Fécondité du possible
À propos du livre de Jean
Giono
L’homme qui plantait des
arbres
Je viens de lire (ou de relire, je ne sais plus tant j’étais
enchanté) l’histoire simple et généreuse de Eléazard Bouffier, écrite par Jean Giono et publiée chez Gallimard en 1983 pour la première fois, me semble-t-il, et rééditée en janvier 2007. Ce
petit livre intitulé « L’homme qui plantait des arbres » ne comporte qu’une quarantaine de pages et coûte à peine six euros. Pourquoi s’en
priver… !
Petits et grands, jeunes et moins jeunes, nous connaissons tous Jean Giono. Il a passé sa vie à Manosque en Provence. Il est mort en 1970. C’est un historien et un conteur. Il est l’homme des grands espaces, des vastes horizons, du vent de la montagne, des troupeaux et des gens simples qui tissent la vie là-haut et plus loin. Comme les sages du silence, il lit dans les étoiles, la profondeur des cœurs, pour que la joie demeure…
Un jour, avant la guerre de 1914, qu’il marchait seul sur
les hauts plateaux désertiques des landes nues et monotones où ne poussent que des lavandes sauvages, il rencontra Eléazard Bouffier.
Loin des villages des charbonniers qui brûlent la montagne
et se concurrencent en tout, le berger, qui avait perdu femme et enfant, vivait seul au milieu d’une trentaine de moutons. Son ménage était en ordre, sa
vaisselle lavée, son parquet balayé, son fusil graissé. Il était rasé de frais, ses boutons étaient solidement cousus, ses vêtements étaient reprisés avec un soin
minutieux…
Bouffier portait toujours avec lui une simple tringle de fer. Lors de ses déplacements dans le désert des cimes il s’en servait pour faire un trou dans la terre dans lequel il glissait un des glands de chêne qu’il avait sélectionnés avec précaution durant ses veillées solitaires. Il plantait, il plantait encore, il plantait toujours, il rêvait de couvrir la montagne d’une forêt de chênes et s’était mis à la tâche, et chaque jour il persévérait.
Il y avait beaucoup de « ratés », il persévérait…Il y eut la guerre de 1914 ; trop âgé pour être soldat il resta sur les hauts plateaux…il persévéra.Les moutons mangèrent les jeunes pousses ; il supprima alors les moutons qui étaient pourtant ses « proches » et éleva des abeilles. Quoiqu’il lui en coûtât, il persévérait dans son dessein…
Ses arbres moururent tous. Il recommença mais il planta des
hêtres, c’étaient des arbres mieux adaptés… il persévérait.
Avant la guerre de 1939, l’administration des Eaux et Forêts
prononça de belles mais inutiles paroles ; heureusement on ne fit rien. Les arbres grandissaient, et le berger apiculteur persévérait…
En 1945 l’entêtement besogneux, désintéressé et amoureux
d’Eléazard Bouffier avait changé l’aspect de la montagne. Ses moyens simples et constants portaient leurs fruits.
Le pays avaient repris vie et lui mourut paisiblement à
l’hospice de Banon…
Pourquoi ai-je aimé cette histoire ?
Pourquoi ai-je aimé cette histoire ?
Parce qu’elle raconte le parcours d’un homme simple
qui simplement avec des moyens simples, proportionnés à ses forces, change toute une région par sa persévérance.
Eléazard n’a pas sombré dans la rêverie creuse ; il a engendré l’avenir en accomplissant ce qui était à sa portée...
Eléazard n’a pas sombré dans la rêverie creuse ; il a engendré l’avenir en accomplissant ce qui était à sa portée...
Christian Montfalcon