Les racines de la France
Les Éditions du Toucan, septembre 2008
Le sous-titre : Notre histoire des origines à nos jours indique mieux que le titre l'objet du livre. C'est un beau livre, agréable à lire, très accessible, qui peut donc être recommandé à tout lecteur désirant renouveler sa vue d'ensemble sur l'histoire de France. Comme c'est un beau livre, avec de très belles illustrations, on peut le conseiller comme un cadeau pour un anniversaire ou les fêtes de fin d'année.
On y retrouve bien sûr les grands moments et les grandes figures de l'histoire de France, mais l'auteur, dans un style alerte, a constamment le souci de faire sortir des clichés reçus pour mieux faire comprendre la particularité de chaque étape de cette longue histoire. Il a déjà écrit, avec Guillaume Bigot, des livres sur « Toute l'histoire du monde » (Fayard 2005) et « Toute la géographie du monde » (Fayard 2007), c'est donc avec hauteur de vue en même temps qu'un intérêt très personnel qu'il aborde l'histoire de son propre pays. Cela nous vaut souvent des visions neuves, qui donnent à penser.
C'est ainsi que la première partie est intitulée : « La France avant la France », pour souligner que la France comme entité originale, telle que nous la connaissons, ne commence qu'avec la monarchie capétienne, au 10e siècle. Auparavant, elle fait partie du monde celte, sauf sa côte méditerranéenne, hellénisée depuis longtemps, avant que son espace soit intégré à l'Empire Romain à partir de Jules César. Elle passe alors sous influence romaine, on parle du monde gallo-romain. La langue française qui s'imposera dérive du latin, alors que seul le breton dérive aujourd'hui des langues celtes parlées par les Gaulois. Charlemagne, grande figure mythique de l'histoire de France traditionnelle, étendra ses possessions sur toute l'Europe de l'Ouest, essaiera de recréer l'Empire Romain, et ce sont ses successeurs germaniques qui s'emploieront à créer le « saint Empire Romain germanique », à l'Est de ce qui deviendra la France.
La vision de la France durant la période du Moyen Age est très originale, très loin des vues simplistes : elle en souligne les richesses, puisqu'on peut parler d'une « Apogée médiévale », puis de la « naissance du patriotisme français ».. On y affirme que « s'il exista un miracle grec dans l'Antiquité, on peut aussi parler d'un miracle français au XIIIème siècle ! » (p. 78). Cela se manifeste par l'architecture gothique, la chevalerie, le recul de l'esclavage, mais surtout par l'amour courtois, qui donne enfin une place réelle aux femmes. Les figures d'Héloïse et de Jeanne d'Arc sont bien mises en relief.
L'histoire de France est inséparable des évolutions de l'Europe, et cela est bien souligné dans ce livre. La Renaissance naît en Italie, la Réforme en Allemagne, toutes deux retentissent fortement sur la vie en France, déclenchant les effrayantes guerres de religion. Il faut attendre le XVIIème siècle pour atteindre une deuxième apogée de la France, dès Louis XIII et Richelieu, puis durant le « siècle de Louis XIV. L'auteur souligne alors le rôle néfaste de Louis XV : « Intelligent, beau, ce roi fut incroyablement paresseux... Louis n'était pas seulement bon vivant, ce que les Français ne détestent pas, mais dépravé... Ce fut le malheur de la France d'avoir pendant si longtemps un roi aussi médiocre, alors que, partout ailleurs en Europe, les souverains étaient remarquables. » (p. 151)
Comme il convient, c'est à la période récente qu'est consacrée la partie la plus longue. Elle est en général la mieux connue, mais là aussi on trouvera des vues originales, qui permettent de mieux comprendre notre présent. Ce livre roboratif, qui respire un amour équilibré pour son pays et pour la République, confirme qu'une bonne connaissance du passé est indispensable à ceux qui veulent préparer lucidement l'avenir.
Jacques Lefur