Pour une grande fête de la réconciliation

Publié le par G&S

Ce texte est le fruit d’un long travail d’un ami du Gard, François Grémy,
laïc de 82 ans très engagé à la fois dans l’Église et dans la vie citoyenne,
ainsi que son épouse Françoise.

Il a été mis en forme et nous a été communiqué
par notre fidèle amie Danielle Nizieux (qui nous a donné bien d’autres articles).

C’est une réflexion mais surtout d’un projet d’action.

Il est à l’origine principalement destiné
à des prêtres et laïcs responsables de petites communautés (comme on dit)
comme il en existe de ci de là, par exemple à Marseille…

Toute célébration collective du sacrement de réconciliation doit passer par une phase personnelle d’interrogation sur soi. C’est pourquoi, nous proposons d’abord un manuel de révision de vie, que chacun devra, dans la sincérité mais aussi la confiance, accomplir préalablement.

Manuel de révision de vie 1 

Ceci n’est pas un manuel de confession, à l’ancienne, mais donne des axes pour aider à la réflexion.

Il s’agit de se placer en vraie grandeur, dans la position d’une personne qui ne veut exclure aucune dimension et aucune interrogation sur sa propre vie, dans le but de recevoir le sacrement réconciliateur et de retrouver l’alliance totale avec Dieu.

Il convient de faire seul(e), mais en fait avec le Seigneur, sa révision de vie. Cette procédure ne prendra sa signification que si votre Révision de Vie est sincère et approfondie.

            - Le présent document veut nous aider à voir clair en nous–même et par suite à accroître notre autonomie sur le plan spirituel, à nous évangéliser nous-mêmes, afin que nous « portions du fruit, et du fruit qui demeure ». (Jean 15,16) 2.

            - Il ne s’agit que d’une suite d’interrogations sur nous-mêmes. Elles portent sur un certain nombre de facettes de notre vie, que nous n’avons peut-être pas l’habitude d’envisager quand nous nous confessons.

C’est une entreprise sérieuse. Il n’y a aucune magie dans notre foi. Il va donc de soi qu’en l’absence de cette révision de vie, effectuée face au Seigneur, le sacrement subséquemment délivré à la Fête, sera dénué de signification et d’effet. Seul le Seigneur sera juge de notre effort de sincérité, notre recherche de vérité, et de notre humilité. Soyons le témoin honnête de nous-mêmes. Préparons-nous à devenir des femmes ou des hommes « justes et religieux » pour nous présenter devant le Seigneur. Le processus peut être long et exiger un travail important de l’esprit et du cœur. De fait c’est une vraie prière.

Que dire à Dieu et comment le lui dire ?

Au début, nous ne savons pas quoi dire !

Monique Scherrer (dans Prions en Église) : « Je ne sais quoi te dire là, pour toi. Et je ne sais quoi te dire, Dieu invisible pour mes yeux, Dieu silencieux pour mes oreilles ! J’ai seulement confiance. Il y a toi, notre Père attentif. Tu es là pour nous. Tu es là pour moi, Tu es l’autre moitié de ma prière, Tu entends mon silence. Saint Jean-Marie Vianney le Curé d’Ars – infatigable confesseur de génie, nous rappelle : « Ce n’est pas le pécheur qui revient à Dieu pour lui demander pardon, mais c’est aussi Dieu qui court après le pécheur et le fait revenir à Lui ». Allons à Dieu en toute humilité.

            Nous ne sommes pas seulement une personne (un Moi) en ligne directe avec le Moi du Seigneur, nous sommes aussi un membre du Peuple de Dieu, c'est-à-dire de notre Église. Nous appartenons aussi à une famille, à une profession, à une cité, à une nation, à l’humanité tout entière, et nous sommes en relation interactive  et en coresponsabilité avec chacune de ces communautés. Élargissons notre cœur au maximum ! Pas de limite à l’éventail de la fraternité !

Les FONDAMENTAUX d’une « Révision chrétienne de Vie »

Que fais-je sur terre ? Quel sens donné-je à ma vie ? Qu’ai-je fait de mon baptême ? Dans ma vie, quelle place donné-je à Jésus-Christ ?

On peut subdiviser cette grande introspection en 6 catégories d’interrogations.

1) La place du Christ dans notre vie

Suis-je convaincu que l’Evangile est la référence de mes pensées, de mes paroles, de mes actions et de mes omissions ?

