A l'écoute de la Parole de Dieu

Publié le par Garrigues et Sentiers

28eme dimanche du Temps Ordinaire 9/10/2022

2Rois 5, 14-17 ; Ps 97 ; 1 Tm 2, 8-13 ; Lc 17, 11-19

 

Guérisons et conversion : Quelle relation entre la santé et la foi ?

Deux lectures de ce dimanche sont centrées sur des problèmes de santé et de maladie. Dans l’Évangile, la santé prend une place importante : les récits de guérison en occupent près des deux tiers. Jésus, vu le milieu culturel d’alors, ne pouvait pas ne pas apparaître comme un guérisseur (1) Les guérisons sont, par Lui, un « signe » du Royaume.

 

Dans la première lecture Naaman, lépreux, samaritain (2) chef de l'armée d’Aram est guéri par Élisée et se convertit au Dieu d'Israël.

 

Dans l’ Évangile , Jésus marche vers Jérusalem, vers sa mort. Il accueille 10 lépreux et les guérit en leur demandant de se présenter aux prêtres selon l’usage pour être réintégré dans la communauté. Seul, un samaritain fait demi-tour pour le remercier.

 

Quelles leçons en tirer aujourd’hui alors que le monde de Jésus et le nôtre sont très différents, notamment dans le domaine de la santé ? Du temps de Jésus, un malade allait voir un prêtre car la maladie était signe de péché. Aujourd’hui un malade va voir un médecin. La médecine est beaucoup plus efficace pour la santé que les prières à sainte Rita ou autres amulettes, même si le nombre des guérisseurs reste toujours aussi impressionnant.

Aujourd’hui, quelles relations entre la foi et la santé : comment une guérison peut-elle être chemin de conversion ?

 

Plusieurs étapes sont possibles : d’abord développer une attitude positive de gratitude envers la santé et la vie. À l’inverse une certaine mentalité actuelle proclame le « droit à la santé », alors qu’ il s’agit d’un « droit d’être soigné », la santé restant un idéal et non pas un droit. Cette mentalité va souvent de pair avec la pratique, en connivence avec certains médecins, d’exiger le maximum de médicaments ou d’interventions médicales, sans se poser la moindre question concernant les coûts engendrés (3). Comprenons-nous bien : il ne s’agit pas de culpabiliser un malade, mais de prendre conscience combien nous avons un système de santé privilégié avec notre sécurité sociale, l’un des meilleurs systèmes au monde, même s'il y a quelques ratés. Il suffit de voyager pour s’en rendre compte . Cette attitude de « droit à la santé » peut entraîner un manque d'attention pour le personnel soignant : « Je n’ai pas à les remercier. Ils sont payés pour cela. Mais, si je ne suis pas content, ils m’entendront… ».

1ère étape possible : s’informer du coût de la santé, pour ne pas être un simple consommateur, mais un citoyen conscient (4) des bienfaits reçus et être reconnaissant envers le système des soins et le personnel soignant, comme le lépreux de l’Évangile.

Autre démarche possible : cette façon de vivre positive peut entraîner une façon différente de vivre nos fragilités, de quelque ordre que ce soit, physiques, intellectuelles ou affectives. On peut les considérer comme des tares à supprimer, tout en considérant avec rancœur les « biens portants ». On peut aussi s’accepter avec ses fragilités, en essayant de les diminuer mais en les considérant comme faisant partie de soi ; ces fragilités acceptées peuvent ainsi devenir des occasions de rencontres avec soi-même, avec les autres et avec Dieu. La philosophie actuelle s’intéresse à ce thème de la fragilité comme possibilité de rencontrer l’autre.

Est-il possible d’aller plus loin : en quoi cette attitude concernant la santé peut-elle être une occasion de rencontre de Dieu ?

Déjà cette attitude de gratitude et d’acceptation de sa fragilité est un excellent chemin de sortie de soi, de son enfermement et de s’ouvrir aux autres.

 

La deuxième lecture tirée de l’épître à Timothée nous apporte des éléments de réflexion : « Souviens-toi de Jésus-Christ ressuscité d’entre les morts (…) Si nous sommes morts avec lui, avec lui nous vivrons. » Dans l’épître aux Éphésiens (Eph. 2,6), Paul proclame qu’« avec Lui (le Christ, il (le Père) nous a ressuscités et nous a fait asseoir aux cieux dans le Christ Jésus ». Nous vivons dès maintenant une vie ressuscitée. Si notre foi en Jésus Christ ressuscité est réelle, il semble impossible que cette foi n’ait pas une incidence sur notre vie et notre santé, sans pouvoir définir leurs liens exacts. Comment concilier les tensions entre d’une part l’autonomie du système médical, de la santé, et le lien entre santé et vie profonde de chacun, notamment les relations avec lui-même, les autres et Dieu. Dans une vie humaine, la confiance et l’amour sont des éléments essentiels et structurants : or la foi est la conviction que nous avons du prix aux yeux de Dieu, que nous sommes aimés de lui à qui nous pouvons dire « Père ». Cette conviction a nécessairement une incidence sur notre vie profonde, notre santé, comme déjà l’amour inconditionnel des parents joue un rôle important dans le développement d’un enfant. Quelqu’un qui se sait aimé de Dieu, ne vivra pas de la même façon ses problèmes de bonne ou de mauvaise santé.

Prions l’Esprit et le samaritain guéri de l’Évangile, de vivre nos problèmes de santé comme chemin de vie vers Soi, les autres, et Dieu

Antoine Duprez

 

(1) Dans tout le Moyen-Orient, existaient des guérisseurs que l’on consultait. Esculape était le dieu guérisseur par excellence. Ses temples nombreux dans le Moyen Orient étaient à la fois des lieux religieux et des « maisons médicales », avec son personnel spécialisé dans les deux domaines. Apollonius de Tyane était un guérisseur célèbre, contemporain de Jésus (16 -97 ap J.C).

 

(2) En 931, un schisme sépare les deux royaumes d'Israël et de Judas. Vers 885, Omri est roi d’Israël au temps des prophètes Élie et Élisée. En 722 Sargon 2 détruit le royaume du Nord. Pour Jérusalem, les samaritains étaient des schismatiques détestés et réciproquement. Jésus est mal accueilli en Samarie, car il va vers Jérusalem. (Lc 9, 53). Cependant, il dépasse ces haines nationalistes. Il entre en conversation avec la Samaritaine (Jn 4).

 

(3) Il s’agit d’estimations, sans compter les frais annexes : coût de traitement DMLA (900 € par mois) opération, prothèse du genou (3000 €).

 

(4) Étant curiste (essayant d’être un curiste conscient et reconnaissant), je suis frappé par la gentillesse du personnel soignant sauf exception et aussi par l’attitude de certains curistes qui estimant avoir droit à une cure, n’ont pas un mot de remerciement pour ceux qui les soignent.

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