Mimi Coulange
Fraîche, souriante, à 80 ans passés, Marie-Madeleine Coulange – pardon, Mimi Coulange, elle préfère – continue de faire des permanences à l’Union locale CFDT qu’elle a longtemps présidée. Ancienne prud’homme, membre de l’Action catholique ouvrière, elle participe au soutien scolaire avec l’Asti, aide aux réfugiés demandeurs d’asile, milite au syndicat des retraités, s’occupe de personnes seules ; bref, c’est une dame très occupée.
Elle est aussi témoin d’une activité aujourd’hui disparue à Martigues : les conserveries et salaisons. Durant vingt ans, elle y a mené une difficile bataille syndicale. Situés sur l’actuel quai Doumer, au lieu qu’occupent à présent les Affaires maritimes, les établissements Volpati conditionnaient des anchois depuis 1933. L’usine de Julien Volpati employait de 20 à 30 personnes, des femmes pour l’essentiel. Mimi y entre en 1960, comme ouvrière, et constate la dureté des conditions de travail : « On n’avait pas de chauffage, pas de blouses, pas de gants. On descendait avec des seaux, le matin, et on puisait les poissons dans des barriques. Il fallait monter ces seaux de 10 kg au premier étage. On lavait les anchois, on en faisait des gros tas devant nous ; ensuite on remplissait des verres, des chopes, des bocaux qu’on capsulait, lavait, étiquetait et qu’on emballait. Tout ça à la main. »
Question de dignité
Pas de vestiaires fermés, pas de toilettes séparées des hommes, des sièges inconfortables et la main de fer de Monsieur Volpati… Alors en 1963, avec quelques
ouvrières, Mimi crée une section syndicale CFDT. À partir de là, elles vont obtenir des améliorations (ascenseur,
chauffage, machines pour laver le poisson – iil faudra des années pour qu’elles puissent avoir des gants !) : « Il a fallu faire grève pour qu’il sache de quoi on était
capable. Un jour, une ouvrière a eu une mise à pied parce qu’elle avait mal fermé le robinet de vinaigre. On a dit au patron : “Allez la chercher sinon on s’arrête toutes !” Il a
cédé. » Il faudra des années pour obtenir l’application d’une convention collective. Lorsqu’il y a un litige, on appelle Mimi. En 1981, la société Volpati, en difficulté suite à un
redéploiement, ferme ses portes, après six mois de lutte du personnel. Mimi n’a plus que deux ans avant de prendre sa retraite. Retraite n’est pas le mot : fidèle à ses idées, elle
continue de faire ce qu’elle peut pour aider. « Mon engagement a créé des liens d’amitié, de fraternité, des relations qui sont indispensables pour donner un sens à ma
vie. »