Suis-je convaincu qu’il est la vraie voie vers le bonheur ? Le Seigneur veut sans cesse notre compagnie et a l’humilité de s’inviter en nous. « Voici que je me tiens à la porte et je frappe. Si quelqu’un écoute ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui ; et je dînerai avec lui et lui avec moi ». (Apocalypse 3,20)

La fréquentation des offices (eucharisties par exemple), la durée des temps de prière sont certes des quantités mesurables, mais ont moins d’importance que la densité de la présence à Dieu et l’intensité de la vie intérieure. Dieu n’est pas un comptable.

Le Christ Jésus a même l’humilité de nous dire qu’il a besoin de nous. 3

2) Mon attitude 4 dans ma vie privée quotidienne

Quel est mon plan de vie ? Ma manière de vie ? Suis-je en accord avec les règles de l’Eglise ? Avec ma conscience ? Quels sont mes arguments ?

3) Mon attitude dans ma vie de travailleur(euse), dans mon milieu professionnel 

Négligences, mépris, excès de pouvoirs et harcèlements, ambitions. Doutes sur le caractère éthique du travail et la façon d’y répondre.

4) Mon attitude face aux collectivités plus vastes

La société dans laquelle nous vivons, et par extensions successives l’humanité tout entière, jusqu’aux extrémités du monde (Matthieu 24,31 ; 28,19 ; Actes 1,8) 5.

Notamment : Quelle est ma place et mon attitude dans un monde en voie de « planétisation » aux différents niveaux d’agrégation : nation, occident, espèce humaine ? 6

5) Mon attitude face à Notre Église

La communauté ou l’institution majeure pour chaque chrétien que nous sommes.

Notamment : mon rôle dans l’Unité de l’Église, mon engagement quotidien pour l’évangélisation, ma participation à l’œcuménisme et à l’interreligieux, ma participation à la vie de notre paroisse. Mon souci de formation théologique et de meilleure connaissance des textes saints. Ma fidélité à respecter les intentions de prière que le pape nous propose chaque mois.

6) L’argent et la pauvreté

« On ne peut aimer Dieu et l’argent ». « La racine de tous les maux, c’est l’amour de l’argent » (1Timothée 6, 10). « Vous ne pouvez-vous asservir à Dieu et à Mamon » (Luc 16,13) « Le malhonnête argent » (Luc 16,11). « Les pharisiens qui sont amis de l’argent » (Luc 16, 14) ; « un homme bienveillant, ennemi des chicanes, détaché de l’argent » (1 Timothée 3,3). « Votre or et votre argent sont rouillés » (Jacques 5,3).

« Heureux ceux qui ont une âme de pauvres » (Matthieu 5, 3). « Maintenant, riches, pleurez sur vos richesses. C’est un feu que vous avez thésaurisé. » (Jacques 5, 1-3)

Matthieu 25 : « Seigneur, quand t’avons-nous vu ayant faim ? ou ayant soif ? ou étranger ? ou nu, ou malade, ou en prison et ne t’avons pas assisté ? Et il leur répond(ra) : Je vous le dis en vérité : chaque fois que vous n’avez pas faits ces choses à un plus petit, c’est à moi que vous ne les avez pas faites »

La Fête

Chaque groupe organise comme il l’entend cette manifestation. Il sera sans doute utile que cette fête soit précédée, dans la paroisse, d’explications répétées, éventuellement à partir de cette contribution, par écrit, par oral, qui montre la cohésion du groupe de prêtres et laïcs en charge de la paroisse.

Elle requiert une plage de temps certaine, même si la partie « révision de vie » personnelle s’effectue à l’avance.

Elle peut/doit comporter une phase de prières, de chants et de lecture de textes saints ; une phase de partage collectif des difficultés de la vie ; une phase de dialogue avec un prêtre (ou une autre personne ?), une phase de célébration collective du pardon ; une phase d’action de grâces, avec homélie (et chants et lectures).

Enfin une manifestation festive de fraternité !

François Grémy / Danielle Nizieux-Mauger

1 – Ceci s’adresse à l’ensemble du peuple de Dieu, et non pas à cette frange chanceuse qui a déjà personnellement ou collectivement expérimenté ces pratiques.

