Un langage nouveau, loin du superflu superficiel
« Et la foule qui était nombreuse, l’écoutait avec plaisir. »
(Marc 12,37)
Jésus arriva à Jérusalem assis sur un ânon, beaucoup de gens l’acclamaient. Est-ce que tous savaient bien le sens de ce qu’ils criaient à tue tête ? On peut en douter. En tous les cas, il y avait de l’enthousiasme dans l’air ! Mais sans doute trop de bruit, de tapage et d’extériorité.
Jésus entra dans le Temple, « inspecta du regard » puis avec ses disciples alla passer la nuit à Béthanie. La nuit porte conseil ! Tout se passe comme s’il prenait le temps de considérer ce qu’il a vu dans la journée.
Le lendemain en revenant au Temple, à partir du figuier qui a beaucoup de feuilles magnifiques mais pas de fruit, Jésus laisse entendre par son comportement et ses paroles que tout ce qui est trompeur ne mérite que de sécher sur pied.
Puis on assiste au grand chambardement. Les vendeurs et les acquéreurs qui polluaient la maison de Dieu par leur trafics sont chassés sans ménagement. Ceux qui instrumentalisent la foi et la transforment en religion à la limite du paganisme n’ont pas leur place dans le « Temple nouveau ». Après ce coup d’éclat, le soir venu, Jésus et ses disciples quittent Jérusalem. Prudence ? Réalisme ? Ce n’est pas encore le « grand moment » on n’en est encore qu’au préalable !
Puis, plus tard, Jésus revient au Temple. Il semble qu’il est chez lui ; ce n’est pas étonnant puisque c’est lui le Temple nouveau. Il occupe l’espace, « il va et vient », il indispose les Chefs des prêtres, les scribes et les anciens. Le trio se sent dépossédé de son pouvoir et décide d’interpeller Jésus « sur l’autorité » qu’il peut avoir pour agir de cette façon. La bande des « trois » se fait boucler le bec. La réponse de Jésus les renvoie à leur peur de la foule. Ils préfèrent ne pas savoir. C’est bien commode de dire « Je ne sais pas » !
Pour confirmer son autorité qui vient de Dieu, Jésus raconte la parabole des « vignerons homicides ». Les responsables qui se sont approprié le Temple et qui se prennent pour des « propriétaires du Lieu Saint » comprennent fort bien qu’ils sont visés. Parce qu’ils sont atteints, ils sont furieux. « Il faut nous débarrasser de l’intrus si nous voulons sauver notre pouvoir ». Ils montent des stratagèmes pour prendre Jésus en faute et le faire condamner :
- Ils envoient les hérodiens et les pharisiens : thème Politique et religion.
- Ils envoient les sadducéens : thème Mariage, tradition et résurrection.
- Ils envoient les scribes : thème Fils de David ou le Messie chef de guerre.
Heureusement, un scribe, intelligent des Écritures et honnête dans son comportement, vient de sa propre initiative dialoguer avec Jésus. Ils parlent ensemble de l’essentiel de la foi en Dieu et du profil du Royaume de Dieu qui n’a rien à voir avec un Messie guerrier qui imposerait des lois et des préceptes et restaurerait une théocratie toute puissante.
Avec attention, il faut refaire ce parcours de Jésus au Temple de Jérusalem pour comprendre le plaisir de la foule à écouter un « enseignement nouveau » qui…
- met au large,
- s’adresse à la responsabilité d’un acte de foi personnel et d’une décision libre,
- invite à un Royaume intérieur unifié par la relation d’amour avec un Dieu unique,
- marche vers l’essentiel,
- préconise une altérité entre les humains basée sur le pardon, la simplicité et l’offrande.
Ce n’est donc pas un hasard si le douzième chapitre de l’Évangile de Marc se termine par le regard que Jésus porte sur une pauvre veuve qui s’avance et dépose deux piécettes dans le tronc des aumônes.
« Cette femme a donné tout ce qu’elle avait pour vivre ». Elle a puisé dans son indigence c'est-à-dire dans le fin fond de son « petit reste », là où il n’y a pas de superflu (de superficiel), là où tout est vital…
Christian Montfalcon