Carême 2021 – Un chemin d’espérance

Publié le par Garrigues et Sentiers

Nous entrons en carême. Traditionnellement il nous est demandé de faire pénitence, le sommet de cet appel se trouvant à la fin, le Vendredi Saint, afin d’être prêts à fêter la Résurrection de Pâques. Quarante jours de chemin de pénitence afin de pouvoir nous réjouir... est-ce cela la joie d’être chrétien ? Proposons alors une autre démarche : quarante jours de chemin d’espérance afin que la Résurrection prenne toute sa place dans nos vies.

 

La Résurrection proclame la fidélité de Dieu à ses promesses, l’ouverture des temps nouveaux qui donnent sens à l’histoire ancienne et à notre vie actuelle. La Résurrection est annonce de la victoire sur l’anéantissement, avec la fin de la Loi et l’ouverture au monde entier. Elle inaugure ces temps nouveaux qui doivent nous rassembler à la suite du Christ, rassemblement auquel nous sommes appelés à travailler. Elle est le fondement de notre espérance que nous devons construire chaque jour pour ne pas sombrer soit dans l’utopie, soit dans la désillusion. Là est notre chemin d’espérance.

 

Espérance réelle parce que nous croyons à la Promesse, celle faite à Abraham, à Moïse, aux prophètes et finalement promesse du Salut annoncée par Jésus. Par son Esprit Jésus vit au milieu de nous et nous mène vers la fidélité à ce que nous sommes, à notre être humain. Il nous invite à la plénitude de la vie, à avancer sur ce chemin en sachant que nous allons vers cette vie que nous espérons. La promesse n’est pas de faire des miracles sur terre, mais de rester à nos côtés et à transfigurer ces joies et ces souffrances par notre résurrection à venir qui commence dès maintenant.

 

En ce temps de carême, nous sommes d’abord appelés à écouter l’Esprit qui vit en nous. Cela change notre regard sur les événements, sur nos souffrances et sur nos joies. Sur ce chemin d’espérance nous sommes enracinés en Dieu toujours présent ici et maintenant, appelés à nous engager à côté de l’engagement de Dieu.


Mais la Résurrection passe par la Croix, réalité qu’il nous faut regarder en face. Regarder le mal à l’œuvre en même temps que Dieu à l’œuvre. Nous ne sommes pas démunis devant le mal, mais il nous atteint et nous en sommes souvent complices. Notre foi en la Résurrection nous apprend que par sa mort Jésus « a réduit à l’impuissance celui [Satan] qui a la puissance de la mort » (He 2, 14). Jésus n’a pu éviter la Croix pour effectuer sa mission : permettre au Père de « nous arracher aux Ténèbres pour nous transférer dans le Royaume » (Col 1, 13). Nous ne pouvons éviter la Croix et la mort à nous-mêmes.

Mais cela ne s’arrête pas là. Au cœur de nos morts notre espérance fonde un dynamisme créateur. La création gémit, comme dit saint Paul, mais elle avance avec nous. Si nous ne fuyons pas la Croix, nous devenons le levain dans la pâte qui transforme notre manière de vie au sein du réel. Notre espérance est alors active au sein de cette transformation. Si nous adhérons à l’espérance chrétienne, si nous voulons avancer sur notre chemin d’espérance, une autre réflexion est nécessaire : comment, très concrètement, incarner cette espérance dans notre vie de tous les jours, au niveau personnel, dans notre entourage, dans nos villes, dans notre pays, dans le monde ? Être le levain dans la pâte est une grande exigence. Éviter cette exigence serait se bercer d’illusions, très spirituelles peut-être, mais bien trompeuses.

 

Fondée dans le noir de la foi, notre espérance débouche sur notre action de transformation du monde qui commence par celle de notre regard : voir en chacun, au-delà de ses lourdeurs, la beauté de la vie en lui, en tenant compte du mal présent, voir le bien qui peut advenir. Dieu nous espère à sa ressemblance. En reconnaissant l’inaccompli de nos vies, notre attente devient un creux que Dieu vient combler.

 

Nous vivons un temps difficile, un temps d’affliction. Souffrance physique, souffrance morale, société bouleversée, meurtrie et dans l’incertitude, un certain monde qui meurt dans la douleur. Rappelons-nous que l’histoire apparaît en fonction de sa fin, dans ce qui se produit grâce à la Promesse, dans ce que cette promesse permet de percevoir. C’est le salut annoncé par Jésus, et confirmé par sa Résurrection, qui donne le « la » de notre histoire. La Croix a ouvert une brèche : mort du vieil homme et naissance de l’homme nouveau, disparition de l’ordre ancien (fermé sur soi) et apparition de l’ordre nouveau (ouverture des uns aux autres). Brèche ouverte qu’il ne faut pas refermer. La conscience chrétienne de l’histoire du monde est celle de la contradiction que nous vivons encore sous le signe de la Croix. Grâce à la Résurrection, l’affliction et la souffrance, dans ce monde non délivré, peuvent être vécues dans l’assurance de l’espérance qui devient terrestre et universelle.


Peut-être alors notre chemin de carême pourrait nous aider à vivre de cette espérance et à pouvoir fêter en toute lucidité la Résurrection du Christ, gage de celle qui nous attend.

Marc Durand

 

1 – Chemin d’espérance, il ne faut pas nous bercer d’illusions. Si nous adhérons à l’espérance chrétienne, une autre réflexion est nécessaire : comment, très concrètement, incarner cette espérance dans notre vie de tous les jours, au niveau personnel, dans notre entourage, dans nos villes, dans notre pays, dans le monde ? Être le levain dans la pâte est une grande exigence.

Publié dans Réflexions en chemin

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