A l'écoute de la Parole de Dieu
22e Dimanche du T.O. (année B) 29/08/2021
Dt 4 ; Ps 14 (15) ; Jc 1 ; Mc 7
« Vous n’ajouterez rien à ce que je vous ordonne, et vous n’y enlèverez rien…» (Dt 4,2). Terrible injonction car, à sa suite, on ne peut tenter d’interpréter la Parole de Dieu, acte pourtant nécessaire pour qu’elle reste vivante, qu’avec crainte et tremblements. Cette exigence est sans doute à l’origine du «tout-ou-rien» proposé par Josué aux tribus d’Israël dans la liturgie de dimanche dernier (Jos 24,15). Pas d’accommodement, pas de syncrétisme, il faut choisir la Loi du Seigneur ou les errances des faux dieux, parmi lesquels on peut ranger : un ego exacerbé, le goût du pouvoir, l’appât de l’argent, l’obsession du paraître…
A question péremptoire réponse univoque du peuple d’Israël : «Plutôt mourir que d’abandonner le Seigneur pour servir d’autres dieux !» Mais réponse hardie, voire imprudente, quand on sait que le peuple élu fut, comme nous-mêmes, souvent infidèle, jamais satisfait de ce que Yahvé faisait pour lui. Être libéré de l’esclavage, oui ! à condition de pouvoir continuer à manger «assis près des marmites de viande» qu’on partageait chez le maître égyptien.
Et nous dans tout ça ? Où est notre confiance dans la bienveillance de notre Dieu ? Quand le malheur nous frappe (Ps. 33 (34), attendons nous, en réelle espérance, que le Seigneur nous délivre ? Savons- nous lire les signes de sa volonté qui nous étonne, qui semble parfois vouloir nous détruire (pensons aux malheurs de Job), qui s’affirme contre nos désirs apparemment les plus légitimes (être «heureux»), mais que nous voulons assumer à notre manière, dès maintenant et pour toujours ?
À l’égard de sa Parole, qui devrait nous guider, où en est notre mise en pratique, telle qu’elle est conseillée par l’apôtre Jacques (Jq 1,22 ) ? D’abord, la lisons-nous cette Parole ? L’écoutons-nous pour l’entendre vraiment au cœur, la comprendre et en vivre, ou nous contentons-nous de l’assurance purement humaine d’une répétition de gestes, de formules, baptisée tradition, elle-même établie en un temps daté, ne correspondant plus à un état du monde foncièrement différent ?
Il ne s’agit évidemment pas de vouloir adapter la Parole de Dieu aux mœurs ou aux modes de notre époque, rappelons-nous la mise en demeure de Josué : ne rien rajouter, ne rien enlever. Mais si nous voulons toucher nos contemporains, il faut impérativement parler une langue perceptible aujourd’hui, et non s’attacher à des comportements ou à des images devenus «insignifiants» ? Ainsi, d’après Marc (Mc 7, 3-4), Jésus, pourtant venu pour accomplir la Loi (Mt 5,17), condamne des rites suivis à la lettre (relevant parfois d’une simple vaisselle : lavage des coupes, des carafes et des plats…), alors qu’on oublie l’esprit des commandements de Dieu révélés par Moïse (Mc 7,8), ou qu’on les détourne de leur signification, comme lorsqu’on prétend consacrer ses biens à Dieu, afin de ne pas aider ses propres parents (Mc 7, 11-12) en dépit du 4e commandement. Cela mérite examen.
Nous avons trop souvent l’impression que le mal est hors de nous, qu’il nous assiège, que nous n’en sommes que les victimes et non, souvent, les complices. Or dit Jésus, dans l’évangile de ce jour : « Rien de ce qui est extérieur à l’homme et qui entre en lui ne peut le rendre impur. Mais ce qui sort de l’homme, voilà ce qui rend l’homme impur […] Car c’est du dedans, du cœur de l’homme, que sortent les pensées perverses : inconduites, vols, meurtres, adultères, cupidités, méchancetés, fraude, débauche, envie, diffamation, orgueil et démesure. Tout ce mal vient du dedans, et rend l’homme impur » (Mc 7, 15, 21-23). Voila une interpellation utile pour réfléchir à notre responsabilité dans nos éventuels examens de conscience, et qui nous évitera de rejeter systématiquement les fautes sur autrui.
Puisse se réaliser pour nous la sommation de Jésus, dans le même chapitre 7 de Marc (verset 34) : «Ouvre-toi !». Ne restons pas (en)fermés dans nos habitudes, le confort d’un catéchisme ni intégré, ni dépassé, la facilité de rites rassurants, mais qui peuvent devenir vides de sens, si loin de la force libératrice de l’Évangile.
Marcel Bernos