2 – Il n’est donc pas un questionnaire, comme les enquêtes commerciales ou les sondages d’opinion. Ce n’est pas non plus un interrogatoire de police : personne n’en aura connaissance

3 – Prière anonyme du XVe siècle, et tiré « d’Église de Nîmes » : « Le Christ n’a pas de mains, il n’a que nos mains pour faire son travail d’aujourd’hui. Le Christ n’a pas de pieds, il n’a que nos pieds pour conduire les hommes sur son chemin. Le Christ n’a pas de lèvre, il n’a que nos lèvres pour parler de Lui aux hommes. Le Christ n’a pas d’aide, il n’a que notre aide pour mettre les hommes de son côté. Nous sommes la seule Bible que le public lit encore. Nous sommes le dernier message de Dieu écrit en actes et en paroles ».

4 – Par attitude personnelle, on peut entendre un composé plus ou moins complexe des Pensées, paroles, actions et omissions.

5 – Un auteur romain, Térence (190-159 av JC), a écrit : « Je suis un homme et rien de ce qui est humain ne m’est étranger ». Pensée de l’unité du genre humain, chez un païen (150 ans avant le Christ). Cette pensée de l’unité de l’humanité, en avance sur l’Ancien Testament, est au cœur du message du Christ, venu mourir pour la multitude. Et St Paul a renchéri en proclamant qu’il y a ni juif ni grec (Galates  3,28), ni homme libre ni esclave (1Corinthiens 12-13), ni homme ni femme (Galates 3, 28). Toute l’humanité est une dans le Christ Jésus, unie dans l’amour fraternel, concept qui n’apparaît pas chez Térence.

6 – Au niveau national se pose la question de la solidarité interne, et celle, connexe, de la citoyenneté. L’une et l’autre sont gravement menacées par le règne croissant du chacun pour soi, du rejet de l’autre, des soupçons généralisés, du désintérêt pour la chose publique, de l’abstention électorale, de l’acceptation tacite de l’injustice qui règne et croît, de la médiocrité de l’éducation, et par la puissance l’Argent ?

Que faire (ou ne pas faire) en tant que chrétien dans ce contexte ? : Œuvrer…

pour rétablir en moi-même et autour de moi la confiance au sein de ma famille, de mon voisinage, de ma cité, de ma patrie…..

- pour que l’éducation conduise à une conception de la liberté authentique, (Benoît XVI : celle-ci n’étant pas l’absence de liens ni le règne du libre arbitre ni l’absolutisme du « JE », ni le seul droit de dire « NON ») : « que votre oui soit oui et votre non soit non. (Jacques 5,12)

- pour éliminer en moi et autour de moi les pensées, les pratiques entachées de racisme, pour faciliter l’amitié et le respect entre les communautés.

- pour revaloriser l’action politique en rappelant que « gouverner, c’est servir ; administrer, c’est assurer des conditions qui permettent aux personnes leur plein épanouissement ; assurer la paix sociale, c’est transformer le collectif en communautaire. » (Cardinal Tauran).

- pour que les débats sur la cité, la nation, l’Europe soient respectueux des personnes.

- pour que chacun s’engage concrètement et efficacement au service des autres.

- pour éliminer en moi et autour de moi les pensées, les pratiques entachées de racisme, pour faciliter l’amitié et le respect entre les communautés.

Au niveau international (européen et planétaire), on retrouve les mêmes tentations : le rejet de l’autre, le chacun pour soi, l’exploitation économique, la prétention à la totale souveraineté, le nationalisme absolu (« wrong or right, MY country »). L’exigence du bien-vivre ensemble s’impose à tous les niveaux.  

Publié dans Réflexions en chemin

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F
<br /> C'est très beau et très vrai ce que vous avez écrit Francine Bouichou-Orsini.<br /> Un grand merci à vous.<br /> fanfan<br />
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F
<br /> Cette pensée de Térence, païen  de l’ère pré-chrétienne, et celle contenue dans la prière d’un anonyme du XVème siècle expriment une même réalité : l’unité du genre<br /> humain est profonde parce que enracinée dans une présence intime. Présence à la fois intérieure et transcendante : l’image du Dieu fait homme en nous. Il attend que l’on s’éveille<br /> pour renaître librement, en vue de réaliser ici  notre vocation propre, au sein de notre monde actuel, en relation avec tous les autres.<br /> <br /> <br /> Francine Bouichou-Orsini<br />
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