Il y a des saints dont il faut se méfier !
Il y a de cela exactement 50 ans. J’allais sur mes vingt ans. C’était environ deux ans avant le concile Vatican II.
Je travaillais comme auxiliaire au Central Téléphonique de Marseille et je venais de réussir le concours des Postes.
Un soir, en sortant du travail, une collègue me dit : « Viens avec moi, je veux passer à l’église Saint-Cannat ». Celle-ci se trouvait juste à côté de notre lieu de travail.
Comme je ne suis pas pressée, je la suis. Nous entrons dans l’église et ma collègue se dirige tout droit vers la statue de Saint-Expédit, un saint que je ne connaissais pas du tout. Là, elle allume un cierge et commence une courte prière. Un peu pour lui démontrer que moi aussi je suis croyante, j’allume, à mon tour, un cierge et nous sortons.
Le lendemain, je reçois ma nomination pour Paris.
Alors, j’attrape la collègue en question et je lui dis : « Ton Saint-Expédit vient de m’expédier à Paris ». Et je me dis : « On ne m’y reprendra plus de mettre des cierges à des saints dont j’ignore la fonction et de plus quand la fonction est si importante ! »
Depuis, quand je raconte mon histoire, je provoque l’hilarité générale et je signale, à toutes fins utiles, qu’il y a des saints dont il faut se méfier.
Mais, tout compte fait cette « expédition non vraiment désirée » m’a permis de connaître la capitale, de découvrir et de m’intéresser aux arts : à la peinture, au théâtre, aux meilleurs récitals de la chanson française de l’époque du début des années 60, bref à tout ce qui fait notre culture et dont je ne pouvais pas jusque-là m’offrir l’accès.
Alors, les saints ne nous réservent pas que des mauvaises surprises même ceux que nous ne connaissons pas et auxquels nous faisons une bonne manière.
Christiane Guès