A l'écoute de la Parole de Dieu
32ème dimanche du Temps ordinaire
1R 17, 10-16 ; Ps 145 (146) ; He 9, 24-28 ; Mc 12, 38-44.
Élie, le grand prophète dans la mémoire d’Israël, est vraiment le représentant de Dieu. L’attitude de la veuve de Sarepta vis-à-vis de lui est signe de son attitude vis-à-vis de Dieu. Le texte est criant de simplicité, sans fioritures : « Je rentre préparer pour moi et pour mon fils ce qui nous reste. Nous le mangerons, et puis nous mourrons. » La réponse ? « N’aie pas peur, va, fais ce que tu as dit ». Et Élie qui se fait servir en premier comme si de rien n’était ! « Fais ce que tu as dit. Mais d’abord cuis-moi une petite galette et apporte-la moi ; ensuite tu en feras pour toi et ton fils » ! Mais sa parole est la Parole de Dieu, la veuve la croit : « Et la jarre de farine ne s’épuisa pas, et le vase d’huile ne se vida pas, ainsi que le Seigneur l’avait annoncé ». Texte de confiance en Dieu, de foi en lui. Dieu ne nous abandonne pas dans la déréliction la plus extrême pourvu que nous comptions sur sa Parole, même quand tout semble perdu. Texte pour nous, maintenant, dans notre Église en passe de disparaître… de plus par sa faute !
Nous pouvons alors chanter le psaume qui rappelle le Magnificat : « Il comble de bien les affamés, renvoie les riches les mains vides ». C’est de tous les pauvres, les exclus, ceux qui ne sont pas dans l’installation (les étrangers par exemple) que Dieu prend soin. Les autres, il nous en préserve : « Il égare les pas du méchant ». Question : de quel bord sommes nous ? De celui des riches, des installés qui n’ont plus rien à demander, ou des affamés ? Affamés de quoi ? Sans oublier ceux qui ont faim, très concrètement, et qui ne sont pas loin de nous, même quand nous savons ne pas les voir. On peut consulter le dernier rapport sur la pauvreté du collectif Alerte PACA : https://www.alerte-exclusions.fr/sites/default/files/Fichiers/communiques/20211008-rapport-alerte-chroniques-ultraprecarite-2021.pdf, il est édifiant.
Au cours de l’histoire d’Israël, tout était sans cesse à reprendre. Dieu donne à ceux qui ont la foi, mais le peuple doit avancer pour comprendre cette bonté de Dieu, par ses sacrifices répétés il essaye de se rapprocher de son Seigneur. Il attend le Messie qui va enfin le sauver, recréer ce monde en un lieu où « coulent le lait et le miel ». Les prophètes, tel Élie, sont là pour guider le peuple sur cette route du salut, les prêtres pour tenter de maintenir, par les sacrifices, le lien ténu qui le lie à Yahvé. Le Christ, par son sacrifice (« rendre sacré », c’est-à-dire « remettre à Dieu ») a remis l’humanité entre les mains du Père. La croix-résurrection marque un point de non-retour. « C’est une fois pour toutes, à la fin des temps, qu’il s’est manifesté pour détruire le péché par son sacrifice ». Les multiples sacrifices sont devenus inutiles, on est rentré dans les temps nouveaux, le temps où l’Esprit est donné aux hommes pour vivre de l’amour de Dieu. On est passé de l’ère du péché, de la coupure d’avec Dieu, à l’ère de la grâce et du salut : « Il apparaîtra une seconde fois, non plus à cause du péché, mais pour le salut de ceux qui l’attendent ». Le don que Yahvé faisait aux hommes en les comblant de ses bienfaits, comme envers la veuve de Sarepta, est maintenant un don éternel, c’est-à-dire non lié au temps, un don qui nous fait vivre totalement dans notre état de fils de Dieu dans lequel le Christ nous a fait entrer.
L’évangile, en évoquant cette veuve pauvre, comme celle de Sarepta, rappelle le geste de la première qui, dans l’indigence totale, a donné à Élie tout ce qui lui restait. La question est : dans ce monde nouveau inauguré par la croix qui est l’unique sacrifice, est-ce que nous avons assez de foi pour tout donner, au-delà de notre superflu ? Dit différemment : nous contentons-nous de la pratique de notre religion, pratique sérieuse, en faisant « ce qu’il faut », en continuant à « sacrifier » à la petite semaine, ou voulons-nous sortir de notre confort, de notre installation, pour suivre Jésus dans ce monde nouveau ? Sommes-nous disposés à être secoués par son appel sans savoir ce qui adviendra ? Notre réponse nous engage, elle n’est pas évidente...
Marc Durand