A l'écoute de la Parole de Dieu

Publié le par Garrigues et Sentiers

Fête du Christ-Roi  20/11/2022

2 S 5, 1-3 ; Ps 121 (122) 1-6 ; Col 1, 12-20 ; Lc 23, 35-43

La fête du Christ-Roi est récente. Elle a été instituée le 11 décembre 1925 par l’Encyclique Quas primas du pape Pie XI. Obsédé par la «catastrophe» de la guerre de 14/18, le pape considérait, en une période elle-même très troublée puisqu’elle aboutira à la Seconde guerre mondiale, que «Le retour de la paix chrétienne est impossible hors de […] la paix du Christ par le règne du Christ».

Il nous est difficile, dans notre culture de républicains régicides, de donner à la notion de royaume sa pleine signification, en particulier dans la perspective eschatologique qui était celle du temps de Jésus. Trop d’images d’un dirigeant «tout puissant» (tiens ça ne vous rappelle rien ? ) nous empêchent d’ «imaginer» cette royauté du Christ.

Dans l’Antiquité, à côté de sa fonction politique, le roi a pratiquement toujours et peut-être d’abord un rôle de prêtre, l’intermédiaire avec le divin. Le roi idéal, Melkisédech («roi de justice», Gn 14,18-20), est cité comme «roi-prêtre» par le psaume 110. Parmi les fonctions de l’empereur romain était inscrite celle de «souverain pontife» ; le titre sera repris par les papes à partir de Théodore Ier en 642.

En Israël, David a reçu l’onction royale par les anciens (2 S 5,1-3). Et quand Jésus est présenté, souvent chez Matthieu, comme «fils de David», il hérite par là même du titre de son aïeul, un roi messianique. Mais on sait, par le dialogue de Jésus avec Pilate (Jn 18, 33-37), que son royaume n’est pas de ce monde. Le roi incarné par Jésus est un serviteur et un libérateur, non un potentat écrasant. Il est notable que la «maison du Seigneur», son royaume et notre destination finale, est un lieu de paix et de joie (Ps 121).

L’énumération des titres de gloire de Jésus dans le chapitre 1 de la lettre aux Colossiens, — et il nous revient de méditer le sens de ces titres à fort contenu théologique — fait de lui le tout premier, et à tous les sens du mot, être de l’univers : Image du Dieu invisible, Premier-né de toutes les créatures, Créateur de toutes choses, Tête de l’Église, Premier-né d’entre les morts… il est l’origine et le principe de subsistance de toutes choses : l’Alpha et l’Oméga (Ap 1,8). C’est par le sang de sa croix, donc par lui, que pourra survenir, «sur la terre et dans le ciel», la paix pour tous enfin réconciliés avec Dieu.

Sa royauté, Jésus-Christ la situait tout autre que politique, et ailleurs qu’en Palestine, en contradiction avec ce qu’attendaient les nombreux Juifs qui voulaient le sacrer. Il ne la proclame d’ailleurs pas devant les chefs de Jérusalem, ni aux soldats de garde au Golgotha. Après en avoir concédé, en tête à tête, la réalité au gouverneur Pilate, sur la demande explicite de celui-ci, il en promet les effets à ce brigand crucifié à côté de lui, et qui espérait, par delà le châtiment qu’il acceptait comme mérité, une autre vie après sa mort toute proche. Ce royaume, Jésus le dit, il y sera avec lui dans le paradis. C’est sa confiance, on pourrait parler de sa foi en Jésus, qui a sauvé. le «bon larron»

«Régnant» sur nos vies, Jésus ne nous demande pas une obéissance aveugle, mais l’adhésion de plein cœur au projet divin : vivre l’amour des uns pour les autres et servir nos frère (et sœurs ! comme ont fini par l’admettre les nouveaux textes liturgiques !). C’est beaucoup moins simple que d’exécuter des règles censément dictées par la divinité «toute puissante», car cela exige de l’imagination créative, de l’empathie envers le «prochain», une disponibilité plus grande qu’une obéissance passive. C’est plus difficile, car il faut se donner.


 

Marcel Bernos

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