La Résurrection ? Terrifiant... mais exaltant !
Paul dit : « si le Christ n’est pas ressuscité, votre foi est vaine. »
Mais qu’est ce que cette résurrection ?
Peut-être est-ce cette sortie des tombeaux, qui symbolisa la résurrection pour tant de peintres des siècles passés. L’individu meurt,
et son âme, avec d’autres et sans perdre le monde de vue, attend quelque part la « fin du monde », où tous les justes (et les
autres ?) se retrouveront.
À vrai dire, il s’agit sans doute d’autre chose.
Dans son dernier livre, « Y-a-t-il un Dieu » ? Jean-Claude Barreau reconnaît que rien n’interdit de penser qu’une
force, que nous sommes incapables de décrire ou d’identifier aujourd’hui, nous rapprocherait de Dieu, après la mort. Laissons de côté l’enfer, le paradis et plus encore le
purgatoire.
Barreau évoque le coma, dont on sort comme si c’était l’instant d’avant. L’univers stocke en quelque sorte les âmes, jusqu’à une
ultime seconde. Pourquoi, dit-il, serait-il plus absurde de croire que l’univers a un sens, que de croire qu’il n’en a pas ? Pourquoi ma vie individuelle n’aurait pas de sens, alors que la
machine-univers s’est donnée tellement de mal (et a-t-elle fini ?) à fabriquer des individualités de plus en plus singulières jusqu’à l’homme, si cela ne servait à rien ? Tout
fonctionne comme si les choses s’organisaient en gardant mémoire des choses passées. Les multiples existences singulières ou collectives, les tragédies, les joies et les douleurs de chacun, comme
l’évolution des galaxies, prennent sens si elles donnent le la à la symphonie universelle. La conclusion de J.C. Barreau est qu’il n’est pas absurde que ces existences puissent
ressusciter, dans leurs singularités particulières, à la fin des temps.
D’autres ont aussi imaginé la vie après la mort comme une sorte de bien être, comme une relaxation bien conduite et bien aboutie, où
chacun est en face de sa vie, et fait comme un bilan : ce qui va, ce qui doit être dépassé, par rapport à un bien absolu, perçu comme un devenir et qu’on appelle Dieu.
Peut-être, encore mieux, chacun pourrait être d’emblée dans un bonheur qu’on appellerait le pardon de Dieu, l’amour de Dieu, qui
manifesterait l’Alliance de Dieu avec l’homme, l’Alliance du ciel et de la terre (le Paradis…).
Mais, même si l’on ne doit s’interdire aucune de ces approches, dont aucune n’est exclusive d’aucune autre, restons plus proches de
notre quotidien, « les pieds sur terre » en quelque sorte.
N’oublions pas que cet événement incroyable qu’est la résurrection de Jésus, qui sera
suivie de la nôtre un jour, est une des pierres d’achoppement pour beaucoup de personnes confrontées à la foi.
Permettez-moi une autre perception de la résurrection. Non pas que je veuille réconcilier la foi et la raison (quoique pourquoi Dieu nous aurait-il doté d’une intelligence si c’est pour nous empêcher de nous en servir ?…), mais
simplement, parce que je refuse de remettre à demain (ou plus) l’événement majeur de notre foi, qui doit changer notre vie, ici et maintenant.
Jésus s’est fait homme et est mort, non pas pour racheter nos fautes, mais parce que
nos insuffisances d’hommes, c’est-à dire nos attitudes injustes et intolérantes, conduisent à la mort : il a voulu aller jusqu’au bout de la démonstration, pour que nous comprenions que nous
devions changer, à 360°, et que nous passions de la Loi à l’Amour.
Tout son message est là.
L’alliance conclue avec Dieu a été rompue, et l’homme en meurt. Jésus compris. Mais de la même façon qu’Abraham, éclairé par l’Ange
(Genèse 22,12 ; mais qui est l’ange ? cela est un autre débat…) a renoncé à tuer Isaac, le meurtre de Jésus éblouit l’humanité. Le meurtre de Jésus rétablit l’Alliance… si l’homme en
veut. Mais la démonstration est faite ! Nous sommes sauvés une fois pour toutes !
La mort que nous affrontons, ce n’est pas la mort physiologique, celle du bout de la vie, c’est d’abord la dualité entre une émotion,
une vérité qui nous habite et qui est le désir de la fusion avec Dieu-créateur, et les passions exprimées chaque jour par les « tentations » du monde
(celles auxquelles Jésus aussi a été confronté). La mort, c’est la Chute, que nous ressentons comme la désolation de l’Alliance rompue. C’est « la descente aux enfers », comme
Jésus.
La résurrection de Jésus est le signe que la mort est le passage vers la vie. Après la résurrection de Jésus, la résurrection de
chacun est accomplie. La résurrection annoncée et promise à ceux qui vivent la Parole n’est pas un rêve futur pour un au-delà dont on ne sait
rien. C’est un événement présent d’ordre spirituel. C’est la participation à un nouvel agencement du monde, à la création en mouvement, à la vie qui jaillit chaque jour plus précisément du
chaos initial.
De fait, l’homme chrétien est initié par son baptême à la résurrection, qui nous fait resurgir du bain comme ayant
vaincu le risque de la mort (voir les rituels originels du baptême), baptême qui, l’homme étant purifié, « rené », nous inscrit dans l’Alliance. Le baptême marque l’acceptation
volontaire du combat à mener si l’on ne veut reprendre sa parole, renoncer à la Parole.
Ressusciter, c’est donc se mettre au service ici et maintenant
de la Parole. C’est l’accomplissement du devoir de vie. C’est la mise en œuvre de l’Amour : la communion dans une même Vérité. L’Homme doit participer, de sa propre volonté d’Homme libre, aimé de
Dieu, à la construction, chaque jour plus accomplie, construction qui repose sur le principe de l’interdépendance et de la solidarité. Pensons à cette belle phrase du Messie de
Haendel :
« Je sais que je suis vivant dans un univers vivant ; je sais que je suis conscient dans l’Unité éternelle de la
conscience divine ».
De fait, la résurrection que nous vivons aujourd’hui, c’est terrifiant ! Il nous faut entrer dans la divinité de Dieu. Mais
n’est-ce pas ce que peut souhaiter de mieux un père créateur, aimant ?... Comme des parents qui veulent que les enfants fassent aussi bien qu’eux !
Terrifiant, mais exaltant !
J’ai lu il y a longtemps cette phrase qui devrait nous donner la paix et la joie intimes :
« Nos corps apaisés et affranchis (par la résurrection de Jésus et la nôtre ainsi signifiée) redeviennent les instruments
conscients et les serviteurs libres de la parcelle d’éternité dont ils sont dépositaires et responsables. »
Danielle Nizieux
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