A l'écoute de la Parole de Dieu
11e Dimanche du temps ordinaire (année B)
Ez 17, 22-24 ; Ps 91 (92) ; 2 Co 5, 6-10 ; Mc 4, 26-34
«Je renverse l’arbre élevé et relève l’arbre renversé, je fais sécher l’arbre vert et reverdir l’arbre sec» (Ez 17 24). Image saisissante de la «Toute puissance» de Dieu, qui est celle de son amour comme élan vital. On la rencontre aussi dans le Magnificat : «Déployant la force de son bras, il disperse les superbes. Il renverse les puissants de leurs trônes, et il élève les humbles» (Lc 1, 51-52).
On peut lire beaucoup de choses dans cette mise en scène du «grand cèdre», déjà présent dans le Psaume 91 (92) : entre autres, la libre capacité du Seigneur à «emprunter» au grand arbre vieillissant — comme à la tradition «superbe», parfois orgueilleuse, souvent rigide, mais qui « garde sa sève et sa verdeur» — une tige de sa ramure pour planter un nouvel arbre qui va s’épanouir en un cèdre magnifique. Interprétation troublante, si on la réfère à l’histoire de l’Église : ce nouveau cèdre n’est pas planté dans l’ombre de l’arbre originel, mais est installé par le Seigneur «sur une montagne très élevée» (Ez 17,23), lieu où, on le sait, Dieu est présent. Peut-on y voir l’invitation à une réforme urgemment nécessaire et incessamment espérée ?.
Après le Psaume 91 (92) qui parle du juste qui «grandira comme un palmier (ou) comme un cèdre du Liban», l’évangile de Marc recourt encore à des comparaisons végétales, en utilisant cette fois le blé ou la moutarde. Dans une première approche, on peut comprendre la place, à la fois réelle et symbolique, que prend la végétation dans le pays semi-désertique qu’est la Palestine. Elle fleurit souvent dans les paraboles de Jésus et, avant lui, dans d’autres livres de la Bible, tel Isaïe (chapitres 17, 18, 19 par exemple). Mais on peut pousser cette comparaison dans un sens plus «existentiel», et qui nous concerne personnellement.
Pour cela, revenons aux trois textes cités (Éz, Ps 91, Mc). L’arbre (ou l’herbe) s’élève, reverdit, s’épanouit … à partir d’une jeune tige ou d’une simple semence. Quelle confiance on trouve dans cet épanouissement de la vie ! Refus de l’arbre sec que risque de devenir notre vie si elle n’est «irriguée» par l’eau de la grâce». Celle-ci connaîtrait un cycle, comme «la pluie et la neige qui descendent des cieux n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer […] Ainsi ma parole, qui sort de ma bouche (c’est Dieu qui parle), ne me reviendra pas sans résultat, sans avoir fait ce qui me plaît, sans avoir accompli sa mission» (Is 55, 10-11). Espoir aussi de nous renouveler par cette grâce, car Dieu peut faire reverdir l’arbre sec (Ez 17,24).
Comme souvent, dans la liturgie, la «seconde lecture» (2 Co 5,6-10) semble ne pas avoir de lien direct avec le thème principal exprimé ce jour là. Elle met pourtant en valeur l’articulation entre la foi vacillante , que nous pouvons avoir ici et maintenant, et la «claire vision» qui adviendra dans le Royaume. Cette attente ou, pour en rester au symbole de la végétation, cette croissance appelle-t-elle autre chose que la confiance que doit garder le croyant, prônée par Paul. Celle-ci grandira comme la minuscule graine de moutarde, qui en grandissant va étendre ses branches constituant un abri sûr. «Quand je me tiens sous l’abri du Très Haut… je dis au Seigneur : ‘Mon refuge, mon rempart’…» (Ps 90,1-2).
Marcel Bernos