Les secrets de la marche dans le désert

Publié le par Garrigues

Bien chers frères et sœurs en Jésus,

Il s’appelait Brahim, et il avait bâti sa maison à la lisière du Grand Erg Oriental, entre El Oued et Touggourt. Usé par le travail, dans cette rude région du Sahara, il avait élevé une famille de sept enfants, maintenant bien lancés dans la vie. Il est décédé voici près de trois ans. Son épouse, compagne attentive et fidèle, ne lui a pas survécu : elle l’a suivi sur le même chemin un mois jour pour jour après son départ.

Si je parle de Brahim c’est parce que cet ami m’a dévoilé les secrets de la marche au désert, et ceci par tous les temps. Avant de se sédentariser, il était nomade et sillonnait les grands espaces. Il m’a ouvert son grand savoir par une belle nuit d’été. Couché sur le dos, face à la Voie Lactée, Brahim me décrivait le ciel. Avec passion, il me dévoilait les étoiles et les constellations, tout particulièrement celles qui sont indispensables au voyageur de la nuit. « Celui qui ne connaît pas les étoiles ne marche pas dans la nuit » me dit-il. Les identifiant les unes après les autres, il me disait leur nom : celles qui sont immobiles, celles qui bougent, les fiables et les trompeuses. Quel festival céleste ! La nuit avançait et je n’avais plus envie de dormir. Brahim s’est alors mis à me raconter comment il avait appris à marcher dans le vent de sable et dans la nuit obscure. La nature du sable palpé au creux de la main, les plantes spéciales à telle région du désert, la température du vent, lui faisaient reconnaître sa route. Sinon, il laissait aller les chameaux et se fiait à leur flair. Et si tout cela venait à manquer… Eh bien, me dit-il, « on s’arrêtait, et l’on prenait patience ! »

Je parlais dans mon dernier billet de ce vent de sable persistant qui traverse l’horizon de notre Église. Nous avons l’impression parfois d’avoir perdu certains de nos points de repère habituels. Ce qui nous paraissait jalon stable sur la piste se transforme en mirage. À certains moments, le ciel nous semble même bouché : ici, il nous est demandé d’arrêter les cours de soutien scolaire, là de ne pas aller célébrer la messe pour les chrétiens expatriés, sur leurs bases de travail. Certains de nos amis musulmans sont même suspectés par le seul fait de frayer avec des chrétiens ! Les visas semblent se faire plus rares. On nous fait parfois sentir que nous serions mieux ailleurs…

Faut-il parler, en ce qui nous concerne, de simples turbulences administratives ? Voir dans ces interdictions une mise en ordre d’activités exercées et tolérées par la seule force de l’habitude ? Faut-il craindre, comme me le disait l’autre jour un journaliste, la disparition programmée de notre Église ? Dans ces tourbillons, l’imaginaire a le beau rôle mais il est loin d’être fiable. La panique ne porte pas à la clairvoyance, les généralisations rapides et les fausses suppositions non plus.

Le récit nocturne de Brahim me semble une sage invitation à plus de sérénité. Aurions-nous perdu le chemin ? Revenons au ras du sol ! Palpons cette terre humaine qui nous est devenue si familière et si chère. Elle est jalonnée de signes dont la nature nous dit une amitié et une fidélité aussi vivaces que les plantes du désert. Notre ciel non plus n’est pas sans vivantes étoiles. Si certaines sont trompeuses, d’autres nous indiquent fidèlement le chemin. Et si nous pensons que tout appui humain nous manque, alors, arrêtons-nous, et prenons patience. Surtout ne quittons pas le terrain fiable de notre quotidien et de nos motivations les plus profondes.

Avant de quitter les siens quelque peu désemparés de le voir partir et de les « laisser tomber », Jésus leur a glissé cette promesse : « Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. » À nous de montrer dans la tourmente présente qu’Il ne nous a pas menti !

 

+Claude, votre frère évêque
DIOCÈSE DE LAGHOUAT – GHARDAIA
BILLET MENSUEL MAI 2008

NDLR : le titre de l'article est de G&S.

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P
"le paiement de la fameuse jiziah, l'impôt de capitation des Statuts des Dhimmis,"<br /> <br /> Je suis toujours très surpris de l'utilisation du statut de "dhimmi" pour déclencher la larme à l'oeil des publics chrétiens avec la stigmatisation d'une "altérité impossible".<br /> <br /> <br /> Regardons bien nos sociétés et le traitement que nous infligeons au populations venues d'ailleurs, qu'elles soient d'origine maliennes ou maghrébines (et donc généralement musulmannes).... L'expression "Troisième génération" est l'une des formulations politiquement correctes du racisme. Un "troisième génration" est un français.<br /> <br /> Un diplôme bac +5 est -il également reconnu par les employeurs si le jeune se nomme Karim BenDjedid que s'il se nomme Laurent LeBougnat (a fortiori s'il se nomme Laurent Le Bougnat de la Tourelle) ? La réponse est non. Un salaire de trois fois le montant du loyer a-t-il une égale valeur pour le bailleur de logement si la famille se nomme Traoré ou si la famille se nomme Dupont ? Des exemples comme celui-ci, j'en ai des tonnes dans mon sac (y compris chez les bailleurs sociaux, pour la discrimination au logement) sans mêem consulter les listings de "Droits devant".<br /> <br /> Aussi, je dirais que le statut de Dhimmi est plus franc que la soi disant égalité formelle de tous les citoyens quand, dans les faits, certaisn sont moins égaux que les autres.<br /> <br /> Or, nous sommes un pays "démocratique", développé. Ce qui me semble une situation aggravante.<br /> <br /> La difficulté de vivre avec un autre vraiment autre mais si semblable est le fait de toutes les sociétés et, dans nos pays supposés laïcs, on voit nbien que cela ne doit rien à l'Islam.
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