A l'écoute de la Parole de Dieu

1er dimanche de Carême 26/02/2023

Gn 2, 7-9 ; 3, 1-7a ; Ps 50 ; Rm 5, 12-19 ; Mt 4, 1-11

Ils mangèrent le fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, donc le mal existait déjà. Qui était-il ? La Genèse le présente sous la forme d'un serpent, un animal très rusé et créé par Dieu !

Le péché ce n'est pas tellement d'avoir mangé un fruit pour sa saveur et son don d'intelligence mais c'est de vouloir devenir « semblable  à des dieux », semblable à Dieu lui-même c'est-à-dire l'éliminer, devenir son propre maître, affirmer sa toute puissance. Eve partage le fruit de l'orgueil avec Adam son mari. Marie partagera humblement l'éducation du Fils de Dieu avec Joseph son époux pour le bien de l'humanité.

Au fruit de l'arbre de la connaissance qui flatte l'orgueil de l'homme et l'éloigne du jardin d’Éden, répondra le fruit de l'amour immense de Dieu, un dieu qui s'humilie devant l'homme au point de venir sur terre sous les traits d'un nouveau-né.

La lettre de Saint-Paul aux Romains commence « par un seul homme, le péché est entré dans le monde » Adam ! le bouc émissaire de l'humanité ! Il est vrai que l'orgueil démesuré mène à toutes les tentations. Mais le péché est entré tout naturellement dans l'humanité. Et le péché préfiguré par l'action du serpent de la Genèse étant extérieur à l'homme ne peut pas être héréditaire. Pourtant les disciples croyaient au sujet de l'aveugle-né que ses parents avaient péché et qu'il était né ainsi, ce que Jésus démentira. Le mal est imbriqué avec le bien comme l'ivraie avec le blé. On sait que c'est Dieu le semeur du blé, pour l'ivraie c'est plus obscur mais ce n'est pas l'homme. Nous naissons tous sans péché, le nouveau-né est innocent même s'il vient d'une relation adultère, il a l'esprit de Dieu en lui. Mais le péché se manifeste dès les premiers mois de son existence : caprices, colères, impatiences.

La mort biologique fait partie de la vie terrestre, elle n'est pas venue du péché comme le dit Paul. Nous sommes obligés de passer par une vie terrestre pour pouvoir entrer dans le Royaume de Dieu et c'est cette mort qui nous en ouvre les portes. Le Christ a vraiment pris sa personnalité de Fils de Dieu en passant par sa vie terrestre, sa mort et sa résurrection.

Au cours de son baptême, Jésus a entendu une voix venue des cieux qui disait : « celui-ci est mon Fils bien-aimé » Tout de suite après, Jésus part au désert. Dans le désert il n'y a pas de chemin, c'est à nous de tracer notre propre route. Jésus saura très vite que c'est lui le chemin. Ces tentations sont aussi les nôtres, tentation du pouvoir avec ses abus, de l'orgueil au mépris des plus faibles, de l'affirmation de sa liberté vis à vis de Dieu qui en vient à adorer des idoles comme l'argent, la drogue, l'alcool, la vitesse et même le numérique. Dernièrement le mélange drogue vitesse a brisé une famille dans un accident de la route.

Imaginons le texte sans faire allusion au démon. Jésus cherche qui il est, est-il réellement Fils de Dieu comme la voix l'a désigné ? Son intuition le conduit au désert, un lieu de réflexion, de retour sur soi. Cet homme a mesuré les pouvoirs qu'il possédait : de guérisons, de commander aux éléments, pouvoir aussi d'élocution, de connaissance des textes. Ces capacités viennent elles de Dieu dont il sent sa présence dans sa vie ou viennent-elles de lui-même, de l'homme, de ce fils d'homme comme il se définira par la suite ? Comment ne lui viendrait-il pas à l'esprit d'utiliser ses pouvoirs à son profit ou pour flatter son orgueil ? Le « si tu es le Fils de Dieu » changeons le en « Suis-je bien le Fils de Dieu ? ». Aucun doute, les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés... Ce sera par les œuvres qu'il se fera reconnaître Fils de Dieu, celui qu'on attendait.

