elle authentifie les théophanies. Sans doute est-il difficile de trouver la parole ou le geste juste pour traduire notre admiration face à la grandeur de Dieu, pour exprimer notre reconnaissance envers «ses œuvres». Mais un peu de modeste gravité, de véritable intériorité, de silence adorant ne seraient-ils pas mieux appropriés à la «Gloire» d’un «Seigneur» né dans la mangeoire d’une étable ?
La Conférence des Évêques de France rappelle à juste titre que : «Le mot hébreu kâbôd veut dire l’importance, le poids, l’influence de quelqu’un dont la puissance agit effectivement dans tout le vaste domaine où il règne. C’est le rayonnement d’une force divine ou royale qui s’impose objectivement et se traduit en actes. Dans le Nouveau Testament le mot gloire signifie souvent la présence invisible mais dynamique de Jésus après Pâques…». La Gloire parait comme un attribut caractéristique de Dieu, d’un être qui a, infiniment, «quelque chose de plus» que notre quotidienne nature.
C’est une même idée de la majoration d’un être qu’exprime le terme d’«autorité». La racine du mot, le verbe latin augeo, désigne la qualité de celui qui a, lui aussi, quelque chose de plus, qui l’«augmente», par rapport à la simple humanité, et justifie ce qu’il est et ce qu’il entreprend, par exemple : l’empereur dans la Rome antique. Alors qu’il enseigne dans le Temple, la question est posée à Jésus, dont tous les évangiles rappellent qu’«il parle avec autorité» (Mt 7,29 ; Mc, 1,22 ; Lc 4,32…), Mt 21, 23 : « les grands prêtres et les anciens du peuple (qui) s’approchèrent de lui et demandèrent : Par quelle autorité fais-tu cela, et qui t’a donné cette autorité ? »
La «Gloire» de Jésus-Christ, la prière sacerdotale en Jean 17 nous le redit, se trouve dans celle du Père, elle est un attribut trinitaire et, si nous sommes appelés à y participer, ce ne peut être que par la médiation de Jésus-Christ. C’est lui qui nous relie au Père : Jn 17, 12. 22 «Quand j’étais avec eux, je les gardais unis dans ton nom, le nom que tu m’as donné […] Et moi, je leur ai donné la gloire que tu m’as donnée, pour qu’ils soient un comme nous sommes un » (2).
Marcel Bernos
NB. : On a écrit Gloire, avec une majuscule, quand le mot désignait la «Gloire de Dieu» ; sans majuscule lorsqu’il était utilisé dans son emploi courant, ou lorsqu’on reproduisait une citation.
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Si on prétend la lui «rendre», c’est qu’il l’aurait perdu, ou que, détenteur de la sus-dites, nous pourrions la donner, l’augmenter !
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L’emploi du mot «Gloire» est plus complexe chez saint Paul, et son étude serait assez sensiblement différente.