Poetry
de Lee Chang Dong (Corée du Sud)
Prix du scénario au Festival de Cannes
Le film bouleversant Des hommes et des dieux, Grand Prix du Jury et Prix du Jury Œcuménique au Festival de Cannes, rencontre un grand succès depuis sa sortie sur les écrans le 8 septembre (cf. Église de Marseille en septembre). C’est qu’au-delà de la vie des moines de Tibhirine, au-delà de ses grandes qualités cinématographiques, ce film réveille dans le cœur des spectateurs des questions fondamentales que tout être humain rencontre un jour : qu’est-ce qui au fond donne sens à ma vie ? y a-t-il des valeurs qui méritent de se dépasser soi-même ? peut-on trouver la paix intérieure ?
Le cinéma peut décidément être une école d’intériorité, de spiritualité. Regarder des images peut entraîner bien au-delà des images, vers l’invisible, vers la dignité morale.
On peut le voir aussi dans cet autre très beau film, réalisé par un cinéaste coréen qui fut en 2003 ministre de la culture de son pays. Une charmante vieille dame, arrivée à 65 ans mais toujours coquette, souhaite découvrir la poésie, cette alchimie mystérieuse où les mots donnent accès aux secrets du monde. Mais elle est affrontée aux premiers symptômes de la maladie d’Alzheimer, et, plus grave encore : son petit-fils de 15 ans, qui vit chez elle, garnement qui ne songe qu’à regarder la télé, est compromis avec plusieurs copains de classe dans le viol d’une jeune fille qui s’est ensuite suicidée. Comment réagir quand les problèmes s’accumulent ?
Comme dans le film de Xavier Beauvois, c’est un itinéraire de vie vers la dignité qui nous est proposé. Le monde est dominé par le cynisme, par l’argent, par la lâcheté ? La vieille dame est affrontée à toutes ces compromissions, elle n’est pas idéalisée, mais elle cherche à trouver son propre chemin. Le cinéaste nous donne quelques scènes d’une grande intensité, dans des paysages et des cadrages magnifiques. Dans ce monde souvent violent, on ne peut effacer les drames, mais la dignité personnelle et la poésie, symboliquement, peuvent avoir le dernier mot.
Jacques Lefur