À l'écoute de la Parole de Dieu
L'Epiphanie du Seigneur sur l'arc triomphal de la basilique Sainte-Marie-Majeure de Rome, œuvre du pape Sixte III (432-440)
Dimanche 7 janvier – Fête de l’Épiphanie
Is 60, 1-6 – Ps 71 (72) – Ep 3, 2-3a ; 5-6 – Mt 2, 1-12
L’Épiphanie est une fête heureuse, Dieu se manifeste devant son peuple. Chez nous la traditionnelle « marche des rois » appuie les réjouissances qui accompagnent cette période. Les quinze jours entre Noël et l’Épiphanie sont peut-être le sommet des périodes de fête dans une année. Et le « jour de l’an », fête laïque, ne dépareille pas.
C’est un texte de bonheur que nous propose le prophète Isaïe.
Il est lancinant pour tous actuellement de voir rappeler ce qui se passe à Gaza, en Ukraine et ailleurs dans le monde quand nous parlons de la gloire de Dieu et de la joie qu’il nous offre. Mais il semble que c’est encore plus lancinant pour les Gazaouis, les Ukrainiens et les autres qui sont écrasés sous les bombes ou d’autres armes. Ce texte merveilleux d’Isaïe est bien difficile à proclamer en ces temps. C’est le Jésus sous les coups et les tortures qui nous hante, la « gloire » de Dieu n’est plus ce qu’elle était proclamée. La trahison des hommes est éclatante alors que nous célébrons la gloire que Dieu leur offre. Ce qui se passe interroge notre foi, ce que nous faisons de la manifestation de Dieu.
Le prophète Isaïe nous annonce que nous passons de l’obscurité à la Lumière :
« Les nations marcheront vers ta lumière,
et les rois, vers la clarté de ton aurore.
Lève les yeux alentour, et regarde :
tous, ils se rassemblent, ils viennent vers toi » (Is 60, 3-4).
Il s’agit de la lumière de Jérusalem qu’elle a reçue par la gloire du Seigneur.
La lumière est ce qu’annonce saint Jean dans le Prologue : « La lumière luit dans les ténèbres et les ténèbres ne l’ont pas arrêtée... La vraie lumière faisait son entrée dans le monde... À tous ceux qui l’ont accueilli il a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu » (Jn 1, 9,13).
Et à la Lumière se joint le Verbe, sans le Verbe pas de relation, pas d’amour. Il n’y a que la mort lorsque le Verbe est mort, quand on refuse de se parler : « Et le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous » (Jn 1, 14).
Alors les trésors du monde afflueront vers Jérusalem.
De quelle Jérusalem parle-t-on donc ? Au premier degré les Juifs du 4e siècle avant notre ère n’avaient pas d’hésitation, il s’agissait de leur ville Jérusalem qui était ainsi glorifiée aux yeux du monde entier après avoir été dévastée. Ne nous trompons pas de Jérusalem et ne nous contentons pas de parler de « Jérusalem céleste ». À nous de savoir ce qu’est la Jérusalem actuelle ainsi décrite... Une Jérusalem qui doit resplendir aux yeux du monde entier, de toutes les nations. Ainsi Dieu ouvre les portes, et saint Paul l’expliquera plus tard, le salut annoncé, la gloire de Dieu, son « épiphanie », s’adresse à la terre entière. « Il n’y a plus Juifs ni Grecs... » écrira-t-il en Gal 3, 28.
Et tournons-nous vers lui pour chanter avec le psaume les quelques versets qui suivent :
« Béni soit Yahveh, le Dieu d’Israël
qui seul a fait des merveilles,
béni soit à jamais son nom de gloire,
toute la terre soit remplie de sa gloire » (Ps 71-72, 18-19).
À nous de faire en sorte que ce chant ne soit pas mensonger.
Saint Paul, dans sa lettre aux Éphésiens, donne le sens de cette épiphanie : toutes les nations sont associées au même héritage, au même Corps, au partage de la même promesse. Il n’y a plus de centre privilégié, que ce soit Jérusalem, ou Rome plus tard. Dieu se manifeste dans toutes les nations. Jésus a dit à la Samaritaine : « Crois-moi, l’heure vient où ce n’est ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père... L’heure arrive, - déjà même elle est là ! - où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité » (Jn 4, 21, 23)
L’Évangile de Mathieu nous relate le conte des rois mages. Dans ces images il nous montre l’hommage des nations annoncé déjà par Isaïe. Mais cet épisode évoque bien d’autres choses. Jésus est de la lignée de David, ce roi à qui Dieu a fait la promesse de susciter une lignée. Il voulait construire une maison pour Dieu, et Dieu lui a répondu que c’est Lui-même qui la lui construirait en suscitant une descendance :
« Je te susciterai dans ta descendance un successeur
qui naîtra de toi,
et je rendrai stable sa royauté.
Moi, je serai pour lui un père » et lui sera pour moi un fils » (2S, 7, 12-14), texte que nous avons lu la veille de Noël.
Jésus est le fruit de la Promesse de Dieu, il s’inscrit totalement dans l’Histoire Sainte, il n’est pas un OVNI venu de nulle part, mais un Juif en qui Dieu a mis tout son amour pour les hommes. Fils de David, Jésus est donc celui que le peuple attendait, dit le Messie. Et là encore la joie qui nous comble ne doit pas oublier les laissés-pour-compte, les meurtris. La venue de Jésus est accompagnée du meurtre des innocents. L’Évangéliste terminera le conte par ce qui suit :
« Une voix dans Rama s’est fait entendre,
une plainte amère,
c’est Rachel qui pleure ses enfants » (Jr 31, 15).
Rachel, la préférée de Jacob, déjà à cette époque (1500 ans plus tôt) est dans la déréliction. Rachel pleure encore actuellement en bien des lieux du monde. Mais Dieu lui promet de la consoler.
À nous d’aider Dieu.
Marc Durand