La liturgie, lieu des combats ?
Depuis toujours et certainement depuis l'origine du christianisme, la liturgie chrétienne a été le lieu des combats, des conflits, des ruptures, des intégrismes.
La liturgie est un rapport collectif entre le peuple des baptisés et sa culture, particulière et journalière, d'une part et entre les humains, limités dans le temps et Dieu, le parfait éternel, l’inatteignable et le totalement universel, d'autre part.
Donc un « lieu » à plusieurs entrées,
Donc un « lieu » où le symbole s’impose,
Donc un lieu de la gravité, du tragique, de la fête,
Donc un lieu du recueillement et de l’ambiguité humaine…
… Le concile de Vatican II a laissé entendre que la communion ne tenait pas à l’uniformité des liturgies.
Mais de fait :
- La liturgie est le « lieu » où s’affrontent la tradition et l'innovation
- la liturgie est le lieu du pouvoir de toutes les sortes de prêtres et de prêtresses qui sont des monuments sacrés investis par le savoir et le pouvoir (on dit hiératiques )
- La liturgie est le lieu de la fête ou malheureusement des débordements ou des rétrécissements : le carnaval, une véritable anarchie incontrôlée ou l’adoration silencieuse et furtive du Saint sacrement exposé en sont deux exemples…
ou encore
le lieu du folklore : sans la foi exprimée en commun, chacun est renvoyé à ses strictes sentiments. Des individus réunis dans un même endroit ne font pas un peuple rassemblée au nom du Ressuscité
ou aussi
le lieu ou l’on récite, psalmodie ou chante des prières.
La liturgie est le lieu des émotions et ensuite de la discussion sur le ressenti. La liturgie fait parler.
Que les liturgies soient religieuses ou civiles, elles sont nécessairement encadrées et préparées, parfois trop et alors elles sont rigides, ou parfois pas du tout et alors elles sont spontanées et donc difficilement maîtrisables.
Pour « sauver » la liturgie de l’enlisement routinier il faut en faire à mon sens
- un lieu pédagogique de la foi d'un peuple (et non un lieu de catéchése)
- une expression humble et dépouillée d'une foi minimum commune mais réelle, et pas seulement d'un consensus esthétique,
- une expression simple selon l'ardeur journalière d'un peuple souvent harassé,
- une négociation entre de multiples courants
- peut-être une « indifférence » d'amour
On n'évitera jamais que la liturgie :
- fasse naître des dissensions (cf après le concile l'affaire Lefèvre , la messe de Saint pie V, le plain chant,)
- soit une guerre des symboles
° parce qu’ils varient d’une culture à une autre,
° parce que le peuple n’est pas homogène,
° parce que le célébrant est marqué par son histoire personnelle.
- concrétise des options théologiques voire politiques.
Le mieux est de savoir tout cela et de continuer à tracer un chemin vicinal de beauté, de miséricorde, d'intercession, de communion.
La liturgie signifie la permanence collective d’un désir de représentation de la création entière devant Dieu, ainsi qu’une démarche d’adoration, d’action de grâce et d’offrande des baptisés.
Christian Montfalcon