Confessions d’un astrophysicien
Trinh XuanThuan,Le Cosmos et le Lotus
Albin
Michel, 2011, 266 p., 19 €
Si le lotus du titre annonce une réflexion bouddhiste, le sous-titre inscrit le nouvel ouvrage de TXT dans la lignée de saint Augustin.
Et, de fait, pour la première fois, le savant parle de lui, de sa vie, de son parcours intellectuel et spirituel. Avec une simplicité et une clarté admirables.
Il est né à Hanoï en 1948, dans une famille aisée, et sa vie, fortement marquée par les vicissitudes de son pays, se déroule à la confluence de trois cultures : une éducation à la française dans le Tonkin colonial, qui lui donne le goût de la littérature et de la poésie ; une culture confucéenne héritée d’une famille de lettrés et de mandarins, qui l’initie à la sagesse orientale ; un parcours scientifique remarquable aux États-Unis où il est devenu, après de brillantes études universitaires, un astrophysicien célèbre.
Chemin faisant, nous revivons avec lui plus d’un demi-siècle d’histoire mondiale, sur fond de guerres et de familles éclatées ou persécutées (son père a connu sous le régime communiste les horreurs d’un camp de rééducation). Mais naturellement l’essentiel du parcours est d’ordre scientifique : nous suivons avec lui les découvertes les plus récentes sur le cosmos grâce aux observations que permettent les télescopes géants sur terre et dans l’espace. Observations solidement étayées par les apports de la physique quantique et la théorie de la relativité.
Avec le talent exceptionnel qu’on lui connaît pour la vulgarisation, il expose les questions les plus difficiles dans un langage non rébarbatif, donnant ainsi à ses lecteurs, même les moins avertis, le sentiment de tout comprendre : le big bang, la formation des galaxies, les quasars, les pulsars, les trous noirs… bref, l’étrange bestiaire de l’astrophysique ! Et il le fait avec passion : ce découvreur de galaxies ne se lasse jamais d’admirer la beauté du cosmos dont il sait aussi parler en poète.
Et puis, au delà des questions purement scientifiques, se posent au chercheur des interrogations qui touchent à la métaphysique et à la spiritualité. Car ce qu’on oublie trop c’est que l’astronomie est une machine à remonter le temps : plus une étoile est éloignée, plus elle est jeune si l’on prend en compte le temps qu’il faut à sa lumière pour nous parvenir. Voilà qui permet d’écrire l’histoire de l’univers, mais pose aussi les questions inévitables : le monde a-t-il eu un commencement et, si oui, quel en est le principe créateur ? Est-il le fruit du hasard ou de la nécessité ? Est-il le seul de son espèce ?
Ce qui est le plus incompréhensible, c’est que le monde soit compréhensible disait Einstein, qui s’extasiait sur notre aptitude unique à comprendre l’univers. Un univers si ingénieusement agencé et en symbiose avec l’intelligence humaine, peut-il être simplement l’effet d’un hasard heureux ?
Pourtant TXT se refuse à conclure : il sait que la science est encore loin d’expliquer tous les mystères de l’univers et que le savant a besoin d’une approche complémentaire pour accéder au réel.
C’est, pour lui, la sagesse qu’il puise dans l’étude de la pensée bouddhiste.
Isabelle Vissière