Entrer en conjugaison avec le Verbe
Le Christ invite ceux qui ploient sous le poids du fardeau à s’approcher de lui. Il désire non seulement les soulager mais leur procurer le repos. Jésus propose une méthode apparemment étrange : « Prenez sur vous mon joug, devenez mes disciples car je suis doux et humble de cœur et vous trouverez le repos ». (Matthieu 11,29)
En somme le Christ invite à “co-laborer” avec lui en tirant la même charrue, au même pas, dans même un effort concret et soutenu. Il s’agit d’accomplir le travail confié par le Père : labourer la terre des hommes, pour que Dieu l’ensemence et que germe une moisson d’Espérance. Aller jusqu’au bout du champ dans une perspective d’amour et de fidélité.
Un joug a généralement deux places. Le laboureur attelle les bœufs, il les lie ensemble pour qu’un même attelage et une seule force tracent dans la lenteur et la persévérance les sillons de l’ensemble du labour. Le soc ouvre et retourne la terre : ouvrir et retourner, les deux verbes du salut et de la conversion.
À ceux qui peinent, le Christ suggère de le rejoindre et de prendre place à côté de lui, unis sous le même joug pour défoncer les jachères : « Venez à moi, conjuguez vous à moi, mon travail sera le vôtre et le vôtre sera le mien ». Le Seigneur de Gloire, le tâcheron de la misère ne connaît qu’une solution pour ceux qui sont inquiets (sans repos) : entrer avec lui dans la démarche paisible qui retourne le monde de la violence. La peine se dissipe si on entre dans le grand dessein d’amour, si l’on devient disciple partageant la vie du Maître.
Entrer en conjugaison avec le Verbe revient à trouver sens à tous les temps, à toutes les personnes et à tous les modes de l’action. Jésus ne console ses amis qu’en les associant à sa propre vie. Pas de propos émollient mais un appel insistant : « Je t’ai entendu, j’ai compris ta peine, je t’offre mon propre statut, ta guérison se trouve dans le fait d’être attelé à ma propre mission ».
Quand le chagrin ou la consomption trouble la vie,
quand le vertige de la solitude risque de nuire à l’équilibre spirituel, il est important de se souvenir qu’il y a toujours une place disponible sous le joug du Messie pour le parcours de l’Incarnation.
quand l’attelage traverse l’étendue du monde complexe, en quête de sens,
quand l’homme et le Christ sont conjugués dans la simple mission de tous les jours,
alors se produit un apaisement et la force d’aller jusqu’au bout est donnée.
Le repos surgit de l’effort chrétien, il est au début, au milieu et au bout du lopin de terre dont nous avons hérité en même temps que de la grâce de notre baptême – côte-à-côte avec le Seigneur – pour vivre avec lui l’amour du monde à emblaver.
Oui, se laisser lier au Christ par le Maître de la Moisson et se conjuguer à Jésus conduisent à une Paix véritable et à une fécondité sans pareil.
Christian Montfalcon