A l'écoute de la Parole de Dieu
20ème dimanche du temps ordinaire 18/08/2024
Pr 9, 1-6 ; Ps 33 (34) ; Ep 5, 15-20 ; Jn 6, 51-58
«Jésus disait à la foule : Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair…»
Ne banalisons pas cette affirmation du Seigneur dans la liturgie répétitive de nos messes ; elle est destinée à provoquer un choc, à nous interroger. On peut comprendre la réaction des Juifs disant : « Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? », car il n’est pas évident que du pain, fut-il venu du ciel, soit la chair d’un homme ni qu’il faille la manger pour obtenir la vie éternelle. Les disciples eux-mêmes vacillèrent devant cette proposition de Jésus non pas d’offrir « son » pain, ce que fait la Sagesse (Pr 9,5), mais comme étant lui-même le « Pain de Vie ». « Plusieurs de ses disciples, après l'avoir entendu, dirent : Cette parole est dure ; qui peut l’écouter ? ». (Jn 6,60). Et nous, qu’en disons- ?
La foi passe aussi, parfois, par une renonciation à l’intelligible au profit de la confiance. Dans ces « paroles difficiles à entendre » Jésus souligne à la fois que le salut passe par lui, qui seul connaît le Père, et conséquemment que notre « nourriture » spirituelle ne vient que de lui. Dans l’Église, cette nourriture passe principalement par l’eucharistie ; une messe sans « communion » présente un manque, disait, je crois, le cardinal Ratzinger. Mais « l’homme ne vit pas seulement de pain mais de toute Parole qui sort de la bouche de Dieu » (Mt 4,4). Or cette « Parole », saint Jean le signifie dans son Prologue, c’est Jésus-Christ : « Et le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous, et nous avons vu sa gloire » (Jn 1,1-14). On peut donc communier aussi dans la Parole, entre autres par une lecture « incorporante » des Écritures. On répliquera peut-être que c’est là une position proche des Réformés. Elle ne contredit pas la doctrine puisque la communion dans la parole est, dans certains cas, la seule proposée à des fidèles catholiques considérés comme « infidèles ».
C’est, par exemple, la principale perspective que l’Église offre aux divorcés-remariés qui désireraient vivre dans sa communion. Après la pirouette que représente l’affirmation qu’ils ne sont pas excommuniés, quoiqu’ils ne puisent communier, elle leur laisse une voie latérale : « ils peuvent [et doivent ?] assister à la messe participant au sacrifice du Christ [par] la communion spirituelle, la prière, la méditation de la parole de Dieu… » (Lettre aux évêques… sur l‘accès à la communion eucharistique de la part des fidèles divorcés-remariés, 14 09 1994).
En fait, la manducation de l’hostie n’a de sens qu’éclairée par la « rumination » de la Parole.
Marcel Bernos