Il n’y a pas d’alternative à la politique de réformes !
On ne peut qu'être en accord avec la plupart des propos de J.-B. Désert Le “grand débat” : pourquoi pas aussi sur notre blog ? comme avec l'analyse de B. Ginesty, Reconquérir la citoyenneté pour reconstruire l’État.
Je suis néanmoins frappé par le nombre de personnes qui parlent de "changer de politique", de "nouvelle politique", comme si notre petit hexagone, malgré son arrogance à donner des leçons, pouvait prétendre changer le monde de 2019, avec ses 8 milliards d'habitants, sa démographie africaine galopante, ses structures de régulation d'une extrême complexité (même insuffisantes) au sein desquelles des milliards de $ peuvent changer de continent en quelques secondes...
Remettons les pieds sur terre et prenons conscience que c'est à nous de nous adapter à ce monde en rapide évolution, comptant surtout sur nos atouts, tels l'Europe intégrée, voire fédérale, seule capable de parler d'égal à égal avec les super-puissances, qui se font assaut de concurrence.
Les résurgences de tentations de repli sur soi nationaliste de type franquiste, tout comme les idéologies utopiques et fumeuses des XVIIIe-XIXesiècles, ne sont pas d'actualité. Expérimentées au cours du XXe siècle, elles nous ont montré les abîmes dans lesquels elles peuvent entraîner des peuples, engendrant des génocides inédits dans l'histoire de l'Humanité. La dernière tentative en date de type "mélenchoniste" au pays de feu Simon Bolivar, pourtant riche en pétrole, a été un exemple d'un peuple vénézuélien précipité dans la famine en peu de temps. Les communistes russes, chinois, cubains... ont bien compris (presque trop ?). Mais les enfants de M. Thorez et de J.-P. Sartre semblent persister à rêver au "soir du grand jour"...
Les tenants des "Tous pourris", anti-parlementaires, qui veulent faire la loi dans la rue, se sont-ils posés la question "pourquoi" depuis près de 40 ans, Gauche, Droite, Centre, à tour de rôle au pouvoir, avec des sensibilités différentes, ont mené la même politique de réformes afin d'adapter le pays au monde en mutation ?
Si on peut attendre de ce débat national annoncé (s'il ne tourne pas au pugilat) qu'il braque les projecteurs sur quelques injustices par trop flagrantes ou détresses particulièrement urgentes, il devra surtout faire preuve de pédagogie pour rendre évident... qu'il n'y a pas d'alternative à la politique de réformes engagée afin de remettre le pays en marche avant.
S'il faut critiquer les dirigeants de ces dernières décennies, ce n'est pas d'avoir engagé des réformes mais d'avoir été trop lents, trop laxistes, trop lâches, pour n'avoir été plus vite et plus loin, comme certains de nos voisins qui, aujourd'hui, en cueillent les fruits.L'une des fautes majeures fut de céder trop souvent aux pressions diverses, en atténuant les tensions par des mesures sociales à crédit. Cela a abouti par accumulation de déficits budgétaires annuels de 3 à 4 % à une dette publique abyssale, que nos petits-enfants auront à payer et dont l'intérêt annuel absorbe la quasi totalité de l'impôt sur le revenu des Français plutôt que d'aller vers des investissements productifs.
S'il et une proposition que je ferais volontiers dans le débat, c'est celle de rendre obligatoire, dès l'école secondaire, les bases élémentaires de l’Économie politique. Car il est inadmissible que dans un pays civilisé on entende des braillards réclamer à la fois une hausse des salaires et des aides sociales, des retraites, l'amélioration des services publiqs et la qualité des enseignements, ainsi que parallèlement la baisse des impôts et taxes. On est tout de même sidéré que pour beaucoup la culture socio-économique se borne à... Négligeant accessoirement que les grandes fortunes sont immobilisées dans des outils industriels et commerciaux et que, même en cas de confiscation par l'État (emprunts russes ?...) une pluie de pièces d'or ne tombera pas sur le petit peuple. Sinon de remplacer les dirigeants privés par des fonctionnaires.
Je ne suis pas macroniste et je suis bien conscient des maladresses accumulées par le président depuis son élection. Mais je pense qu'il n'y a pas d'alternative à sa stratégie générale. C'est pourquoi je crains que son opposition ne manquera pas de dire que le débat, c'est de la poudre aux yeux.
Les retours nostalgiques vers le passé n'ont pas de sens. Les "Trente Glorieuses" ont connu une croissance rapide et le plein emploi car elles se situaient dans une perspective de semi-pénurie et de reconstruction. Rien avoir avec la surproduction actuelle dans un marché ouvert et une concurrence féroce.Pour les retraites par répartition auxquelles les français tiennent tant, il n'y a pas de commune mesure dans le rapport cotisants / retraités de 1945 et celui d'aujourd'hui... et surtout de demain."Les faits sont têtus" disait un ancien Premier ministre... Quels que soient les dirigeants d'aujourd'hui et de demain, l'équation reste la même et les mathématiques ne souffrent pas d'accommodements.
Une fois encore, la loi ne se fait pas dans la rue et la démocratie, comme disait Winston Churchill... Le referendum d'initiative populaire ne peut avoir de sens que sur des sujets de société : l'enseignement libre, la peine de mort, le mariage pour tous... Demander au peuple d'arbitrer sur des dispositions économiques sur lesquelles les plus grands experts économiques débattent en fonction du bien commun n'a pas de sens.
Pour finir, j'ai envie de dire que quand on parle de pauvreté et de pouvoir d'achat, il faut faire attention à ce qu'on dit. Il faut relativiser en regardant au-delà de l'hexagone. Il faut aller passer quelques jours à Madagascar. La "très grande pauvreté" (moins de 2 $ par jour) qui touchait des centaines de millions d'individus il y a quelques années est en cours de disparition depuis la "mondialisation" qui nous a obligés à partager les richesses avec les plus pauvres. N'est-ce pas ce que l'Eglise et le MCC réclamaient de nous il y a quelques années ?....
Robert Kaufmann