A l'écoute de la Parole de Dieu
Pentecôte Dimanche 05/06/2022
La liturgie nous propose des textes pour la vigile et d’autres pour le dimanche, avec un grand choix pour la vigile. Ces textes sont riches, tous nous ramènent à l’importance de l’Esprit dans notre foi, il serait dommage d’en négliger l’un ou l’autre. Nous allons évoquer d’abord la vigile, puis les textes du dimanche.
Vigile
Choix de la première lecture : Gn 11, 1-9 ; Ex 19, 3-8a.16-20b ;
Psaume 103 (104). Seconde lecture : Rm 8, 22-27.
Ces textes de l’Ancien Testament nous montrent la volonté constante de Dieu de protéger son peuple, et d’abord de demander aux hommes de compter sur Lui, et non sur eux seuls, ce qui, automatiquement, les séparerait de Lui, en ferait ses concurrents.
Cela est clair dans le texte de la Genèse racontant l’histoire de la tour de Babel. Les hommes construisent une ville et une tour qui monte dans le ciel afin de se donner un nom qui les unisse. Or c’est Dieu qui nomme, l’homme ne peut nommer que les animaux (voir le récit de la Création) car nommer signifie dominer, s’approprier. Si les hommes se donnent un nom, « alors ils feront tout ce qu’ils décideront » comme l’a fait Adam avec le fruit de l’arbre défendu. Quant à construire une ville, cela a été l’œuvre de Caïn (Gn 4, 17) parce que chassé après son crime. Alors Dieu sépare les hommes en brouillant leurs langues, les disperse pour les empêcher d’opérer cette rupture d’avec leur créateur. A cela répondra le texte de la Pentecôte dans les Actes, lu le dimanche. Les langues sont diverses, mais chacun comprend dans sa langue ce qu’on lui dit. Cela est possible parce que « chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit ». C’est lorsqu’ils accueillent l’Esprit que les hommes retrouvent la possibilité de se comprendre. Il a fallu passer par la Croix, la Résurrection et le départ de Jésus pour que l’Esprit soit donné et permette à nouveau aux hommes de faire communauté, de se retrouver.
Les trois textes suivants, ainsi que celui des Actes, décrivent une théophanie glorieuse : tonnerre, éclairs, coup de vent. Dieu se manifeste dans sa puissance avant d’agir. Ceci est intéressant en regard du texte de l’Ascension : Jésus s’élève dans les cieux en toute discrétion, il ne se donne pas les attributs de Dieu Souverain. C’est le Père qui manifeste sa grandeur, le Fils ramène tout au Père.
Dans le texte de l’Exode, au Sinaï Dieu veut constituer son peuple : « Vous serez pour moi un royaume de prêtres, une nation sainte ». Et Ézéchiel, s’adressant à la nation désespérée, emmenée en exil, annonce l’espérance et le salut parce que Dieu va leur donner l’esprit. Aux ossements desséchés, signe de la déréliction du peuple, Ézéchiel prophétise : « Je vais faire entrer en vous l’esprit et vous vivrez ». Pas de vie sans recevoir l’esprit de Dieu. « L’esprit entra en eux et ils revinrent à la vie...Je mettrai en vous mon esprit et vous vivrez ». A ceux qui disaient « notre espérance est détruite », il répond « je vais ouvrir vos tombeaux et je vous en ferai remonter », par l’esprit qu’il leur a envoyé. Joël insiste : « Je répandrai mon esprit sur tout être de chair...Alors quiconque invoquera le nom du seigneur sera sauvé. » Ainsi c’est en recevant l’esprit que nous entrons dans la « vraie vie », qui plus tard sera appelée la « vie éternelle » (il n’est pas question d’éternité dans ce langage mais de vérité de la vie), et que donc nous sommes sauvés.
Le psaume est un grand chant d’action de grâces : « Quelle profusion dans tes œuvres, Seigneur ! ». Ou encore : « Tu reprends leur souffle [c’est-à-dire ton Esprit], ils expirent...tu envoies ton souffle : ils sont créés ; tu renouvelles la face de la terre ».
Saint Paul, dans son adresse aux Romains fait le constat que tout n’est pas encore transformé, « la création toute entière gémit », mais l’Esprit est à l’œuvre, sans Lui, pas d’espoir. Mieux, « L’Esprit lui-même intercède pour nous par des gémissements inexprimables ». On est encore monté d’un cran, nous avons reçu l’Esprit pour avoir la vie, mais c’est l’Esprit lui-même qui agit à travers nous.
Reste une condition, essentielle, pour que l’Esprit puisse nous combler, vivre en nous. C’est l’Évangile qui nous le dit, il faut avoir soif de Dieu pour recevoir l’Esprit Saint. Là est le nœud de la question : quelle est notre soif, quel est notre désir ? Or c’est Dieu qui nous a choisis le premier et c’est son Esprit, pourvu que nous l’acceptions, qui va faire grandir en nous la soif de Dieu.
Messe du jour
Ac 2, 1-11 ; Ps 103 (104) ; Rm 8, 8-17 ; Veni Creator ;
Le texte des Actes est la réponse à la promesse de Jésus qu’on lit dans l’Évangile, de nous envoyer le Défenseur. Ce Défenseur, qui doit nous éclairer tout au long de notre chemin, nous le recevons ensemble et chacun en particulier. Il nous permet de nous comprendre, de nous ouvrir à tous les hommes. Il nous guide pour comprendre la Révélation de Dieu, c’est à sa lumière que nous pouvons relire les textes des deux Testaments. C’est en faisant Église (les disciples étaient réunis pour le recevoir) que nous recevons l’Esprit, que nous le recevons par les autres et qu’il passe par nous pour atteindre les autres. Sans l’Esprit, nous ne pouvons pas faire Église, nous
sommes renvoyés chacun à sa propre solitude.
C’est l’Esprit qui nous fait membres du Corps du Christ, si nous acceptons de l’accueillir : « vous, vous n’êtes pas sous l’emprise de la chair [c’est-à-dire simplement de la vie humaine, sur notre terre], mais sous celle de l’Esprit », « L’Esprit vous fait vivre puisque vous êtes devenus justes », et enfin : « vous avez reçu un Esprit qui fait de vous des fils ». Mais Paul, réaliste, sait que tout n’est pas encore transfiguré, que nous avons notre chemin à parcourir « dans la chair », aussi conclut-il par ces mots : « Si du moins nous souffrons pour être avec lui dans la gloire ».
Dans l’Évangile, Jésus nous promet le Défenseur qui doit tout nous faire comprendre. Si un homme accueille l’Esprit, alors « chez lui, nous ferons notre demeure ».
L’ensemble de ces textes nous assure que c’est l’Esprit qui fait de nous des fils de Dieu. Si l’Esprit vit en nous, alors c’est la Trinité qui nous investit et notre action devient celle de Dieu. Depuis Pâques les textes liturgiques ont insisté, constamment, sur le commandement d’amour qui est donc au cœur de la Révélation. Cet amour est d’abord l’amour qui est la vie même de la Trinité, et par la venue de l’Esprit en nous, il devient aussi celui des hommes qui sont incorporés à la vie Trinitaire. Le premier et le second commandement sont semblables : l’amour du Père pour le Fils et du Fils pour le Père, exprimés dans l’Esprit, devient aussi l’amour du Père et du Fils pour nous les hommes, dans le même Esprit, et l’amour que nous avons pour Dieu en aimant nos frères.
Marc Durand