A l'écoute de la Parole de Dieu
Deuxième dimanche de carême.
Gn 12, 1-4a; Ps 32 (33): 2Tm 1, 8b-10; Mt 17, 1-9.
L'événement de la Transfiguration se situe entre deux annonces de la Passion, après la profession de foi de Pierre, "Tu es le Christ, le fils du Dieu vivant" (Mt 16, 16), et le commentaire de Jésus sur la nécessité de passer par la Croix pour le suivre. Jésus semble avoir voulu conforter la foi de ces apôtres qui va être bien mise à mal lors de la Passion, afin qu'ils comprennent sa proximité avec Dieu, que le Père sera présent en son Fils crucifié et ne peut l'abandonner. Notre foi est fondée sur la confiance en la fidélité de Dieu qui nous aime au-delà de toutes les vicissitudes qui pourraient l'entamer. La mort ignominieuse de Jésus est un échec humain de sa mission transformé en victoire définitive par sa résurrection par le Père. Difficile d'y croire, c'est une question de confiance.
La proclamation du ciel,
"Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie : écoutez-le !"
diffère peu de celle du baptême,
"Tu es mon fils bien-aimé; tu as tout mon amour" (Lc 3, 22).
Mais cette fois-ci le ciel s'adresse aux apôtres présents, non à Jésus, et il ajoute une injonction, "écoutez-le". Dieu s'adresse à nous pour que nous prenions au sérieux la Bonne Nouvelle.
Jésus n'a jamais rien dit de ce qu'il deviendrait après sa mort. Après la Résurrection il ne dit rien de cela : il demande aux disciples de croire et les envoie en mission, c'est tout. Il est important que la phrase du ciel se termine par "écoutez-le". Le souvenir de la Transfiguration a permis à Pierre, Jacques et Jean (les "colonnes" de l’Église naissante) de comprendre que tout n'était pas fini, une nouvelle Vie était apparue par la grâce du Père. Il leur restait, après l'avoir écouté, à se mettre en chemin. Et non à bâtir trois tentes pour faire durer le bonheur de l'apparition, pour s'endormir dans leur bien-être de bons disciples. La foi est un chemin, on ne peut pas la figer.
Dans le texte de Luc, il est dit que l'événement s'est déroulé alors que Jésus était en prière. C'est quand nous nous tenons devant Dieu qu'il peut se révéler à nous. Luc insiste sur cette nécessité de la prière. Déjà lors du baptême il notait :
"Au moment où Jésus, baptisé lui aussi, se trouvait en prière, le ciel s'ouvrit..." (Lc 3, 21).
Avant la proclamation du Père, Jésus s'entretenait avec Moïse et Élie. Jésus manifeste ainsi qu'il n'est pas un être tombé du ciel, tout d'un coup, pour apporter une révélation. Moïse et Élie étaient considérés comme les piliers de la foi d'Israël, Jésus, en quelque sorte, se fait adouber par eux. Toute la confiance en la promesse de Dieu vécue par Israël devient la source de la confiance que les apôtres peuvent avoir en Jésus et son Père. Le premier Testament est là pour nous révéler la relation de Dieu avec nous. Jésus se trouve dans la lignée des prophètes, il reprend leur chemin pour nous révéler le Père. Avec les disciples d'Emmaüs, au soir de Pâques, il reviendra sur ce cheminement qui dure depuis 2000 ans environ :
"Commençant par Moïse et parcourant tous les Prophètes, il leur interpréta dans les Écritures tout ce qui le concernait" (Lc 24, 27).
Enfin, après sa Résurrection, Jésus n'a rien dit sur sa Vie avec le Père, il est allé à l'essentiel en les envoyant en Galilée (non au centre de la religion qu'était Jérusalem et son Temple) et la seule parole sur son avenir a été
"Je monte vers mon Père et votre Père, mon Dieu et votre Dieu" (Jn 20, 17).
Si nous écoutons Jésus, alors comme lui, nous sommes fils du Père, fils de Dieu.
La liturgie fait précéder cet évangile du petit texte sur la vocation d'Abraham et une lettre de Paul nous rappelant le statut de celui qui est appelé. En quelque sorte il s'agit des consignes pour suivre Jésus en qui notre confiance a été confortée par l'évangile.
"Abram s'en alla, comme le Seigneur le lui avait dit".
Concision du texte, pas de fioritures. Abraham a cru, a fait confiance, il est parti. Et il devient une bénédiction pour les hommes. La bénédiction est un don de Dieu aux hommes (elle ne sépare pas des autres hommes, au contraire de la sainteté qui est de l'ordre de Dieu). L'homme reçoit ce don de Dieu et le transmet, seul Dieu peut bénir, les hommes transmettent. La bénédiction est source d'échange de Vie (celle qu'on appelle éternelle) entre les hommes, elle est le don par excellence pour tous ceux qui acceptent de la recevoir, toutes les familles de la terre (sont maudits seuls ceux qui choisissent de la refuser).
Paul nous demande de répondre à notre vocation, et nous rappelle que nous
"devons prendre part des souffrances liées à l'annonce de l’Évangile".
Il nous rappelle que cette vocation nous est offerte par pure grâce, c'est Dieu qui nous choisit, pas nous qui choisissons Dieu, nous répondons seulement. La grâce est la définition du don de Dieu. La bénédiction est un acte de Dieu qui ouvre l'homme à tous ses dons, la grâce est le don lui-même, le don de lui-même, le don de la Vie, le don de Jésus-Christ.
Cette relation à Dieu, de pure grâce, en toute confiance, est alors chantée dans le psaume.
"Dieu veille sur ceux qui le craignent, qui mettent leur espoir en son amour".
"Que ton amour, Seigneur, soit sur nous, comme notre espoir est en toi".
Marc Durand