À Rome, le synode évoque les blessures dans l’Église et dans le monde

Publié le par Garrigues et Sentiers

À Rome, le synode évoque les blessures dans l’Église et dans le monde

Le synode sur la synodalité à Rome arrive à mi-parcours. Entre-temps, on a répété ad nauseam qu’un synode n’est pas un parlement, que l’Esprit est l’acteur principal, que l’harmonie doit naître de la diversité et que nous partons ensemble pour discerner. Mais les strophes du chant restent à écrire par les participants. En termes de contenu, les hommes et femmes rassemblés parlent maintenant des blessures dans l’Église et dans le monde qui demandent à être guéries.

Les participants au synode sont avant tout conscients des blessures au sein de leur propre communauté ecclésiale : les blessures des abus, les blessures de la polarisation et de la division internes croissantes, les blessures causées par les luttes liturgiques internes telles que le rite syro-malabar en Inde, où le synode des évêques a voulu rétablir l’Eucharistie dos au peuple, alors que les prêtres et les fidèles ne veulent pas de cette messe ad orientem. Mais tous sont également conscients des blessures du monde, notamment à cause des nombreuses guerres qui font tant de victimes en Israël et en Palestine, en Ukraine, en Arménie, au Myanmar, en Syrie… On entend régulièrement des récits tragiques et émouvants de chrétiens de ces régions touchées.

L’Eglise doit redécouvrir son potentiel thérapeutique

Comment l’Église doit-elle faire face à toutes ces ruptures et divisions, à toutes ces blessures profondes qui ont été infligées ? Le prêtre et auteur pragois Tomáš Halík ne participe pas au synode, mais les visions qu’il a tirées de son livre Toucher les blessures, entre autres, semblent être le fil conducteur. Il faut voir les blessures, les reconnaître, les toucher et essayer de les guérir. Trop de personnes se sentent lésées, exclues, non acceptées, condamnées, blessées par l’Église. 

Comment l’Église peut-elle devenir une mère et un hôpital de campagne pour eux ? Une mère continue toujours à aimer ses enfants, quoi qu’il arrive. Elle reste proche de ses enfants. L’Église doit abandonner son attitude de jugement, de moralisation et d’exclusion. Elle a besoin d’une miséricorde pastorale. Pour reconnaître et guérir les blessures, elle a besoin d’espaces pour écouter les gens et pour cheminer personnellement avec eux par le biais de l’accompagnement spirituel. Halík estime que l’Église doit redécouvrir son potentiel pédagogique et thérapeutique à travers l’accompagnement spirituel personnel afin de parvenir à une véritable conversion et à un renouveau de la foi. L’histoire des disciples d’Emmaüs reste paradigmatique à cet égard.

La question du diaconat des femmes au cœur des conversations

Les conversations sur une Église accueillante – parler d’une Église inclusive semble à certains un peu trop froid – respirent clairement l’esprit du Pape François. Ses discours sur une Église qui va aux périphéries, qui n’attend pas que les gens viennent à elle mais qui s’avance elle-même vers les gens, sont devenus la norme après une décennie de pontificat. Ce synode contribue sans aucun doute à garantir son héritage. Il contribue au changement de mentalité qu’il souhaitait dans l’Église : le passage d’une Église hiérarchique et pédante à une Église à l’écoute, proche et au service. Loin du cléricalisme, vers une Église qui voit et guérit les blessures, une Église aussi qui fait place à la coresponsabilité de tous les baptisés. 

Il est certain que les femmes pourraient apporter une grande contribution au diaconat en matière d’écoute, d’accompagnement spirituel et de soin des blessures dans les hôpitaux de campagne. Ce n’est pas une coïncidence si le diaconat des femmes a été un sujet de conversation ces derniers jours.

Trop de défis surgissent au cours de ce synode

Mais elle concerne également les (candidats) prêtres et tous ceux qui exercent déjà des fonctions et des offices dans l’Église. La formation au leadership et à l’exercice du pouvoir est nécessaire pour lutter contre les abus. Une formation humaine générale est nécessaire pour des relations interpersonnelles saines et une maturité psychosociale. En ce sens, la formation des prêtres doit être profondément renouvelée, les participants au synode en sont convaincus.

Au cours d’un synode, tant de défis et de problèmes surgissent – des bouleversements causés par la numérisation aux conséquences du colonialisme, de la polygamie aux mariages mixtes, du changement climatique à l’intelligence artificielle, tout est évoqué – mais il est impossible d’explorer toutes ces questions en profondeur et de proposer des solutions. Souvent, les opinions sont trop éloignées les unes des autres, et cela dépasse également les compétences d’un synode. 

Peut-être qu’une telle assemblée provoquera une nouvelle Pentecôte, mais elle semble de plus en plus devenir le tremplin d’un Troisième Concile du Vatican, car en plus de l’orientation pastorale, il faudra tôt ou tard procéder à des ajustements doctrinaux et il faudra vraiment impliquer l’ensemble de l’Église mondiale dans le processus de réflexion. En ce sens, le processus synodal ne fait que commencer.

Emmanuel Van Lierde

Source : https://www.cathobel.be/2023/10/a-rome-le-synode-evoque-les-blessures-dans-leglise-et-dans-le-monde/

Publié dans Réflexions en chemin

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G
Oui ce n'est qu'un début !Le temps passe et les transformations concrètes manquent.... Les prélats devraient réfléchir à ce proverbe anglais : " La preuve du pudding c'est qu'on le mange".
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