De retour à la maison
Dans notre paroisse, deux petits anges ont la bougeotte. Depuis juillet 2012, régulièrement, grâce à leurs petites ailes spécialement créées pour faciliter leur déplacement, ils vont et viennent dans l'église au gré de l'inspiration de notre curé et néanmoins artiste.
Grâce à lui, ils jouent le rôle qui leur est dévolu : devenir des messagers de la Bonne Nouvelle de notre Dieu dont le seul désir est que le rideau du Temple se déchire, que ciel et terre s'unissent pour chanter sa gloire. Oh ! une gloire souvent bien cachée dans la fragilité d'un nouveau né, le corps torturé d'un supplicié, la main tendue d'un mendiant, la face douloureuse d'un malade ou le regard consterné d'un prisonnier. Et cependant, qu'elle est grande la gloire de notre Dieu qui hier, aujourd'hui et toujours sait si bien s'enfouir dans la pâte humaine !
Nos angelots donc, après s'être arrêtés quelques mois auprès du tabernacle pour louer Dieu bien présent dans sa demeure, firent halte auprès de la Vierge, cette toute jeune femme qui osa son oui pour que le Dieu d'Israël puisse visiter son peuple et le libérer, chercher la terre pour la conduire au ciel.
En cette troisième semaine de l'Avent, me voilà donc admirant la crèche tout nouvellement installée au pied de l'autel. Ils sont tous là, Marie et Joseph, le bœuf et l'âne, les bergers encore éloignés gardant leur troupeau et la paille toute fraîche dans l'attente de l'emmailloté qui sera bientôt déposé dans la mangeoire (Luc 2,7).
Relevant la tête, je retrouve nos chérubins, les joues rebondies et le regard toujours aussi espiègle. Ils sont de retour à leur place traditionnelle, prêts pour la représentation du grand soir pour chanter avec la troupe céleste Gloria in excelsis Deo.
Luc n'avait sans doute pas les registres de police de Bethléem pour l'affirmer, mais il a trouvé juste et bon de placer dans une mangeoire celui qui durant toute notre vie de croyant sera notre nourriture.
Tout comme l'évangéliste, notre curé – inspiré sans doute – trouve juste et bon en ce jour de nous le rappeler en plaçant nos deux angelots comme suspendus entre ciel et terre, à peine posés sur l'autel sur lequel repose l'ostensoir faiblement éclairé.
Et mon regard d'aller et venir entre la mangeoire vide et la Présence sur l'autel pendant que résonnent en moi « ceci est mon corps donné pour vous, faites ceci en mémoire de moi » (Luc 22,19).
Je relève mes yeux qui se posent alors sur la croix surplombant l'autel. M'est donné de comprendre jusqu'où peut aller le don parfait, le par-don toujours en attente, prêt à accueillir dans ses bras l'Homme dont Il s'est rendu à tout jamais dépendant. Au refus de l'aubergiste signé par la mangeoire et au procès des hommes signé par la croix, répond ce Corps aimant, offert et donné sur l'autel.
Quand les bergers arrivèrent à Bethléem, ils découvrirent l'enfant-Dieu couché dans une mangeoire déjà tout prêt à s'offrir aux petits, aux humbles, aux simples de cœur. C'est alors que l'humanité s'incline pour la première fois devant ce petit corps déposé dans la paille – nourriture et chaleur pour les bêtes – jusqu'à devenir ce Corps déposé aujourd'hui sur l'autel, véritable nourriture donnant la vie.
Grâce à l'épi de blé donnant à la fois paille et froment, le Verbe a habité parmi nous et habite encore et toujours jusqu'à la fin des temps.
Le geste d'une mère pauvre désirant offrir à son enfant la chaleur de la paille devient le signe de reconnaissance pour les bergers : « vous trouverez un enfant, un nouveau-né, déposé dans une mangeoire ».
Comme c'est étrange ce signe pour les bergers, ce signe pour tout homme, ce signe pour moi ce matin en cette église de Montety.
Je suis à Bethléem, dans la maison du pain, avec Jésus déposé sur l'autel comme il le fut dans la mangeoire. Lui la vraie nourriture venue pour nous donner Sa vie.
Ensemble, allons à la mangeoire, c'est là que se célèbre dans la pauvreté le grand festin des noces de l'humanité.
Recevons son pain eucharistié qui fera de nous des anges-de l'ordinaire car c'est par ce don de Lui-même que, dans la foi, le Ressuscité se met chaque jour au monde.
Chantons à l'unisson des chérubins revenus à la maison du pain : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur terre aux hommes qu'Il aime » !
Joyeux Noël !!!!
Nathalie Gadéa