Le Bedeau de Saint-Pancrace

Publié le par G&S

 Une histoire inspirée de Somerset Maugham

L’histoire se passe à Londres, à la fin du XIXe siècle, en l’église Saint-Pancrace.

Il advient soudain que l’évêque décrète un jour que tous les bedeaux doivent savoir lire et écrire.

Or le bedeau de Saint-Pancrace est totalement analphabète.

Cela ne le gêne guère, d’ailleurs, pour remplir sa fonction : ranger les chaises, sonner les cloches, nettoyer la sacristie…

Mais les décisions épiscopales ne sont pas contestables, et le curé doit s’exécuter : il est obligé de se séparer de son bedeau.

En guise d’indemnité de licenciement (osons l’anachronisme !), il lui octroie une poignée de pièces d’or. C’est certes une belle somme, mais combien de temps pourra-t-il vivre avec ?

Le voilà donc qui descend tristement les marches du parvis, la main serrant la bourse remplie de la générosité de son ancien patron.

Il pousse la porte d’une échoppe (imaginez-la, elle fait deux mètres de large, coincée entre deux grands immeubles, dans la brume londonienne….) pour acheter des cigarettes.

Il se ravise, une seule cigarette, car il n’a pas les moyens de faire des folies.

En fumant, il discute avec le buraliste, qui lui confie tout à coup : «  J’en ai assez de ce métier ! Si quelqu’un me proposait ne serait-ce qu’une poignée de pièces d’or, je lui vendrais sans hésiter mon commerce. »

L’affaire est conclue sur le champ… Et le bedeau fait prospérer la boutique au point que quelques années plus tard il réussit à acheter une autre affaire, puis une autre, une autre encore… et devient une sommité dans son quartier.

Il peut même doter sa fille, qui fait un grand et beau mariage.

Le voilà, désormais riche à millions, qui vient déposer un grosse liasse de gros billets à sa banque.

L’employé lui tend obséquieusement le bordereau pour qu’il le signe… Mais l’homme riche dessine une simple croix.

- « Vous devez signer ! » insiste le jeune homme.

- « Mais je ne peux pas ! Je ne sais ni lire ni écrire ! »

- « Ça alors ! s’exclame  l’employé, vous êtes un homme considérable, dans notre quartier ! Qu’est-ce que ce serait si vous saviez lire et écrire ! »

- « Si je savais lire et écrire… répond alors le bedeau devenu riche, je serais bedeau, à Saint Pancrace ! »

Gardons l’espérance, le pire n’est jamais sûr ...et une rencontre peut changer notre vie...

Publié dans Fioretti

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