Pas facile d'être catho, s'inquiètent les évêques
LOURDES - Pas facile d'être catholique quand les églises se vident, que la transmission de la foi est en chute libre et qu'il faut refuser de s'ériger en groupe de défense là où des intégristes crient à la "christianophobie", s'inquiètent les évêques de France.
Les évêques, réunis en assemblée plénière à Lourdes jusqu'à mercredi, admettent devoir affronter des défis majeurs pour enrayer un catholicisme déclinant et faire qu'« on ne rougisse pas d'être croyant ».
Invitée de la dernière heure à l'agenda épiscopal: la fronde menée par des groupes intégristes contre la pièce de l'Italien Romeo Castellucci, "Sur le concept du visage du fils de Dieu". Mgr Laurent Ulrich, archevêque de Lille, est clair: « Nous ne nous situons pas comme un groupe de défense ».
« Ce n'est pas très tendance de dire qu'on est chrétien. Il y a parfois une façon de traiter le christianisme qui peut nous révolter, reconnaît ce vice-président de la Conférence épiscopale. Mais nous voulons être les disciples de celui qui, souffrant la passion, a dit : “Remets ton épée au fourreau” ».
Les évêques ont d'autres fers au feu.
Comment motiver « les empêchés du dimanche », prêts, déplore Mgr Bernard Dubasque, secrétaire général adjoint de la Conférence épiscopale, à « faire 20 minutes de route pour aller au supermarché, mais pas dix pour se rendre à l'église ? »
Comment valoriser le dimanche dans un diocèse à dominance rurale, où chaque paroisse compte dix à quinze clochers, lorsqu'on sait qu'à terme il n'y aura qu'un seul rassemblement dominical ? Certains évoquent le covoiturage, d'autres un partage accru des bonnes pratiques, de meilleures liturgies, tant il est « essentiel que le dimanche reste un temps fort de ressourcement ».
Et « comment parler de Dieu dans une société de consommation ? », s'interroge Mgr Bernard Podvin, porte-parole de la Conférence épiscopale. « On ne vit plus dans un monde où la foi se transmet d'une génération à l'autre, par imprégnation. Les jeunes sont aujourd'hui confrontés à une multitude de possibles. Comment les aider à discerner, à hiérarchiser ? »
Certains évoquent « une énorme rupture de transmission », un « analphabétisme religieux » qu'une trentaine d'heures de catéchisme par an, dispensées en dehors de tout environnement porteur, ne suffiront pas à pallier.
Reste que la situation est loin d'être désespérée et que plus d'un – parmi les 125 évêques réunis à Lourdes – a déjà retroussé ses manches pour aborder la mutation d'un « christianisme d'héritage » en un « christianisme de proposition ».
La « nouvelle évangélisation » prônée par le pape Benoît XVI a même donné des ailes à certains, comme à Mgr Dominique Rey, évêque de Toulon-Fréjus, diocèse où l'on passe de la « pastorale de la cloche » à la « pastorale de la sonnette ».
Autrement dit, comment aller prêcher l'Évangile hors les clochers et jusque dans les boîtes de nuit, si nécessaire, ou encore le confier à des communautés charismatiques venues tout droit d'un Brésil plus coloré, plus effervescent ?
Si le but est de « chercher avec ardeur et humilité des voies nouvelles, sans avoir à rougir de l'Évangile », comme le souligne Mgr Bernard Podvin, cette méthode implantatoire ne fait pas toujours l'unanimité.
Certains veulent rétablir « la culture chrétienne », « enseigner le fait religieux », en plus de la catéchèse. Connaître les bases du judaïsme, de l'islam, insistent-ils, permettrait de supprimer la peur de l'autre.
D'autres souhaitent une meilleure formation des prêtres à l'écoute et à l'accompagnement spirituel. Savoir parler de la vie, de la mort, du pardon, des questions existentielles, voilà ce qui fait défaut.
Ou, plus simplement, selon Mgr Yves Patenôtre, évêque de Sens-Auxerre : « savoir dire les mots de toujours dans le monde d'aujourd'hui ».
Article du journal gratuit 20
minutes
08.11.11