A l'écoute de la Parole de Dieu

Publié le par Garrigues et Sentiers

15e Dimanche du Temps Ordinaire Année B 11/07/2021

Am 7, 12-15 ; Ps 84 (85) ; Ep 1,3-14 ; Mc 6,7-13

 

«Nul n’est prophète en son pays» (Mc 6,4 et Lc 4,24). Le prophète est un être dérangeant, on le connaît banalement comme voisin, et il gêne, car il prétend transmettre la Parole de Dieu, que l’on n’a pas forcément envie d’entendre. Ou bien il représente un concurrent pour des prêtres établis, tel Amazias de Béthel («la maison de Dieu» !). Pourtant, les Écritures le rappellent : Dieu choisit qui il veut pour dire «Va, tu seras prophète pour mon peuple», fût-ce un simple bouvier, comme Amos (Am 7,14) ou le petit dernier de Jessé, simple berger comme David.

 

Premier pas dans la prophétie : écouter ce que dit le Seigneur (Ps 84,9), être son truchement fidèle. Le prophète n’a pas à improviser, il ne doit pas corriger ce qu’il est chargé de proclamer. La règle, rappelée aussi bien dans l’Ancienne Alliance (Deut 4,2) que par la Nouvelle alliance (Ap 22,19), est de n’ajouter rien et de ne rien retrancher du message. Le livre de l’Apocalypse précise même pour celui qui se le permettrait que « Dieu retranchera sa part de l'arbre de la vie».

 

Ceux qui partent en mission annoncer la Parole seront en équipe de deux (Mc 6,7), non pour se surveiller mutuellement, comme de vulgaires agents d’un quelconque «politburo», mais pour se soutenir l’un l’autre dans des conditions de vie précaires : sans provisions ni rechanges (Mc 6,8-9), sans assurance d’être bien reçus (Mc 6,11).

Y a-t-il encore des prophètes aujourd’hui ? On peut considérer que des auteurs comme Péguy (chantre de la petite Espérance) ou Bernanos ont naguère rempli des fonctions prophétiques, c’est à dire des «diseurs» de vérité sur Dieu, dénonçant à l’occasion ce que l’on a fait. de Lui ou ce qu’on lui fait dire en prétendant agir «en son nom».

Lorsque parurent «Les grands cimetières sous la lune», en 1938, Bernanos, homme de droite et fils irrémédiablement fidèle de l’Église, a pris le risque d’être incompris et de se couper de ceux qui lui étaient proches. Il avait lui-même accueilli favorablement le soulèvement franquiste, en 1936, alors que des religieux avaient été massacrés par les républicains espagnols. Mais témoin des crimes de la soldatesque franquiste, qu’il voit à l’œuvre à Majorque où il séjournait, il n’hésite pas à dénoncer la complicité de fait du clergé espagnol et en particulier de l’évêque de Palma.

 

Aujourd’hui, certains auteurs religieux remplissent parfois cette fonction de prophète «au delà des murs», soit en clarifiant une théologie trop obscure pour les fidèles, tel Joseph Moingt († 2020), dont les écrits animent de nombreux militants laïcs, soit par une écriture «poétique», comme Jean Sulivan († 1980) promoteur de la liberté spirituelle, y compris par rapport à l’Église institutionnelle, sans négliger pourtant le fait qu’elle a permis la transmission de l’Évangile.

Et en quoi tout cela nous regarde ? Eh bien ! il n’est pas interdit, si Dieu nous y appelle, de participer à l’annonce de sa Parole vivifiante et de la venue de son Règne de paix, où il reste fort à faire.

Marcel Bernos

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