Pape François : « Je me méfie de l'aumône qui ne coûte rien »
Le pape publie ce mardi 4 février 2014 son message pour le carême (qui débutera le 5 mars avec le mercredi des Cendres pour s'achever à Pâques le 20 avril). L'occasion pour lui de réaffirmer certains de ses thèmes-phares, de l'attention à toutes les formes de misère humaine à l'importance d'annoncer l'Évangile.
S'inspirant d'une phrase tirée de la deuxième lettre de saint Paul aux Corinthiens (8,9) : « Vous connaissez en effet la générosité de notre Seigneur Jésus Christ : lui qui est riche, il est devenu pauvre à cause de vous, pour que vous deveniez riches par sa pauvreté », François développe une méditation sur la nécessité pour les chrétiens de rester attentifs à toutes les pauvretés humaines, à l'exemple du Christ lui-même.
La pauvreté, voie choisie par Dieu
« Dieu ne se révèle pas par les moyens de la puissance et de la richesse du monde, mais par ceux de la faiblesse et la pauvreté », écrit ainsi le pape, avant d'expliquer le paradoxe au cœur de l'idée de « s'enrichir par la pauvreté » :« Il ne s’agit pas d’un jeu de mots, ni d’une figure de style ! Il s’agit au contraire d’une synthèse de la logique de Dieu, de la logique de l’amour, de la logique de l’Incarnation et de la Croix. »
Dieu, explique François, « n’a pas fait tomber sur nous le salut depuis le haut » mais est descendu « au milieu des gens, de ceux qui ont besoin du pardon », « pour nous consoler, pour nous sauver, pour nous libérer de notre misère ».
La mission d'une Église pauvre
Ce rappel est l'occasion pour le pape de redéfinir l'idée de pauvreté, dans un sens très large : « Il n’y a qu’une seule vraie misère, c’est celle de ne pas vivre en enfants de Dieu et en frères du Christ. » Et cette misère peut trouver une réponse dans l'Église, à travers la « pauvreté personnelle et communautaire » des chrétiens : « Dieu continue à sauver les hommes et le monde grâce à la pauvreté du Christ, qui s’est fait pauvre dans les Sacrements, dans la Parole, et dans son Église, qui est un peuple de pauvres. »
Misère matérielle, morale et spirituelle
Concrètement, les chrétiens sont invités à soulager tous ceux qui souffrent, en prenant en compte trois types de misères, qui parfois se recoupent : « la misère matérielle, la misère morale et la misère spirituelle ».
La misère matérielle, explique ainsi François, est « celle qui est appelée communément pauvreté et qui frappe tous ceux qui vivent dans une situation contraire à la dignité de la personne humaine ». Les chrétiens sont donc appelés à la soulager concrètement et à « soigner ces plaies qui enlaidissent le visage de l’humanité ».
Seconde forme de pauvreté, la misère morale « consiste à se rendre esclave du vice et du péché ». Le pape inclut dans cette catégorie à la fois ceux qui sont « dépendants de l’alcool, de la drogue, du jeu, de la pornographie », mais aussi ceux qui « perdu toute espérance », souvent « à cause de conditions sociales injustes ».« Dans ces cas, ajoute François, la misère morale peut bien s’appeler début de suicide. »
Enfin, la misère spirituelle, qui frappe « lorsque nous nous éloignons de Dieu et refusons son amour (...) car nous pensons nous suffire à nous-mêmes ». Cette pauvreté-là, celle du refus de Dieu, non moins grave pour le pape, devient alors « la voie de l’échec », dont « l'antidote véritable » est l'Évangile.
Appel pour le carême
Le message s'achève sur un appel au « dépouillement » durant la période du carême, période traditionnelle de conversion, de jeûne et de prière pour les chrétiens. Cette invitation est assortie d'une mise en garde contre les habitudes ou les facilités : « N’oublions pas que la vraie pauvreté fait mal : un dépouillement sans cette dimension pénitentielle ne vaudrait pas grand chose. Je me méfie de l’aumône qui ne coûte rien et qui ne fait pas mal. »
Aymeric Christensen
pour lavie.fr