Le "sacrement" ne met personne "à part" ou "au-dessus" !
Ce qui me paraît à la racine du cléricalisme c’est le caractère sacré que prétend conférer le sacerdoce. Il me semble que l’Église catholique ne pourra changer et participer à la vie du 21e siècle que si elle renonce au sacerdoce comme pouvoir sacré incarnant Dieu sur terre. Or ceci paraît un défi immense, mais je le crois possible « avec les armes de la foi ! » brossées par Paul (voir ci-dessous Éphésiens 6, 10-18), un combat largement à la hauteur de la sortie d’Égypte !
Défi particulièrement difficile au vu des affirmations très fortes de la Constitution Lumen Gentium de Vatican 2 (chap.3, 20 -21) : « ...Les évêques... président au nom et en place de Dieu le troupeau... en sorte que, qui les écoute, écoute le Christ, qui les rejette, rejette le Christ et celui qui a envoyé le Christ ». « Ainsi donc en la personne des évêques assistés des prêtres, c’est le Seigneur Jésus-Christ, Pontife suprême, qui est présent au milieu des croyants. » Et encore : « Par l’imposition des mains et les paroles de la consécration, la grâce de l’Esprit-Saint est donnée et le caractère sacré imprimé, de telle sorte que les évêques, d’une façon éminente et visible, tiennent la place du Christ lui-même, Maître, Pasteur et Pontife, et jouent son rôle ».
Le mythe : des personnes sont plus que les autres. Des personnes peuvent être modifiées dans leur être même par un rite religieux. Ceci, c’est ce qu’affirment les hommes de l’Église catholique, et la Tradition avec eux, jusqu’à nos jours. Ceci est le fruit de leurs méditations, discussions et décisions qu’Ils jugent irrévocables, et ils font obligation d’y adhérer si l’on veut se dire de l’Église catholique.
La réalité : des humains, tous aimés de Dieu, et qui le découvrent avec émerveillement, se rassemblent en Église. Ceci leur est visiblement signifié par le rite du baptême. On les désigne alors par le terme de « baptisés » dans la mesure où l’on veut caractériser leur appartenance au monde de celles et ceux qui, explicitement, se réfèrent à Jésus, et se reconnaissent comme aimés de Dieu.
L’ambiguïté : en parlant de « baptisé », l’Église catholique veut aussi désigner une personne qui serait marquée d’un caractère sacré, ineffaçable, non renouvelable, reçu lors du baptême et qui la distinguerait radicalement des autres. De la même façon, l’Église catholique parle d’un caractère sacré, unique, indélébile, donné par la confirmation et l’ordination sacerdotale (évêques et prêtres).
Ce mode de pensée relève en fait d’une pensée magique et de la croyance en l’intrusion d’un divin extérieur qui viendrait interférer sur la constitution même d’êtres humains. Pour nous, modernes, même si nous sommes baignés dedans depuis notre enfance, ceci paraît totalement magique et rationnellement inacceptable. Avec de telles affirmations, nous évoluons dans un univers fantasmé dit « sacré » ou « saint », et une mode de penser pré-scientifique : nous nous comportons comme si ces rites (baptême, confirmation, sacerdoce) pouvaient changer radicalement et de façon définitive quelque chose à ce que nous sommes comme homme, comme femme, bref à ce que nous appelons la nature humaine.
Bien sûr ces rites vécus dans la communauté catholique, ces sacrements (faire du sacré), peuvent nous amener à modifier notre cœur, notre vision de la réalité et pousser ceux qui les reçoivent à vivre et à se comporter différemment. Mais le rite en soi reste un geste purement humain n’entraînant en lui-même aucune modification « sacrée ».
Notre immense chance : pouvoir affirmer, en nous appuyant sur Jésus et son message, que tout humain est infiniment précieux, « sacré » et aimé, du fait même qu’il est homme ou femme. Ne serait-ce pas cela l’essentiel du message et de la bonne nouvelle de l’Évangile ? N’est-ce pas cela qu’il s’agit de faire expérimenter à chaque personne, tant par notre façon de la considérer que de la traiter, aussi bien personnellement que dans son existence sociale ? Chaque femme, chaque homme, chaque enfant, ô merveille, est « sacrée » : il n’y a pas des gens plus sacrés que d’autres. Et aucun rite, magique et/ou religieux, ne peut la rendre plus sacrée ni venir modifier ce qui en fait une personne. Bien sûr influencer le psychisme, modifier le psychologique ou le physique est possible mais ça ne modifiera pas le fait que cet humain, même modifié reste une personne à part entière, unique, inaliénable. N’est-ce pas ce trésor que le christianisme, même à travers toutes ses vicissitudes, apporte au monde entier et que nous sommes en charge de vivre et de transmettre sans relâche et ce, malgré tous les retours en arrière et les contre-témoignages accablants ?
Pour garder et déployer cette nouvelle extraordinaire manifestée dans la personne et le message de Jésus, nourrie de tant et tant d’expériences et témoignages vécus depuis 20 siècles, nous avons besoin de ne pas être seuls et donc de nous donner une organisation, bien sûr adaptée aux lieux et à l’époque, indépendante du sexe, sans aucun caractère « sacré », divin, simplement au service de toutes celles et ceux qui se reconnaissent héritiers de ce message de Jésus et de cette mission.
Peut-être faut-il sortir de nos Églises particulières pour vivre ce service de notre famille humaine dans des formes réinventées, adaptées à nos mentalités modernes, à nos continents, à nos connaissances et découvertes actuelles... Tout être humain est unique, inaliénable, « sacré », mais aucun n’a un pouvoir sacré. Aucun n’est dieu ni ne peut prétendre agir en place de Dieu. Certains assurent des services et des responsabilités hiérarchiques. Mais personne n’est plus que les autres même s’il a des pouvoirs plus grands !
« Je te bénis, Père, d’avoir caché cela aux sages et aux habiles, et de l’avoir révélé aux tout-petits. » Pourquoi une telle phrase dans la bouche de Jésus ?
Jean-Luc Lecat
Éphésiens 6, 10-18
10...Puisez votre énergie dans le Seigneur et dans la vigueur de sa force. 11 Revêtez l’équipement de combat donné par Dieu, afin de pouvoir tenir contre les manœuvres du diable. 12 Car nous ne luttons pas contre des êtres de sang et de chair, mais contre les Dominateurs de ce monde de ténèbres, les Principautés, les Souverainetés, les esprits du mal qui sont dans les régions célestes. 13 Pour cela, prenez l’équipement de combat donné par Dieu ; ainsi, vous pourrez résister quand viendra le jour du malheur, et tout mettre en œuvre pour tenir bon. 14 Oui, tenez bon, ayant autour des reins le ceinturon de la vérité, portant la cuirasse de la justice, 15 les pieds chaussés de l’ardeur à annoncer l’Évangile de la paix, 16 et ne quittant jamais le bouclier de la foi, qui vous permettra d’éteindre toutes les flèches enflammées du Mauvais. 17 Prenez le casque du salut et le glaive de l’Esprit, c’est-à-dire la parole de Dieu. 18 En toute circonstance, que l’Esprit vous donne de prier et de supplier : restez éveillés, soyez assidus à la supplication pour tous les fidèles.