A l'écoute de la Parole de Dieu
20eme Dimanche ordinaire
Jr 38, 4-6. 8-10 ; Ps 39 ; He 12, 1-4 ; Lc 12, 49-53
En quoi sommes-nous concernés par ce dimanche rempli de persécutions et de conflits ?
Dans la première lecture, Jérémie annonçait la prise de Jérusalem alors que tous les faux prophètes annonçaient la victoire et la paix : il est condamné par le roi et les notables à mourir de faim dans les bas-fonds d’une citerne : « En parlant comme il le fait, il démoralise tout ce qui reste de combattant dans la ». Seul un Éthiopien, un païen, interviendra courageusement et lui sauvera la vie.
Le psaume 39 chante l’action de grâces d’un pauvre et malheureux que Dieu a tiré « de l’horreur du gouffre, de la vase et de la boue ».
L’épître aux Hébreux cite l’exemple de Jésus, « origine et terme de la foi » qui « renonçant à la joie qui lui était proposée a enduré le supplice de la croix de la part des pêcheurs ».
Dans L’Évangile, écrit vers la fin du Ier siècle, alors que les communautés chrétiennes vivent les exclusions des communautés juives et, à Rome, les premières persécutions de Néron (vers 60 ap J.C.), Jésus tient des propos subversifs : « il est venu apporter un feu sur la terre et la division au sein des familles, père contre fils, fils contre père… ».
Ces textes mettent à mal l’image d’un Jésus en vogue au XIXe siècle, « doux rêveur », hippie pacifiste, prônant une éthique du bien-être personnel à tout prix. Un certain courant de spiritualité moderne, lucratif, misant avant tout sur l’épanouissement personnel, ne consonne pas avec Paul, pour qui le cœur du message chrétien, dans la lignée du sort des prophètes, est « le Christ crucifié et ressuscité ». L’Évangile serait-il extrémiste, prônant la violence et la souffrance comme critères de sainteté ?
Le Christ, avec sa personnalité, ses dons d’orateur et de guérisseur, aurait pu mener une vie « réussie » de gourou, comme des guérisseurs (1) de son époque. Il ne l’a pas voulu. Il s’est heurté aux idéologies dominantes du « César est dieu » pour les romains, de « La Loi est souveraine » pour les autorités juives. Du moment que quelqu’un respectait ces lois, il n’avait aucun problème avec les autorités romaines et juives. Sans être un militant nationaliste, Jésus a contesté ces idéologies dominantes et, de ce fait, à la suite des prophètes, a été persécuté par les « pécheurs ».
Quels seraient aujourd’hui les « persécuteurs » et les persécutés ?
L’idéologie actuelle du monde ne serait-elle pas justement cette loi non écrite : « Le bonheur est ton affaire personnelle. Plus tu consommes, plus tu existes : profite de la vie au maximum sans t’occuper des autres ». Ceux qui dénoncent ce mode de vie et s’engagent pour un changement radical dans le mode de production et de répartition des richesses ou ceux qui luttent contre tout régime totalitaire, seront nécessairement persécutés (2), comme l’histoire le montre.
Notre époque se trouve affrontée notamment à trois défis : un partage des richesses plus juste à l’intérieur de chaque nation et entre nations, un changement climatique et les migrations politiques et économiques. Quiconque cherchera à établir plus de justice dans l’un de ces domaines subira des persécutions.
Esprit donne à ton Église, et à nous-mêmes, à l’image de Jésus Christ, le courage de refuser les fausses paix qui étouffent les vrais problèmes, donne nous d’être des allumeurs de ce feu dont Jésus Christ voulait incendier le monde
Antoine Duprez
(1) Cf. Apollonius de Tyane
(2) Helder Camara, Mgr Romero, les lanceurs d’alerte...