Il pourrait changer les pierres en pain et ainsi supprimer la misère du monde, c'est un projet tentant et universel qui supplanterait Dieu. Oui mais on ne vit pas que de pain. La spiritualité exige que le pain passe en second.

Et ce Temple, la maison de Dieu, il pourrait le défier, l'exclure de sa vie et plutôt que des actions de grâce, il pourrait s'investir dans ses pouvoirs reçus dès sa naissance. C'est la tentation du miracle qui renforcerait sa toute puissance à l'égard de Dieu. Mais il sait que ses miracles s'accomplissent par la foi de ceux et celles qu'il guérit au nom de Dieu : « ta foi t'a sauvé »

Mieux vaut se diriger vers une très haute montagne comme celle qui le conduira à sa transfiguration

Tous ces royaumes qu'il voit, il pourrait les posséder tous et mettre le sens de sa vie dans ces richesses Mais n'est-il pas le Fils du Très-Haut ? Et ces richesses toutes intérieures ne les a-t' il pas reçues de Dieu ?

Il n'utilisera donc pas ses pouvoirs pour faire le mal, pour mettre Dieu en porte-à-faux.

L'homme Jésus s'est trouvé dans ce désert. Il a pris conscience qu'il est bien le Fils de Dieu. Ce n'est pas une armée comme un roi de ce monde qu'il va recruter mais des disciples pour répandre le message que le Père lui a confié.

Aujourd'hui combien de tentations aboutissent au meurtre, à la vengeance, à la possession illégale ? La tentation implique un combat, la maîtrise de soi et même la foi pour y résister. Jésus gardera son sentiment de frustration, sa faim d'un simple morceau de pain. Il gardera sa foi en ce Dieu qu'il ne voit pas tout comme nous mais dont il sent la présence en lui et son amour infini.

Combien de dictateurs ont obtenu ces richesses, l'étendue de ces territoires en soumettant leur peuple et les autres peuples, en les réduisant à la misère ou les massacrant car ils avaient le pouvoir de le faire. Combien se prosternent devant la drogue, devant l'argent sale ! Des détournements de fonds aux petits trafiquants de drogue il y a de la place pour la corruption généralisée dans le cœur des hommes. Et si une action malhonnête s'offre à leur convoitise combien y résisteront ? Manipuler le numérique pour favoriser les dérives vers la violence ou la pédophilie, abuser des plus petits, exploiter les enfants comme une marchandise, savoir qu'on aura toujours le dessus sur les plus faibles sans être beaucoup inquiété, le savoir mais qui tentera de ne pas y céder si Dieu ou les valeurs humaines et morales ne sont pas prioritaires dans le coeur de l' homme ?

Et nous ? Qui n'a pas la tentation d'amasser pour le plaisir d'amasser sans aller jusqu'au pire pour posséder des biens immobiliers, des résidences avec jardin et piscine comme un certain dentiste en ruinant la santé de ses patients, le crime organisé, tout ceci quand tant d'autres manquent d'un toit et vivent sous des tentes ?

A ces tentations Jésus oppose Dieu, le mot Dieu est dans chacune de ses réponses. Il a toujours gardé cette présence de Dieu dans son esprit au cours de ces tentations. Mais nous, de plus, nous pouvons invoquer au moins l'amour du prochain, la solidarité avec les plus faibles pour ne pas y succomber.

Le psaume est une demande de pardon. « Ma faute est toujours devant moi ». Difficile de s'en défaire quand on possède des richesses quelquefois acquises illégalement. Complices nous aussi du péché du monde, nous pouvons nous aussi nous adresser à Dieu et lui dire : « Crée en moi un cœur pur, ne me chasse pas loin de ta face, rends moi la joie d'être sauvé ».

Christiane Guès