A l'écoute de la Parole de Dieu
18ème dimanche du temps ordinaire. 04/08/2024
Ex 16, 2-4.12-15 ; Ps 77 ; Ep 4, 17.20-24 ; Jn 6, 24-35.
Nous sommes dans un cycle qu’on pourrait appeler celui du « Pain de Vie », depuis le dimanche précédent jusqu’au 18 août. Les textes devraient être lus ensemble, leur découpage nous en donne quelques morceaux chaque dimanche. Le dernier dimanche du mois, le 25, nous montrera à quel point cet enseignement est difficile à recevoir, mais « à qui irions-nous ? » dira Pierre.
Aujourd’hui, l’annonce du « Pain de Vie » commence par l’histoire de la manne, avec Moïse. Les fils d’Israël ont transformé la joie de leur libération en récriminations car le chemin de la liberté est difficile, douloureux.
« Vous nous avez fait sortir dans ce désert pour faire mourir de faim tout ce peuple assemblé ! » Comme on les comprend ! N’est-ce pas notre cas aussi, bien souvent ? Jésus ne nous a pas promis un chemin bordé de roses, plutôt d’épines bien souvent. Et Dieu ne s’étonne pas de cette situation, il ne s’offusque pas, il offre alors viande et manne. Dieu nourrit (en tous les sens) son peuple, Il ne nous abandonne jamais, motif d’espérance s’il en est quand les jours sont difficiles.
Cette espérance est chantée dans le psaume, fondée sur la confiance en Dieu.
« Chacun se nourrit du pain des Forts, il les pourvoit de vivres à satiété. Tel un berger, il conduit son peuple. Il le fait entrer dans son domaine sacré. »
Alors Paul, dans l’Épître aux Éphésiens, qui est aussi lue tout au long de ces dimanches, nous appelle à devenir des hommes nouveaux. Dimanche dernier il nous exhortait à nous conduire d’une manière digne de notre vocation, car cette vocation « vous a tous appelés à une seule espérance ». Cette fois-ci il insiste pour que nous revêtions l’homme nouveau. Si Dieu nous nourrit, s’il nous unit dans cette espérance, il nous faut « se revêtir de l’homme nouveau, créé, selon Dieu, dans la justice et la sainteté conformes à la vérité. » Ce sera le thème central de ce chapitre 4 de l’épître aux Éphésiens lu au cours de ces dimanches, thème développé par quantité de conseils moraux que nécessite l’état d’homme nouveau.
Dans l’Évangile, on arrive au cœur de l’annonce de Jésus. Le pain distribué par Élisée (dimanche précédent), le pain donné sous forme de la manne (ce dimanche), celui qui va donner des forces à Élie le dimanche suivant ou celui de l’appel des Proverbes enfin (le dimanche 18) : « Venez, mangez de mon pain, buvez le vin que j’ai préparé», est une annonce du Pain de Vie offert par Jésus.
Dimanche dernier, l’Évangile relatait la « multiplication des pains ». Remarquons que le texte ne parle pas de « multiplication » mais du don, de la « distribution » du pain par Jésus (pas par les disciples). Jésus se trouvait ainsi dans la suite des textes de l’Ancien Testament (pains d’Élisée, de Moïse, d’Élie, puis repas des Proverbes) pour encore inscrire dans la réalité le don de Dieu qui nous nourrit. Maintenant, il passe à l’essentiel, il ne s’agit plus de pain ordinaire, mais du don de son Corps :
« Travaillez non pas pour la nourriture qui se perd, mais pour la nourriture qui demeure jusque dans la vie éternelle ».
Et vient l’affirmation fondamentale (qui sera reprise de façon plus choquante encore par la suite) :
« Moi, je suis le Pain de la Vie. Celui qui vient à moi n’aura jamais faim ; celui qui croit en moi n’aura jamais soif. »
Plus tard, lors de la Cène, ce Pain partagé sera compris comme le Corps du Christ, Pain de Vie que nous devons partager en le mangeant, et nous serons ainsi membres de ce Corps. Jésus est la Pain de Vie, qui, partagé, fait de nous son Corps dans l’Eucharistie. Celui qui mange sa « chair », c’est-à-dire tout ce qu’il est, sa personne (il ne s’agit pas d’anthropophagie), devient lui-même ce Corps donné aux hommes pour leur salut.
Entre le texte de la multiplication des pains et celui-ci, Saint Jean a inséré le petit passage où Jésus marche sur les eaux. Ce n’est probablement pas un hasard, même si cela semble étonnant. Avant de passer du pain d’ici-bas au Pain de Vie, l’Évangile raconte une théophanie : en marchant sur les eaux, Jésus manifeste qu’il est investi de la puissance de Dieu, ce qui légitime alors son affirmation « Je suis le Pain de Vie ». Cela n’empêche que c’est dur à entendre et qu’un peu plus tard il va perdre bien des disciples qui ne peuvent le suivre sur ce terrain là. Jésus n’en est pas étonné, et avertit ses disciples :
« Personne ne peut venir à moi, si le Père qui m’a envoyé ne l’attire. »
Tout ce chapitre 6 de St Jean ne peut être suivi, accepté, avec notre seule intelligence. Nous sommes au cœur de la Révélation de Jésus, nous ne pouvons la recevoir que si nous sommes attirés par le Père, et donc si nous nous mettons en mesure de recevoir ce don, là est notre travail.
Marc Durand