La bonté face aux critiques
Nous vivons sur une terre de complexité, de nuée, d’imprécision, de lutte, de combat, d’opposition, voire de méchanceté. Non pas d’un côté le bien et de l’autre le mal, tout est mêlé dans l’essentiel, chez les vivants comme dans les institutions. Oui chez les humains tout peut exister, à la fois le somptueux et le sordide…
Chacun cherche en principe la solution la meilleure pour que tous vivent heureux et libres dans une société jamais achevée et sans cesse à construire. Les solutions sont multiples. Chacune porte vraisemblablement sa part de vérité et sa part d’errements. Ceux et celles qui les proposent sont aussi des imparfaits géniaux et « crasseux ». Nul ne peut dire sans être menteur : « Je sais tout, je vois tout, j’ai raison sur tout, je suis infaillible, car seul ce que je prévois est à la fois juste et vrai et s’impose pour toujours ! »
Et pourtant certains, par une sorte d’inconscience, le laissent entendre et sont prêts à imposer leur point de vue pour satisfaire leur besoin de puissance. Ils n’ont pas compris leur limite et leur besoin de collaborateurs pour approcher la vérité.
Chacun fait tout ce qu’il peut, mais nul, à lui seul, n’approche dans son pèlerinage terrestre vérité, justice, paix, liberté…
Nul ne maîtrise à lui seul l’avenir et le bonheur humains.
Nul, s’il est tant soit peu « normal », ne peut imposer ses perspectives par la force, sans la discussion.
Nul ne construit de l’humain sans la négociation, sans la recherche, sans l’établissement d’un consensus provisoire pour vivre au mieux ensemble et pendant le temps de maintenant préparer l’avenir.
Ainsi, d’étapes en étapes plus ou moins longues, plus ou moins heureuses, plus ou moins fécondes s’édifiera l’histoire des hommes et des femmes à quelque région ou culture qu’ils appartiennent.
La promotion personnelle et à la fois collective est toujours issue de relations, de négociations, de décisions, excluant la loi du plus fort. Ainsi s’exprime la règle humaine… À bas les luttes fratricides et les dominations religieuses. Paix dans les cœurs, les intelligences. Paix entre les humains. Paix entre les humains et la nature.
C’est à mon avis là que la BONTÉ apparaît capitale, primordiale, essentielle…
La bonté non seulement écoute mais tend l’oreille, l’intelligence et le cœur pour déceler la part de vérité, de bon « sens », d’opportunité, de désintéressement, d’offrande inscrite dans l’histoire Ainsi elle se nourrit du positif qui existe aussi bien en soi que chez ses partenaires, que chez ses adversaires.
La bonté lucide n’exerce sa magistrature suprême que dans l’humilité, le respect, voire l’indigence qui accueillent les autres, les sociétés, les instituions dans tout ce qui fait leur force et leur faiblesse.
La bonté, vive et pas sommeillante, souffre des insuffisances d’autrui ; mais, en choisissant la « confiance » malgré tout, elle désarme les agressions, la perversité,
La bonté déniaisée et armée de patience ouvre celui qui cherche noise au changement ; elle lui permet de se décramponner de ses vues trop étroites.
La bonté garde la juste mesure et n’entreprend pas plus qu’elle ne peut, mais autant qu’elle peut ; elle se maintient dans la persévérance. Ses racines vont jusqu’à la Source qui l’empêche de sécher. La bonté dure sans se flétrir ni se décourager, en cela elle dit Dieu.
La bonté choisie comme axe personnel de vie n’empêche pas de souffrir du « mélange », de « l’écart », des « conflits », des « peurs », des « séismes », des « étrangetés incontrôlées », des « guerres », que nous portons tous en nous-mêmes ou qui nous assaillent en venant de ceux et de celles qui nous entourent… Elle ne s’en étonne pas… elle va …traverse…
La bonté au sein de la dérision humaine apporte un souffle embaumé d’éternité, une option, un acharnement amoureux, un soupçon de lumière, un grain de sel, une poignée de levain pour introduire un presque rien de paix, de vérité et tendre ainsi à épanouir à l’entour la vie des personnes et des groupes.
La bonté n’a pas d’abord besoin d’appareil, elle ne se codifie pas dans un système, elle le transcende en simplifiant les relations.
La bonté ne cherche pas sa promotion, elle aime ; en elle pas de méfiance mais seulement de la confiance. Elle se fie, se fiance, propose alliance et soutient pour faire réussir autrui, parce qu’autrui est précieux pour elle. Sa finalité : se déranger d’un parcours individuel prévu et de « bon aloi », prendre soin, trouver des collaborateurs pour que la guérison advienne, déléguer, payer le prix, offrir ses propres moyens et s’assurer que ce qui est commencé va jusqu’au bout. Bonté et Fidélité…
La bonté désarme les oppositions, parce qu’elle combat les mains nues et ne blesse personne, parce que non seulement elle trouve positifs les affrontements mais elle sait s’en réjouir car pour elle ils offrent toujours un aspect de vérité. Les coups qu’elle reçoit l’atteignent et la font souffrir mais ils appellent le pardon bienveillant qui sauve les malveillant. Si les « critiques permettent une amélioration, elle rend grâce ; si elles n’ont pour but que de blesser, elle dit avec le Christ : « Père pardonne leur, ils ne savent pas… »
La bonté n’a que faire des flatteries, des honneurs, des récompenses, des premières places : elle les redoute comme des pièges
La bonté restitue à Dieu ce qui lui revient et ne garde rien pour elle que ce qui peut transfigurer l’homme.
Christian Montfalcon