Les renés
« Ne sois pas étonné si je t’ai dit qu’il vous faut renaître… »
(Jean 3, 7)
« Les renés » sont des hommes et des femmes qui, ayant rencontré le Christ dans leur histoire, s’avancent vers lui alors que lui s’approche d’eux. Dans la foi ils célèbrent cette renaissance dans le rite communautaire du baptême, source intarissable.
Chacun marche chaque jour librement vers le Ressuscité, qui alors…
- L’accueille,
- Le greffe en lui,
- Le situe dans la relation d’amour trinitaire,
- Le charpente spirituellement dans le dynamisme de sa propre personnalité,
- Le met en communion forte (symbiose) avec les autres frères et sœurs de la foi,
- L’insère dans le monde en solidarité créatrice avec tous les humains,
En devenant lui-même, chacun devient peuple et le peuple devient chacun.
Mais pour sauvegarder liberté et amour, il convient de se détourner jour après jour de l’automaticité, de la superstition et de la magie fussent-elles ‘sacrées’.
Pour renaître, « il faut »
d’une part
- le désirer,
- le demander,
- choisir des petits moyens adaptés à son tempérament
et d’autre part
- bouleverser ses pratiques au rythme de ses découvertes,
- prendre sa part dans une communauté chrétienne célébrante.
Ce « il faut » que Jésus dit à Nicodème ne laisse pas de place à l’indécision et à l’imprécision.
« Il
faut » crie la liberté de la démarche même si chacun n’agit qu’à l’intérieur de ses propres limites, de ses ambiguïtés, de ses contradictions, de ses approximations, de ses
trébuchements.
« Il faut » ne demande pas la perfection mais un choix : le plus clair et le plus personnel possible.
« Il
faut » réclame le concret.
On ne peut établir une alliance que si on la souhaite sereinement et qu’on en invente au jour le jour les modalités.
La démarche libre de l’adhésion au Christ ne postule pas de
savoir par avance tout ce qu’il faudra faire. Comme dans l’annonce faite à Marie les ‘comment’ n’ont pas cours ; il suffit aux baptisés de se livrer au
souffle de l’Esprit. À chaque étape chacun verra de quelle manière « il faut » négocier avec
la réalité en vue de s’enraciner dans l’Évangile.
Pas d’effroi, pas de peur, pas de plan ; mais disponibilité et souplesse pour au sein de l’à-peu-près effectuer tant bien que mal :
- ce qui semblera le meilleur pour la gloire de Dieu c'est-à-dire pour nous le bonheur, la bonté, la paix et la justice entre les humains ;
- « les manœuvres » qui permettront le mieux de ‘prendre le vent’ de l’Esprit. Mais tempête ou zéphyr, le souffle sera toujours chargé des merveilles et des poussières de l’humanité et de la création ;
- La prédilection pour les choses simples qui inscrira dans la patience des germinations et des discernements les traces éphémères de l’éternité ;
- Le partage qui répartira au plus juste le trésor que chacun possède pour en faire un bien commun.
Le navire est sous le vent, mais aucun rené n’abandonne le gouvernail que dans sa confiance Dieu lui a confié comme à tout homme. La liberté de chacun tient la barre et improvise la manœuvre.
Le baptisé sait « reconnaître » d’où vient le vent ; il profite de sa puissance pour effectuer une heureuse traversée avec tous ceux et celles qu’il a conviés à son bord.
Christian Montfalcon