Ouailles, ne soyez pas des canards !
Dans une infinie tristesse comme devant une catastrophe,
Jésus dit « Ma parole n’a pas de prise sur vous » (Jean
8,37)
La Parole peut glisser sur chacun des humains sans rejoindre son cœur, son intelligence, sa conscience, elle glisse…
Elle coule à la superficie, comme si elle mouillait l’extérieur sans mouiller le fond de l’être ! Elle ruisselle et ne pénètre pas… Elle se perd.
On peut même la « dire », voire « l’enseigner »…
sans se l'adresser à soi même,
sans en profiter pour sa propre nourriture et gouverne,
sans la digérer pour qu’elle devienne » force pour l’action,
sans en vivre comme un bonheur,
sans l’offrir gratuitement comme un cadeau d’amour vis-à-vis d’un proche…
La Parole peut devenir super-flue, c'est-à-dire couler comme l'eau sur les plumes d'un canard.
Il faut désirer La Parole (le Verbe de Dieu), s’y ouvrir, pour qu'elle pénètre jusqu'à l'intime de soi même.
Peut-elle entrer si l’invité « aux noces de l’Esprit » ne la déglutit pas personnellement avec un appétit certain (voire une gourmandise) lors du repas où se rassemblent les convives de la foi ?
La Parole peut-elle entrer en quelqu’un qui n’a pas faim, qui fait semblant de la goûter du bout des lèvres ? Se mettre avec appétit à la « Table de la Parole » ne s’improvise pas. Il faut marcher et se fatiguer pour avoir faim.
La Parole peut-elle nourrir une assemblée si elle n’est pas « servie » et « offerte », accommodée d’une « sauce » digeste et appétissante ? Elle a besoin d’être cuisinée pour être proposée. Le prédicateur ou la prédicatrice doit mijoter en lui (ou en elle) ce qu’il présente en fait de plat spirituel roboratif ! La Parole ne se jette pas en pâture, elle se confie à un peuple comme un vin de grand prix, un précieux trésor.
La Parole peut-elle être désirée si nous avons la nausée parce que nous sommes trop pleins de nous-mêmes (coufles disaient les anciens paysans des Monts du Lyonnais) ou ‘bourrés’ de mets indigestes qui nous pèsent sur l'estomac ?
Peut-elle même, entrer en nous si nous ne reconnaissons pas le besoin de nous fortifier
- pour que nos plaies guérissent,
- pour que notre marche brave la fatigue,
- pour garder joyeusement la fidélité ?
Si la Parole a une prise sur nous, nous le saurons, car elle nous rejoindra là ou nous avons notre mal douloureux et nous apaisera par une paix intérieure.
La Parole qui ‘glisse’ n'a qu'un effet superficiel, la Parole qui pénètre à un effet thérapeutique peut-être lent mais efficace (un traitement de fond) ; sur le moment elle dérange, mais elle guérit et donne force pour la liberté de conduire durablement sa propre vie au milieu d'autres qui ne savent rien de notre relation à « l'eau-de-Source qui rend source » c'est-à-dire au baptême.
Christian Montfalcon