À quoi correspond la notion de « péché » dans l’Hindouisme ?
Swamini Umananda anime la Chinmaya Mission France à Paris et enseigne la philosophie indienne.
Elle a été formée en Inde par Swami Chinmayanda, dans la lignée de Shankara.
Nous la remercions de nous avoir confié ce texte.
Elle nous dit que l’hindouisme est un vaste ensemble comprenant des croyances, des philosophies en particulier, une métaphysique, qui s’appelle le Vedanta qui est en fait au cœur de toutes les autres croyances : la non-dualité.
Le Vedanta postule une idée à la fois simplissime et en même temps très difficile à expérimenter, qui demande une transformation personnelle. Si on prend un terme technique, il s’agit d’un « monisme rigoureux », c’est-à-dire, que le Vedanta postule un principe divin, unique, absolu, une réalité suprême qu’on appelle le « Brahman » ; et ce principe a en lui le pouvoir dynamique de création, un pouvoir qui se manifeste sous la forme de l’univers. En fait, il y a, à la fois, la dualité qui apparaît parce que le monde a des formes qui apparaissent mais, en essence, toutes ces formes ne sont que ce principe suprême sous une autre forme. Tout est Un. Bien sûr, tout cela - cette vision de l’Unité - paraît une réalité très élevée, mais ensuite, le Vedanta et les autres courants tels le yoga, le yoga du son, etc., enseignent des méthodes, des techniques, un art de vivre qui affinent tellement l’esprit et la conscience qu’on devient capable de ressentir l’unité du monde, l’unité avec les autres êtres humains, l’unité avec tout ce qui nous entoure.
Le Vedanta est une métaphysique très élevée, assortie de recommandations pour vivre au quotidien, et des pratiques spirituelles spécifiques pour vivre la non-dualité comme une expérience, et pas seulement comme une idée 1.
Ainsi dans l’Hindouisme, au lieu de la notion de « péché », on parle plutôt de faute, d’action ou parole erronée, entraînant des conséquences négatives pour celui qui les commet.
Les termes sanskrits indiquant ces notions d’action erronée ou au contraire méritoire sont les suivants :
pâpam : action négative entraînant du démérite pour l'individu.
punyam : action qui attire du mérite à
l'individu 2.
« Toutes les actions physiques, toutes les émotions, toutes les pensées surgies en nous, reviennent vers nous avec leur cortège d'agitation, de regret, de remords si nous avons nui. Les actions nuisibles qui provoquent en nous de la souffrance sont appelées pâpa. Le contraire (mérite) est appelé punya.
Pâpa et punya (démérite et mérite) sont les réactions que provoquent les actions passées sur le mental. Le paradis et l'enfer ne sont que deux conditions différentes du mental. Ils ne sont pas quelque part, en dehors de nous, mais ils sont en nous.
Si dans un geste de colère, je tue quelqu'un, le regret et le remords que je ressens ensuite, la torture mentale dont je souffre alors, sont pour moi l'enfer. L'action par elle-même est au-delà du bien et du mal en réalité. C'est l'attitude avec laquelle nous l'avons accomplie, l'intention qui l'a accompagnée, qui comptent réellement.
Les actions qui ne nous causent pas de regret, et qui nous aident à harmoniser notre personnalité, sont les actions justes, bonnes et sources de mérite (punya). Celles qui laissent des regrets, qui pèsent sur notre esprit et qui déstructurent notre personnalité, sont les actions incorrectes, néfastes (pâpa). Le désir, la haine, la jalousie, la passion, toutes ces émotions négatives dévastent notre richesse intérieure et nous en dépossèdent. L'affection, l'amour, la tendresse, la paix, l'équanimité, la tranquillité sont les valeurs positives, les vertus (punya) qui décuplent notre vitalité ».
1 - Extrait de l’entretien par Anjali B. de Swamini Umananda le 2 octobre 2008
2 - Extrait du texte : « Traité d’épanouissement personnel », par Swami Chinmayananda