A l'écoute de la Parole de Dieu
18eme dimanche du Temps Ordinaire 31/07/2022
Qo 1, 2 ; 2, 21-23 ; Ps 89 ; Col 3, 1-5. 9-11 ; Lc 12, 13-21
A une première lecture de ces textes, nous pourrions les interpréter comme une condamnation des activités humaines, du travail qui aboutit à obtenir des biens. « En effet que reste-t-il à l'homme de toute la peine et de tous les calculs pour lesquels il se fatigue sous le soleil ? » « Vanité des vanités tout est vanité ».
A la limite nous devrions cesser toute activité pour prier et attendre la mort car après la mort nous connaîtrions la gloire éternelle ! « Vous êtes passés par la mort... Quand paraîtra le Christ votre vie, alors vous aussi vous paraîtrez avec lui dans la gloire »
Mais pouvons-nous y lire une interprétation pour les vivants que nous sommes pour le moment, moment où j'écris ces lignes je suis en vie et les lecteurs de ces lignes aussi !
Voici une expérience qu'il m'a été donnée de vivre, deux religieuses vivant dans notre quartier partent en Ehpad et en maison de retraite (à 90 ans et 80), lors du repas d'adieu elles posent sur un petit tapis de menus objets de leur quotidien pour les mettre à disposition de la cinquantaine de personnes qui partagent ce repas. J'ai posé un bref regard sur la tasse à thé, un plat en poterie, des crayons, livres, carnet, bibelot... Ils témoignaient du dénuement dans lequel elles avaient vécu toute leur vie, pourtant dans leur attitude, leur regard, aucun ressentiment, aucune certitude négative ne se lisaient.
C'était plutôt la joie : la joie accomplie par tant d'années au service des habitants, la joie de recevoir tant d'hommages et d'affection de ceux et celles qui les ont côtoyés et la joie confiante dans un nouveau départ.
Ce ne sont pas les activités humaines ni le travail qui sont à blâmer mais « l'avidité », la croyance à « l’idolâtrie » dans un matérialisme qui supplanterait l'acquisition de richesses matérielles aux relations humaines, la tendance à posséder, à se laisser posséder par les biens acquis au lieu des richesses de l'esprit, « d'être riche en vue de Dieu ».
Heidegger a bien défini l'homme/la femme comme des êtres en souci, souci de rester en vie, de gagner sa vie, de poursuivre sa vie... L'éternel souci du labeur humain, du salaire, de la gestion des biens, de la rente, de la santé... Je me soucie dont j'ex-iste, je développe des désirs dans un monde qui développe une résistance à mes désirs, d'où une lutte perpétuelle qui s'accompagne d'angoisse, d'un sentiment d'inquiétude pour le lendemain.
Relisons l'évangile (Lc 12, 13-21). J'ai droit à un héritage, je n'ai pas reçu ce à quoi j'avais droit ? J'ai des biens comment les conserver pour en tirer une rente le plus longtemps possible ?
Certaines phrases des textes ou leur traduction donnent à penser que la certitude de la mort nous conduirait à la vie spirituelle, mais c'est oublier que pour beaucoup de nos contemporains souffrant de syndrome anxio-dépressif, elle ne fait qu'ajouter son poids d'angoisses aux inquiétudes et aux soucis habituels. !
Nos religieuses et leur foi vivante de vivantes nous donnent des clés : tournons-nous toujours vers la vie, partageons la vie collective des êtres en proximité avec nous, étudions la Parole de Dieu, prions non pas pour endiguer nos peurs mais pour garder toujours cette orientation : vivre en cherchant la trace de Dieu en tous temps, en tous lieux dans les visages qui nous entourent.
Peut-être cette orientation insufflera en nous une confiance résolue dans le sentiment de notre instant de vie et de notre activité humaine ? « Que vienne sur nous la douceur du Seigneur notre Dieu. Consolide pour nous l'ouvrage de nos mains ».
Christiane Giraud-Barra