Rester dans l’Église catholique, un pied dedans un pied dehors

Publié le par Garrigues et Sentiers

Ma réponse à la contribution de Pierre Castaner Et pourtant je sors de l’Église catolique : Je reste, un pied dedans un pied dehors.

Mais d’abord, je voudrais dire à Pierre que son texte est magnifique, et émouvant. Je suis d’accord avec toutes ses analyses. Et je le trouve très courageux de tenir cette position. Je dirai même que lisant cet article, j’ai honte de ma position qui est « facile » (je prends le bon, je jette le mauvais) et qui, sans doute, conforte l’institution et empêche de vraies et profondes réformes.

D’abord, et c’est bien égoïste, l’Église me donne une maison et une famille. Bien imparfaites, certes, comme toutes les maisons et toutes les familles. Mais c’est un réflexe bien connu : on aime sa famille même si elle vous maltraite. Pierre liste les nombreux coups portés par l’Église au peuple de Dieu, et les dégâts qui en résultent, profonds durables ; mais il appartient aussi à chacun de se conduire en homme et femme libre, capable de ruer dans les brancards et en mesure en toute hypothèse, de ne pas suivre tel ou tel principe, de ne pas croire en tel ou tel dogme, de dénoncer, de s’opposer mais aussi de proposer, de construire autre chose et d’être partout missionnaire de la bonne nouvelle.

En outre, nous ne sommes pas chrétiens tous seuls. Comme dit saint Jean, tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l'amour les uns pour les autres. (13, 35) ; plus encore, nous savons que nous sommes passés de la mort à la vie ; nous le savons parce que nous aimons nos frères. Celui qui n’aime pas est encore sous le pouvoir de la mort. Autrement dit, c’est l’amour entre frères et sœurs qui fait résurrection. Il faut être ensemble pour être chrétiens. Cet ensemble, on peut l’appeler Église.

Alors, il ne s’agit non de la préservation d’un certain pouvoir d’une Église qu’il faudrait défendre, mais de la construction du Royaume, ici et maintenant, celui auquel m’invite Jésus et si possible, et comme il m’y invite.

Certes, nous naviguons au milieu des crimes, des hontes, des régressions, depuis toujours (ce qui n’excuse rien). Certes au fil des temps, certains ont tenté de redresser dans l’Église ce qui était tordu (les franciscains, les jésuites, tous les réformateurs), certains ont échoué et ont rompu avec L’Église (les protestants, et tous les marginaux de l’Église). D’autres persévèrent, volens nolens. Nous en connaissons tous, nous en sommes. Mais, dirait Churchill, l'échec n'est pas fatal C'est le courage de continuer qui compte... Le succès, c'est d'aller d'échec en échec sans perdre son enthousiasme, et il ajoute plus loin, même si tout est réuni pour qu’on perde ! !

Et puis, ne comptons pas pour rien les évolutions, récentes mais les thèses abandonnées, les réflexions engagées (notamment sur les 3 S de Pierre), les recherches lancées, et la liberté prise par les chrétiens eux-mêmes qui discernent en conscience ce à quoi ils croient en Vérité et/ou ce qu’ils vivent au quotidien, dans ou hors de la morale officielle.

Alors, oui, il faut oser être transgresseur, chacun jusqu’au bout de sa propre audace, pourvu qu’elle soit sincère, non manipulatrice et fraternelle. Je suis une rebelle et je le manifeste par mes engagements, interventions, interpellations. Pierre dira que c’est se donner bonne conscience à bon compte car le système reste intact !

Oui, l’Église va mal, le peuple de Dieu tient le coup… Les religions meurent. Mais notre « affaire avec Jésus » n’est pas qu’une religion, elle est d’abord cette relation d’amis qu’il nous a apprise. Cultivons-la !

« Lorsque rien ne nous permet d'espérer, lorsque l'optimisme ne s'apparente plus qu'à l'illusion et au mensonge, bref lorsque notre monde tourne au désastre pathologique, il reste la conviction, la rage de combattre, l'énergie d'aimer. » (auteur inconnu 2018)

 

Danièle Nizieux

P. S. : Je m’aperçois que moi, la pessimiste, je livre un point de vue ancré dans l’Espérance. Pourtant, je partage les analyses de Pierre et son désespoir. Mais je constate qu’on le voit encore dans des lieux où continue à vibrer une Foi combative et déterminée. Comme moi, finalement !

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G
Ce texte de Danièle répond à la situation actuelle : Que faire de nos déceptions ? Faut-il les ressasser, les cultiver ou bien sans les nier poursuivre le sillon de la foi, suivre la trace, ne pas perdre le fil même s'il paraît de plus en plus ténu ? Comment passer de la désespérance à l'espérance ? Comment ma conviction personnelle : "Chacun à sa place est responsable de ce que nous vivons tous"devient un lien collectif ?
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