Père...
Jésus fait souvent référence à son Père. Il l’appelle, l’interpelle, nous renvoie à Lui, nous apprend à le prier comme “notre Père” …
Ce dont Jésus nous protège, si nous suivons son conseil, c’est du risque d’idolâtrie. L’autorité suprême sur notre vie, la seule, parce qu’il en est la référence, doit être celle de Dieu-le-Père. C’est à Lui qu’il faut obéir plutôt qu’aux hommes (Actes 5,29), aussi prestigieux soient ceux-ci. Il ne faut pas confondre le respect normal, habituel, dû à une autorité légitime – civile ou religieuse – avec la sacralisation et l’absolutisation de la personne de son détenteur. Celui-ci n’aurait d’ailleurs pas d’autorité si Dieu ne la lui avait donnée (Jean 19,11).
Il ne saurait y avoir conflit de devoirs dans ce domaine, si nous désirons “que la volonté de Dieu soit faite”. C’est ce qui justifie la clause de conscience que l’Église a – en principe – toujours reconnue ; que l’État a parfois admise. C’est ce qui devrait garder le chrétien de tout culte de la personnalité comme d’un transfert dévoyé d’une adoration due à Dieu seul.
En interdisant d’appeler de ce mot si fort : “Père” une simple autorité humaine, Jésus a défendu notre liberté. Celle-ci reste, après la vie, le principal, merveilleux et dangereux don que Dieu nous a fait ; elle est la situation où notre image s’approche le plus de la sienne. Quelle leçon, en même temps, pour les pères génétiques, les chefs, grands ou petits ! Quelle protection contre les “guides” (duce, führer, conducator), maîtres et gourous (les faux, car les vrais respectent la personnalité autonome de leurs disciples…) !
Il resterait à analyser l’articulation entre la paternité de Dieu – rappelée dans tous nos discours religieux – et sa maternité, qui n’a été mise en évidence que par quelques mystiques, et des théologiennes féministes américaines, sans qu’on ait épuisé la richesse d’une telle représentation.
Albert OLIVIER