Du vendredi Saint au dimanche de Pâques 2023 - La Croix et la Résurrection

Publié le par Garrigues et Sentiers

 

La Résurrection est un événement incontournable... et cependant incroyable. Nous n'avons pas une croyance en des faits qui évidemment ne sont pas avérés dans la forme présentée. La Résurrection, événement survenu à Jésus crucifié, comme réponse à sa fidélité jusqu'à la mort, produit un événement survenu à l'existence des disciples. Le récit annonce le salut en Jésus-Christ. Les évangiles décrivent l'expérience spirituelle de la communauté des disciples qui opère un bouleversement de leur foi dans le Dieu de la Promesse (promesse à Abraham, à Moïse, à Élie et aux prophètes).

C'est une communauté, celle des disciples, qui va se mettre en route. Sa foi en la Résurrection, qui est le retournement par le Père de la situation d'échec vécue le vendredi, est le fondement de leur espérance. En communion, et non seuls, ils partiront en mission et deviendront pèlerins d'espérance.

La mort n'a pas le dernier mot mais elle devient ouverture sur Dieu, tout en étant un détachement douloureux mais nécessaire. C'est à travers notre propre pratique du "suivre Jésus", dans nos engagements terrestres, que nous découvrons l'œuvre de l'Esprit en nous et dans le monde, et que nous pouvons alors recevoir ce que croient les disciples. Cette découverte, nous ne la faisons pas seuls, mais en communion avec nos frères. Notre espérance est portée par cette communion.

 

La Résurrection ouvre un temps nouveau, une nouvelle histoire. Elle rebat les cartes de l'histoire en se mettant en travers. C'est l'à-venir de Dieu-avec-nous qui éclaire notre histoire. Nous sommes héritiers de la première promesse qui a accompagné le peuple depuis Abraham, mais elle est relue rétrospectivement par la foi en la Résurrection. Les hommes restent dans le monde ancien, mais le sens de leur vie est donné par le Monde Nouveau inauguré par la Croix. Elle dénie toute légitimité à la représentation que les hommes ont de Dieu, Il apparaît tout autre. Elle est révélation de Dieu. La Croix nous révèle nos illusions, dénonce nos rêves de toute puissance, d'autonomie, nos fausses sagesses ou piétés. A sa lumière nos vies sont bouleversées, "ce qui est folie dans le monde, Dieu l'a choisi pour confondre les sages; ce qui est faible dans le monde, Dieu l'a choisi pour confondre ce qui est fort" (1 Cor 27). La promesse passe par la Croix qui ouvre une brèche : mort du vieil homme et naissance de l'homme nouveau, disparition de l'ordre ancien (fermé sur soi) et apparition de l'ordre nouveau (ouverture des uns aux autres).


On ne peut pas séparer la Croix de la Résurrection, jusqu'à la fin des temps la Croix est présente, seul Jésus est ressuscité (Pâques ne doit pas occulter le Vendredi Saint qui nous accompagne). La Résurrection est déjà sur la Croix. "L'heure est venue où le fils de l'homme doit être glorifié" (Jn 12, 23) : la glorification (la vie en Dieu) est déjà à l'œuvre sur la Croix, et "moi, élevé de terre [sur la Croix] j'attirerai à moi tous les hommes" (Jn 12, 32). La mort du Christ nous révèle Dieu. La Résurrection qui annonce l'avenir de Dieu avec les hommes illumine la Croix. Celle-ci est conséquence de la prise en compte des hommes par l'amour de Dieu. Dans sa mort, le Christ a détruit le mal des hommes et inauguré une création nouvelle, voilà l'œuvre de Dieu, qui est donc totalement présent au Golgotha. Dans la Passion, le Fils descend jusqu'au fond de la douleur humaine pour nous prendre tous avec lui et nous amener au Père. Dieu est présent dans la Passion, il souffre dans le Fils. Sur la Croix se trouve le Corps du Fils, Corps dont nous sommes membres depuis la cène de la veille. Dieu se révèle comme le même dans l'événement de la Croix et de la Résurrection. Au sortir de la nuit de sa mort sur la Croix, Il se révèle comme le Dieu de la nouvelle promesse, le Dieu qui vient. La Croix n'est plus un instrument de torture, mais une révélation de Dieu-avec-nous.

 

La Croix déclenche une ouverture sur le devenir du monde, ouverture à l'avenir de Dieu et l'anéantissement de la mort, elle est ainsi en contradiction avec le monde. La Croix est le signe de la mort de Dieu dans un monde qui l'a évacué. Elle est signe de contradiction entre notre foi et le monde dans lequel nous vivons. Notre histoire se déroule sous le signe de l'espérance confortée par notre foi en la Résurrection. A nous de nous mettre en marche pour découvrir la révélation qui nous est faite. Le "suivre Jésus" nous engage, il est la condition pour que l'Esprit nous ouvre à la connaissance du Crucifié ressuscité.

 

La Résurrection n'est pas ainsi l'annonce d'un miracle inouï de réanimation d'un corps mort. Elle est bien au-delà de cela. La Résurrection est l'annonce de la fidélité de Dieu à ses promesses, de l'ouverture des temps nouveaux qui donnent sens à l'histoire ancienne et à notre vie actuelle. Début des temps nouveaux dans lesquels le Christ a pour mission de nous rassembler, et où il nous associe à cette mission. La Résurrection est annonce de la victoire sur l'anéantissement, la négation de la négation de Dieu, avec la fin de la Loi et l'ouverture au monde entier. La communauté apostolique a vécu cet éblouissement qui l'a transformée et va la projeter sur les routes pour en témoigner au prix de la vie de ses membres, de notre vie, si nous le voulons.

 

Marc Durand

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