La foi du célébrant

Publié le par G&S

Ce qui fait la beauté de la liturgie, c’est la foi du célébrant au sein d’un peuple qui cherche Dieu. Elle ne remplace ni la discrétion des gestes, ni l’art floral, ni la juste proportion entre le silence et la parole, ni l’esthétique du lieu, ni le langage des symboles, ni l’adaptation et la justesse des chants… mais elle donne une âme à tous ces éléments en les dépassant tous. Elle crée une véritable symbiose entre l’attente du peuple et le don de Dieu.

Quand je parle de « la foi du célébrant » je n’évoque pas seulement l’intensité de sa relation intime avec le Christ ou son Père, car laïc, prêtre ou diacre dans une action liturgique reste toujours l’imparfait qu’il est dans la vie courante, mais je désire souligner l’humble simplicité de celui qui doit conduire la prière.

Il ne sait pas d’avance, il se livre et s’en remet au Seigneur qui bénit, console, pardonne ou appelle. Son désir de conversion personnelle habite sa présence. Désarmé, sans artifice, il se livre à Dieu et au peuple pour une mission qui lui est confiée et le dépasse. Il est pauvre, rien ne lui appartient, sinon de posséder ce qui lui échappe. Il donne ce qu’il ne possède pas et reçoit ce qu’il ose espérer car « la foi du célébrant » est une Espérance de Résurrection.

Que la célébration soit domestique, paroissiale, abbatiale, qu’elle se passe à la cathédrale ou au palais des sports, qu’elle rassemble des milliers ou une poignée de chrétiens, c’est toujours une rencontre incontrôlée entre l’invisible, incernable par nature, et la vie d’un peuple très concret, incarné dans une culture bien précise.

Dans le vide vertigineux entre l’incréé et la création, le célébrant, modeste créature, ose se tenir à sa place parce que la foi, la mission, (et l’ordination s’il est prêtre ou diacre) l’y appellent pour la véritable constitution d’un rassemblement qui devient Église par la force de l’Esprit et l’offrande collective.

Le célébrant croyant a toujours peur car il se tient « seul » au milieu des autres ; il peut se rassurer en écrivant des mots et des phrases sur un papier, mais plus il aura la foi plus la « crainte » de Dieu le saisira et le dépouillera.

« Traduit » devant un petit ou un grand public, il ne lui reste que l’Esprit Saint pour prononcer ce qu’il ne sait pas même s’il l’a appris par cœur. Bien loin d’être insouciant ou de faire fi des ressources mises à sa disposition par les sciences humaines, il prépare d’autant plus une célébration qu’il « croit » que le Seigneur l’improvise et que le Christ est le seul vrai liturge.

L’attitude de son corps, le moindre geste de ses mains, l’ardeur de son regard ne se calculent pas : il est là, désarticulé pour donner corps à celui qui entre au Cénacle fenêtres et portes fermées et se tient au milieu des disciples.

Le célébrant, ordonné ou non, ne fonctionne pas : s’il lit le livre des Écritures c’est qu’il raffole de la Parole ! S’il proclame une prière c’est qu’il prie lui-même ! S’il exhorte c’est que lui aussi s’efforce de se convertir !

Les rites, les symboles et les signes convenus par la tradition et la modernité le contraignent et l’empêchent d’être un électron libre, mais sa foi donne une nouveauté sans pareille à ce qui est usité.

Pauvre célébrant, il ne trouve sa sécurité que dans la foi ; indigent, il vient, célèbre et repart comme un mendiant de Dieu solidaire du peuple où il a pris naissance. Ordonné ou non le célébrant entre dans la grâce de la pauvreté… c’est ce qui l’encourage à rendre fréquemment ce service.

Christian Montfalcon

Publié dans Réflexions en chemin

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P
<br /> Le célébrant je veux bien. L'émotion, la relation à l'invisible, la communion avec l'assemblée, la prière et les cantiques oui....... Oui! Cent fois oui. Mais l'essentiel est-i là?<br /> <br /> <br /> Un enfant est assassiné par notre économie toutes les six minutes, les riches jouent avec le prix des céréales et des armes, la moitié de la planète se sert de Dieu pour conquérir ou garder<br /> un pouvoir le pouvoir, les religions le cachent sous le sacré....<br /> <br /> <br /> Alors oui, la mystique, les mystiques, l'émotion , l'exaltation, oui, il en faut. Mais il faut aussi en sortir pour vivre, combattre et mourir en pauvres, comme Jésus.<br />
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A
<br /> Magnifique texte, en effet, qui resitue la fonction première du célébrant (actuellement le prêtre) au milieu d'un peuple rassemblé, qui peut devenir une<br /> parcelle d'Église. Il donne aussi sens à la liturgie au delà des ors et des oripeaux, au delà de " cérémonies spectaculaires ", pour en faire une rencontre avec l'indicible, un tête à tête avec<br /> l'invisible. Et l'expérience nous fait bien différencier le célébrant "qui y croit", qui se livre, le " mendiant de Dieu " (j'aime beaucoup cette expression de Montfalcon), et tel autre, simple<br /> "fonctionnaire de Dieu", qui fait honnêtement son job en expédiant une série de gestes et de paroles qui ne prennent pas sens pour les participants.<br />
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D
<br /> Qui est le "célébrant" ? Il me semble que c'est l'assemblée qui est "célébrante" et qu'un "ministre" préside cette assemblée...<br /> <br /> <br /> Un ministre ordonné préside une célébration alors qu'un laïc la conduit ...(même s'il font exactement la même chose, lors des obsèques par<br /> exemple !)<br /> <br /> <br /> Je chipote, mais hormis ces précisions de vocabulaire je suis bien d'accord avec cet article.<br /> <br /> <br /> Pauvres présidents, pauvres conducteurs, quelle responsabilité de se trouver seul, face et avec  l'assemblée célébrante!!!<br />
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